SECTION XIII
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LES FORCES
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MODES DE MOUVEMENT OU INTELLIGENCES ?
Voilà donc le dernier mot de la Science Physique jusqu'à cette année 1888. Les lois mécaniques ne seront jamais capables d'établir l'homogénéité de la Matière Primordiale, sauf par voie de déduction et comme dernière ressource, lorsqu'elle ne découvrira plus aucune autre issue – comme dans le cas de l'éther. La Science Moderne n'est sûre d'elle- même que dans son propre domaine ; dans les limites physiques de notre Système Solaire, au-delà duquel tout, jusqu'à la moindre particule de Matière, diffère de la Matière qu'elle connaît, et où cette Matière existe dans des états dont elle ne saurait se faire une idée. Cette matière qui est véritablement homogène, est au-delà de la perception humaine, si celle-ci est simplement limitée aux cinq sens. Nous en éprouvons les effets par l'intermédiaire des INTELLIGENCES qui sont le résultat de sa différenciation primordiale, Intelligences que nous nommons Dhyân- Chohans et que l'on appelle les "Sept Gouverneurs" dans les ouvrages Hermétiques ; ceux dont Pymandre, la "Pensée Divine", parle comme des "Pouvoirs Constructeurs" et qu'Esculape appelle les "Dieux Supérieurs". Cette Matière – la véritable Substance Primordiale, le Noumène de toute la "matière" que nous connaissons – quelques-uns de nos Astronomes ont été amenés à y croire eux-mêmes, car ils n'espèrent plus qu'il soit jamais possible d'expliquer la rotation, la gravitation et l'origine d'une loi physique mécanique quelconque, à moins que la Science n'admette ces INTELLIGENCES. Dans l'ouvrage de Wolf sur l'Astronomie, ouvrage que j'ai cité plus haut 668, l'auteur accepte complètement la théorie de Kant, théorie qui, sinon dans son aspect général, du moins dans quelques-uns de ses traits, rappelle fortement certains Enseignements Esotériques. Nous y trouvons le système du monde renaissant de ses cendres par l'entremise d'une nébuleuse – l'émanation des corps morts et dissous dans l'Espace, résultant de l'Incandescence du Centre Solaire – ranimé par la matière combustibles des Planètes. Dans cette théorie, qui a pris naissance dans le cerveau d'un jeune homme, à peine âgé de vingt-cinq ans, qui n'avait jamais quitté sa ville natale de Königsberg, petite ville du nord de la Prusse, on peut difficilement s'empêcher de reconnaître l'intervention d'une puissance extérieure inspiratrice, ou une preuve de la réincarnation, comme c'est [II 376] l'avis des Occultistes. Elle comble un fossé que Newton, avec tout son génie, n'a pu franchir. Certainement c'est à notre Matière Primordiale, l'Akâsha, que Kant faisait allusion, lorsqu'il posait en principe l'existence d'une Substance primordiale universellement répandue, afin de résoudre la difficulté rencontrée par Newton et de vaincre son impuissance à expliquer, par les seules forces naturelles, l'impulsion primitive communiquée aux planètes. Ainsi qu'il le fait remarquer au chapitre VIII, si l'on se décide à admettre que la parfaite harmonie des Etoiles et des Planètes et la coïncidence de leurs plans orbitaux prouvent l'existence d'une Cause naturelle, qui serait par suite la Cause primordiale, "cette Cause ne saurait vraiment être la matière qui remplit aujourd'hui les espaces célestes". Ce doit être ce qui remplissait originairement l'Espace – ce qui était l'Espace – qui, par son mouvement dans la Matière différenciée, était l'origine des mouvements réels des corps sidéraux et qui, "en se condensant en ces mêmes corps, abandonna ainsi l'espace que l'on trouve vide aujourd'hui". En d'autres termes, c'est de cette même Matière que sont maintenant composés les planètes, les comètes, le Soleil lui- même, et, cette Matière s'étant originairement transformée en ces corps, a conservé ses facultés inhérentes de mouvement, facultés qui, aujourd'hui concentrées dans leurs noyaux, dirigent tout mouvement. Il suffit de changer bien peu de mots à cela et d'y ajouter peu de chose pour en faire notre Doctrine Esotérique.
668 Les Hypothèses Cosmogoniques.
Celle-ci enseigne que c'est cette Prima Materia primordiale et originelle, divine et intelligente, émanation directe du Mental Universel, la Daiviprakriti – la Lumière669 Divine qui émane du Logos – qui a formé les noyaux de tous les globes "qui se meuvent d'eux-mêmes" dans le Cosmos. C'est le principe de vie, animateur, puissance motrice, toujours présente, Ame vitale des Soleils, des Lunes et des Planètes et même de notre Terre : la première latente, la dernière active – l'invisible Gouverneur et Guide du corps grossier rattaché et relié à son Ame, qui est, après tout, l'émanation spirituelle de ces divers Esprits Planétaires.
669 "Lumière" que nous appelons Fohat.
Une autre Doctrine tout à fait Occulte, c'est la théorie de Kant, d'après laquelle la Matière dont sont formés les habitants et les animaux des autres Planètes est d'une nature plus légère et plus subtile et d'une conformation plus parfaite, suivant la distance qui les sépare du Soleil. Ce dernier est trop plein d'Electricité Vitale, trop saturé du principe physique qui donne la vie. C'est pourquoi les hommes de Mars sont plus éthérés que nous ne le sommes, tandis que ceux de [II 377] Vénus sont plus denses, tout en étant considérablement plus intelligents, bien que d'une spiritualité moindre.
Cette dernière théorie n'est pas tout à fait la nôtre – pourtant ces théories de Kant sont aussi métaphysiques et aussi transcendantes que n'importe quelles Doctrines Occultes et plus d'un Savant, s'il osait seulement dévoiler sa pensée, les accepterait comme l'a fait Wolf. Entre le Mental et l'Ame des Soleils et des Etoiles de Kant et le MAHAT (mental) et Prakriti des Pouranas, il n'y a qu'un pas. En somme, en admettant cela la Science ne ferait qu'admettre une cause naturelle, soit qu'elle élevât ou n'élevât pas ses croyances jusqu'à de pareilles hauteurs métaphysiques, mais Mahat, le Mental, est un "Dieu" et la Physiologie n'admet "le mental" que comme une fonction temporaire du cerveau matériel ; rien de plus.
Le Satan du Matérialisme se moque aujourd'hui de tout, indistinctement, et nie le visible aussi bien que l'invisible. Ne voyant dans la lumière, la chaleur, l'électricité et même dans le phénomène de la vie, que des propriétés inhérentes à la Matière, il rit toutes les fois que l'on donne à la vie le nom DE PRINCIPE VITAL et se moque de l'idée qu'elle est indépendante et distincte de l'organisme.
Pourtant les opinions scientifiques diffèrent sur ce point comme sur tous les autres, et il y a plusieurs Savants qui admettent des manières de voir qui ressemblent beaucoup aux nôtres. Voyez, par exemple, ce que le docteur Richardson (que nous avons longuement cité ailleurs) dit de ce "Principe Vital" qu'il appelle "Ether Nerveux" :
Je ne parle que d'un véritable agent matériel, affiné, c'est possible, pour le monde en général, mais réel et substantiel : d'un agent possédant des qualités de poids et de volume, d'un agent susceptible de se combiner chimiquement et, par suite, de modifier son état physique, d'un agent passif dans son action, c'est-à-dire qui est toujours mû par des influences qui lui sont étrangères 670, qui obéit à d'autres influences, d'un agent qui ne possède aucun pouvoir d'initiative, aucune vis ou energeia naturæ 671, mais qui joue cependant un rôle très important, sinon un rôle primordial, dans la production des phénomènes qui résultent de l'action de l'energeia sur la matière visible 672.
Comme la Biologie et la Physiologie nient maintenant, in toto, [II 378] l'existence d'un Principe Vital, cette citation, jointe à l'aveu fait par De Quatrefages, confirme clairement qu'il y a des Savants qui ont, au sujet des "choses Occultes", les mêmes idées que les Théosophes et les Occultistes. Ceux-ci reconnaissent l'existence d'un Principe Vital, distinct, indépendant de l'organisme – matériel, bien entendu, attendu que la Force physique ne peut être séparée de la Matière, mais constitué par une Substance qui existe dans un état inconnu à la Science. La Vie, pour eux, est quelque chose de plus que l'interaction des molécules et des atomes. Il existe un Principe Vital sans lequel aucune combinaison moléculaire n'aurait pu avoir pour résultat un organisme vivant, surtout dans la Matière, dite "inorganique", de notre plan de conscience.
Par "combinaisons moléculaires", nous entendons, cela va sans dire, celles de la Matière de nos perceptions actuelles illusoires, Matière qui ne communique l'énergie que sur ce plan où nous sommes et c'est là le point principal qui est en contestation 673.
670 C'est une erreur qui implique un agent matériel, distinct de l'influence qui le fait mouvoir, c'est- à-dire la matière aveugle et peut-être "Dieu" encore, tandis que cette Vie Unique est, "Elle-même", Dieu et les Dieux.
671 Même erreur.
672 Popular Science Review, Vol. X.
673 "Le Jiva est-il un mythe, comme le prétend la Science, ou non ?" demandent quelques Théosophes flottant entre la Science matérialiste et la Science idéaliste. La difficulté que l'on éprouve à bien comprendre les problèmes Esotériques qui concernent "l'état ultime de la Matière" vient encore de la différence entre l'objectif et le subjectif. Qu'est-ce que la Matière ? La Matière de notre conscience objective actuelle n'est-elle autre chose que nos sensations ? Il est vrai que les sensations que nous éprouvons viennent du dehors, mais pouvons-nous vraiment – sauf en ce qui concerne les phénomènes – parler de la "matière grossière" de ce plan comme d'une entité différente et indépendante de nous ? A tous ces arguments, l'Occultisme répond : C'est vrai, en réalité, la Matière n'est pas indépendante de nos perceptions et n'existe pas hors d'elles. L'homme est une illusion : nous en convenons, mais l'existence et la réalité d'autres entités, encore plus illusoires mais non moins réelles que nous ne le sommes, est une assertion qui n'est pas ébranlée mais plutôt fortifiée par cette doctrine Védantine ou même par l'idéalisme de Kant.
Les Occultistes ne sont donc pas seuls à avoir ces croyances et ils ne sont pas non plus si fous lorsqu'ils repoussent jusqu'à la "gravitation" de la Science moderne en même temps que bien d'autres lois physiques, et acceptent à sa place l'attraction et la répulsion. Ils ne voient, de plus, dans ces deux forces opposées que les deux aspects de l'Unité Universelle appelée le MENTAL EN MANIFESTATION, aspects dans lesquels l'Occultisme, grâce à ses grands Voyants, reconnaît l'existence d'une innombrable Légion d'Etres actifs : les Dhyân-Chohans cosmiques, Entités dont l'essence, dans sa double nature, est la Cause de tous les phénomènes terrestres. Car cette essence est consubstantielle à l'Océan Electrique universel qui est la VIE et, comme elle est double, ainsi que [II 379] nous l'avons dit – positive et négative – ce sont les émanations de cette dualité qui agissent maintenant sur la terre sous le nom de "modes de mouvements", car le mot Force est lui-même tenu en suspicion, de peur qu'il n'amène quelqu'un à le séparer, même en pensée, de la Matière ! Ce sont, comme disent les Occultistes, les effets doubles de cette double essence, auxquels on a donné tantôt les noms de forces centripète et centrifuge, tantôt ceux de pôles négatif et positif, ou de polarité, de chaleur et de froid, de lumière et de ténèbres, etc.
On maintient de plus que les Chrétiens de l'Eglise Grecque et de l'Eglise Catholique Romaine, en croyant comme ils le font – même si, dans leur aveuglement, ils les rattachent à un Dieu anthropomorphe – aux Anges, Archanges, Archons, Séraphins et aux Etoiles du Matin, à toutes ces deliciæ humani generis [délices de la race humaine] théologiques qui gouvernent les Eléments Cosmiques, sont plus sages que ne l'est la Science en refusant absolument d'y croire et en plaidant pour ses Forces mécaniques, car celles-ci agissent très souvent avec une intelligence et un à-propos plus qu'humains. Néanmoins cette intelligence est niée et attribuée à un aveugle hasard, mais, de même que de Maistre avait raison en disant que la loi de gravitation n'était qu'un mot servant à remplacer "la chose inconnue", nous avons aussi raison d'appliquer la même remarque à toutes les autres Forces de la Science. Si l'on nous objecte que le comte était un ardent Catholique, nous pourrons citer Le Couturier, Matérialiste non moins ardent, qui a dit la même chose, comme aussi Herschel et bien d'autres 674.
674 Voir le Musée des Sciences d'août 1856.
Des Dieux aux hommes, des Mondes aux atomes, d'une Etoile à une chandelle, du Soleil à la chaleur vitale de l'être organique le plus minuscule – le monde de la Forme et de l'Existence constitue une immense chaîne dont les anneaux sont tous reliés entre eux. La Loi d'Analogie est la clef maîtresse du problème du monde et les divers anneaux de cette chaîne doivent être étudiés, en les coordonnant, avec ordre dans leurs relations Occultes entre eux.
Aussi lorsque la DOCTRINE SECRETE – posant en principe que l'espace conditionné ou l'unité (lieu) n'a pas d'existence réelle si ce n'est dans le monde d'illusion ou, en d'autres termes, dans nos facultés de perception – enseigne que chacun des mondes supérieurs et inférieurs est entremêlé avec notre propre monde subjectif, que des millions de choses et d'êtres sont, au point de vue de la localisation, autour de nous et dans nous, comme nous sommes autour d'eux, avec et dans [II 380] eux, ce n'est point là une simple figure de métaphysique, mais l'expression d'un fait réel de la Nature, si incompréhensible que cela soit pour nos sens.
Il faut d'abord comprendre le langage de l'Occultisme avant de critiquer ce qu'il affirme. Par exemple, la Doctrine se refuse – comme le fait la Science dans un certain sens – à employer les mots "en haut" et "en bas", "plus élevé" et "plus bas", lorsqu'il s'agit de sphères invisibles, attendu que ces mots n'ont alors aucun sens. Les termes "Est" et "Ouest" sont eux-mêmes conventionnels et ne sont nécessaires que pour aider nos perceptions humaines. En effet, bien que la Terre ait ses deux points fixes dans les pôles, Nord et Sud, l'Est et l'Ouest n'en sont pas moins variables suivant la position que nous occupons sur la surface de la Terre et en raison de la rotation de l'Ouest à l'Est dont elle est animée. Aussi lorsqu'il est fait mention "d'autres mondes" – qu'ils soient meilleurs ou pires, plus spirituels ou encore plus matériels, mais dans tous les cas invisibles – l'Occultiste ne place ces sphères ni en dehors ni en dedans de notre Terre, comme le font les théologiens et les poètes, car elles ne sont situées nulle part dans l'espace que connaît ou que conçoit le profane. Elles sont en quelque sorte mélangées à notre monde – elles l'inter-pénètrent et sont interpénétrées par lui. Il y a des millions et des millions de mondes et de firmaments qui sont visibles pour nous ; il y en a un plus grand nombre encore au-delà de ceux que le télescope permet de voir et beaucoup de ces derniers n'appartiennent pas à notre sphère objective d'existence. Bien qu'aussi invisibles que s'ils étaient situés à des millions de milles au-delà de notre Système Solaire, ils sont avec nous, près de nous, dans notre propre monde et sont, pour leurs populations respectives, aussi objectifs et matériels que notre monde l'est pour nous. Pourtant le rapport qui existe entre ces mondes et le nôtre n'est pas du tout celui qui unit ces séries de boîtes ovales renfermées les unes dans les autres, comme les jouets appelés des nids chinois ; chacun de ces mondes est entièrement soumis à ses lois et à ses conditions spéciales, sans avoir de relations directes avec notre sphère. Les habitants de ces mondes, comme nous l'avons déjà dit, peuvent, sans que nous le sachions ou le sentions, passer à travers nous et autour de nous comme dans un espace vide, leurs habitations mêmes et leurs contrées étant mélangées aux nôtres, sans gêner notre vue, parce que nous n'avons pas encore les facultés nécessaires pour les discerner. Cependant, grâce à leur vision spirituelle, les Adeptes, et même certains voyants et sensitifs sont toujours à même de discerner, dans une mesure plus ou moins grande, la présence autour de nous et l'étroite proximité d'Etres appartenant à d'autres sphères de vie. Ceux [II 381] qui appartiennent aux mondes supérieurs au point de vue spirituel ne communiquent qu'avec les mortels terrestres qui s'élèvent, par leurs efforts individuels, jusqu'au plan supérieur qu'ils occupent.
Les fils de Bhoûmi [la Terre] considèrent les Fils des Déva-Lokas [sphères Angéliques] comme leurs Dieux, et les Fils des règnes inférieurs considèrent les hommes de Bhoûmi comme leurs Dévas [Dieux] ; les hommes n'en ont pas conscience dans leur aveuglement... Ils [les hommes] tremblent devant eux tout en s'en servant [pour des fins magiques]... Les Hommes de la Première Race furent les "Fils nés du Mental" des premiers. Ils [les Pitris et Dévas] sont nos progéniteurs 675.
675 Livre II des Commentaires du LIVRE DE DZYAN.
Ceux que l'on appelle les "gens instruits" tournent en ridicule l'idée des Sylphes, des Salamandres, des Ondines et des Gnômes ; les Savants considèrent comme une insulte la moindre allusion que l'on fait à de pareilles superstitions et avec ce mépris plein de logique et de bon sens qui constitue souvent la prérogative des "autorités reconnues", ils laissent ceux qu'il est de leur devoir d'instruire sous cette absurde impression que dans tous le Cosmos, ou du moins dans notre propre atmosphère, il n'existe aucun être conscient et intelligent en dehors de nous-mêmes 676. Aucune autre humanité (composée d'êtres clairement humains) ne serait appelée humaine à moins d'être composée d'êtres pourvus de deux jambes, deux bras et par là-dessus d'une tête laissant voir les traits d'un homme, bien que l'étymologie du mot semble n'avoir que peu de rapports avec l'aspect général de la créature. Ainsi, tandis que la Science écarte sévèrement jusqu'à la possibilité de l'existence de pareils êtres invisibles (pour nous, en général), la Société, bien qu'y croyant secrètement tout entière, est amenée à tourner ouvertement l'idée en ridicule. Elle salue avec une joie bruyante des ouvrages comme le Comte de Gabalis, sans comprendre que la franche satire est le plus sûr des masques.
De tels mondes invisibles n'en existent pas moins. Aussi peuplés que le nôtre, ils sont disséminés en nombre immense dans l'Espace apparent ; quelques-uns sont bien plus matériels que notre propre monde, d'autres deviennent de plus en plus éthérés jusqu'au moment où ils n'ont plus de forme et sont comme des "Souffles". Le fait que nos yeux physiques ne les voient pas ne constitue pas une raison pour ne [II 382] pas y croire. Les Physiciens ne peuvent pas voir leur Ether, leurs Atomes, leurs "modes de mouvement" ou Forces et, pourtant, ils les admettent et les enseignent.
Si nous trouvons, même dans le monde naturel qui nous est familier, de la Matière présentant une analogie partielle avec la difficile conception de pareils mondes invisibles, il semble être assez facile d'admettre la possibilité d'une telle présence. La queue d'une comète qui, tout en attirant notre attention par sa luminosité, ne trouble ni n'arrête notre vue, puisque nous voyons à travers cette queue les objets qui sont situés au-delà, constitue un commencement de preuve de l'existence de ces mondes invisibles. La queue d'une comète traverse rapidement notre horizon et nous ne sentons pas son passage, nous n'en avons pas conscience, sans l'éclat qu'elle projette, et qui n'est souvent perçu que par de rares personnes qu'intéresse le phénomène. Tandis que toutes les autres continuent à ignorer la présence de la comète et le passage de sa queue à travers ou sur une portion de notre globe. Il se peut que cette queue constitue ou ne constitue pas une partie intégrante de la comète, mais sa ténuité peut nous servir d'exemple. En vérité, ce n'est pas la superstition, mais le simple effet de la Science transcendante et de la logique encore plus, qui fait admettre l'existence de mondes formés d'une matière encore plus ténue que celle de la queue d'une comète. En niant cette possibilité, la Science n'a, au siècle dernier, fait ni le jeu de la Philosophie ni celui de la vraie Religion, mais simplement celui de la Théologie. Pour être à même de mieux contester la croyance à la pluralité des mondes matériels eux-mêmes, croyance que bien des hommes d'église jugent incompatible avec les enseignements et les doctrines de la Bible677, Maxwell dut calomnier la mémoire de Newton et chercher à convaincre son public que les principes que renferme la philosophie newtonienne sont ceux que "l'on retrouve à l'origine de tous les systèmes athéistiques 678".
"Le docteur Whewell contestait la pluralité des mondes en faisant appel aux preuves scientifiques", écrit le professeur Winchell 679, et si l'habitabilité des mondes physiques, des planètes et des étoiles éloignées qui brillent par myriades [II 383] au-dessus de nos têtes, est elle-même contestée à ce point, quel espoir y a-t-il de faire accepter l'existence des mondes invisibles au milieu de l'espace, en apparence transparent, qui entoure le nôtre !
676 Même la théorie de la pluralité des mondes habités par des créatures sensibles est repoussée, ou abordée avec de grandes précautions ! Voyez pourtant ce que dit Camille Flammarion, le grand astronome, dans sa Pluralité des Mondes habités.
677 On peut cependant prouver, par le témoignage de la Bibleelle-même et par celui d'aussi bons théologiens chrétiens que l'était le Cardinal Wiseman, que cette pluralité est enseignée tant dans l'Ancien que dans le Nouveau Testament.
678 Voyez Plurality of Worlds, Vol. II.
679 Consultez à ce sujet la Pluralité des Mondes habités de C. Flammarion, où l'on trouve une liste des nombreux savants qui ont écrit pour prouver le bien-fondé de la théorie.
Pourtant, si nous sommes capables de concevoir l'existence d'un monde formé de matière encore plus atténuée (pour nos sens), que la queue d'une comète et, par suite, d'imaginer des habitants qui seraient aussi éthérés, par rapport à leur globe, que nous le sommes par rapport à notre Terre à la croûte rocheuse, il n'y a rien d'étonnant à ce que nous ne les voyions pas et que nous n'ayons conscience ni de leur présence ni de leur existence. En quoi donc cette idée est-elle contraire à la Science ? Ne pourrait-on pas supposer que les hommes et les animaux, les plantes et les rochers y sont doués de sens tout à fait différents de ceux que nous possédons ? Leurs organismes ne pourraient-ils naître, se développer et exister sous l'empire d'autres lois d'être que celles qui régissent notre petit monde ? Est-il absolument nécessaire que tous les êtres corporels soient vêtus de "vêtements de peau" comme ceux dont Adam et Eve furent pourvus suivant la légende de la Genèse? La corporalité, nous disent cependant bien des Savants, "peut exister dans des conditions très différentes".
[Le prof. A. Winchell – traitant de la pluralité des mondes – fait les remarques suivantes :
Il n'est pas du tout improbable que des substances d'une nature réfractaire puissent être mélangées avec d'autres substances, à nous connues ou inconnues, de façon à être capables de résister à des variations de froid ou de chaud infiniment plus grandes que celles que peuvent supporter les organismes terrestres. Les tissus des animaux terrestres ne sont appropriés qu'aux conditions terrestres. Nous trouvons pourtant, même parmi eux, différents types et différentes espèces d'animaux adaptés à l'épreuve de conditions d'existence absolument dissemblables... Le fait qu'un animal soit un quadrupède ou un bipède ne dépend pas des nécessités de l'organisme, de l'instinct ou de l'intelligence. Le fait qu'un animal possède exactement cinq sens n'est pas une nécessité de l'existence perceptive. Il peut exister sur la terre des animaux dépourvus d'odorat et de goût. Il peut exister sur d'autres mondes, et même sur celui-ci, des êtres possédant un plus grand nombre de sens que nous n'en avons. Cette possibilité devient apparente lorsque nous considérons combien il est probable que d'autres propriétés et d'autres modes d'existence fassent partie des ressources du Cosmos et même de la matière terrestre. Il y a des animaux qui vivent là OÙ l'homme doué de raison périrait – dans le sol, dans le fleuve et dans la mer... [et pourquoi pas, dans ce cas, des êtres humains ayant un organisme différent ?],... L'existence raisonnable [II 384] dans un corps, ne dépend pas du sang chaud ou d'une température quelconque, qui ne modifie pas les formes de matière qui composent l'organisme. Il peut exister des intelligences incorporées suivant une conception qui n'implique pas les processus d'ingestion, d'assimilation et de reproduction. De pareils corps n'auraient besoin, ni de nourriture journalière, ni de chaleur. Ils pourraient être perdus au fond des abîmes de l'océan, ou placés sur une falaise exposée aux tempêtes d'un hiver arctique, ou encore plongés durant cent ans dans un volcan, sans cependant perdre la conscience et la pensée. C'est concevable. Pourquoi des natures psychiques ne seraient-elles pas enchâssées dans du silex et du platine indestructibles ? Ces substances ne sont pas plus éloignées de la nature de l'intelligence que le carbone, l'hydrogène, l'oxygène et la chaux, mais sans laisser errer nos pensées à de tels extrêmes [ ?], une haute intelligence ne pourrait-elle être incorporée dans des enveloppes aussi indifférentes aux conditions extérieures que le sont la sauge des plaines occidentales ou le lichen du Labrador, les rotifères qui résistent à des années de sécheresse ou les bactéries qui sortent vivantes de l'eau bouillante... Ces suggestions ne sont risquées que pour rappeler au lecteur combien on est peu en mesure de déduire les conditions qui sont nécessaires à l'existence organique intelligente du type courant d'existence corporelle que nous trouvons sur terre. L'intelligence est, par sa nature, aussi universelle et aussi uniforme que les lois de l'univers. Les corps ne sont que l'adaptation locale de l'intelligence à des modifications spéciales de la matière ou de la force universelle 680.]
680 World-Life, pp. 496-498 et suiv.
Ne savons-nous pas, grâce aux découvertes de cette même Science qui nie tout, que nous sommes entourés par des myriades de vies invisibles ? Si ces microbes, ces bactéries et les tutti quanti des infiniment petits, sont invisibles à nos yeux en raison de leurs dimensions minuscules, ne pourrait-il exister, au pôle opposé, des êtres tout aussi invisibles en raison de la qualité de matière dont ils sont formés, en raison de la ténuité de cette matière ? Aussi bien, dans les effets de la matière cométaire, n'avons-nous pas un autre exemple d'une forme semi-invisible de Vie et de Matière ? Le rayon de soleil qui pénètre dans notre appartement nous révèle, sur son parcours, l'existence de myriades d'êtres minuscules dont la petite vie s'écoule et prend fin, indépendante et sans préoccupation de savoir s'ils sont ou ne sont pas perçus par nos sens plus grossiers. Il en est de même des microbes et des bactéries et des êtres invisibles du même genre qui peuplent les autres éléments. Nous avons passé à côté d'eux durant ces longs siècles de triste ignorance, siècles qui se sont écoulés après que le flambeau du savoir, si brillant dans [II 385] les systèmes hautement philosophiques des païens, eut cessé de jeter sa vive lueur sur les longs âges d'intolérance et de bigotisme des débuts du Christianisme ; et nous voudrions bien passer encore à côté d'eux.
Et pourtant ces vies nous entouraient alors comme elles le font maintenant. Elles ont travaillé en obéissant aux lois qui leur sont propres, et ce n'est que lorsque la Science nous les a révélées, peu à peu, que nous avons commencé à nous rendre compte de leur existence et des effets qu'elles produisent.
Combien de temps a-t-il fallu au monde pour devenir ce qu'il est maintenant ? Si l'on peut dire que, même jusqu'à présent, de la poussière cosmique "n'ayant jamais appartenu à la terre auparavant 681" arrive jusqu'à notre globe, combien plus logique n'est-il pas de croire – comme le font les Occultistes – que, durant les innombrables millions d'années qui se sont écoulées depuis que cette poussière s'est agrégée pour former le Globe, sur lequel nous vivons, autour de son noyau de Substance Primordiale intelligente, bien des humanités – différant de la nôtre autant que différera d'elle l'humanité qui évoluera dans des millions d'années – n'ont peuplé la surface de la Terre que pour disparaître ensuite, comme disparaîtra la nôtre. On nie l'existence de ces humanités primitives si reculées parce que, d'après ce que croient les Géologues, elles n'ont laissé après elles aucune relique tangible. Toute trace de leur passage a disparu et, par conséquent, elles n'ont jamais existé. Pourtant leurs reliques – fort rares, il est vrai – peuvent être retrouvées et doivent être découvertes par des recherches géologiques. Cependant, même si l'on ne devait jamais en rencontrer, ce ne serait pas une raison pour affirmer qu'aucun homme n'a jamais pu vivre durant les périodes géologiques que l'on assigne à ces races. En effet, leur organisme ne réclamait ni sang chaud, ni atmosphère, ni nourriture ; l'auteur de World-Life a raison ; il n'est nullement extravagant de croire, comme nous le faisons, que si, d'après les hypothèses scientifiques, il peut exister jusqu'à présent "des natures psychiques enchâssées dans du silex et du platine indestructibles", il a pu, de même, exister des natures psychiques enchâssées dans des formes de matière primordiale tout aussi indestructible – les vrais ancêtres de notre Cinquième Race.
681 World-Life.
Aussi, lorsque nous parlons, comme dans notre troisième volume, d'hommes qui habitaient ce Globe il y a 18.000.000 d'années, nous ne songeons ni aux hommes de notre race actuelle ni aux lois atmosphériques et aux conditions thermiques [II 386] de notre époque. La Terre et l'Humanité, tout comme le Soleil, la Lune et les Planètes, traversent, durant leurs périodes de vie, des phases de croissance, de changement, de développement et d'évolution graduelle ; ces globes naissent, deviennent des enfants, des adolescents, des adultes, des vieillards et finalement meurent. Pourquoi l'Humanité ne serait-elle pas soumise à cette loi universelle ? Uriel disait à Enoch :
Regarde, je t'ai montré toutes choses, ô Enoch... Tu vois le Soleil, la Lune et ceux qui dirigent les étoiles du ciel et qui provoquent toutes leurs opérations, leurs saisons et leurs retours. A l'époque des pécheurs, les années seront raccourcies... tout ce qui se fera sur la terre sera bouleversé... la Lune changera ses lois 682.
Les mots "époques des pécheurs" voulaient dire l'époque où la matière serait à son apogée sur Terre et où l'homme aurait atteint son maximum de développement physique, tant en stature qu'en animalité. Cela se produisit à l'époque des Atlantes, vers le milieu de leur Race, la Quatrième, qui fut noyée comme l'avait prédit Uriel. Depuis lors, la taille humaine a été en décroissant, ainsi que sa force et ses années, comme nous le démontrerons dans le volume suivant. Pourtant, comme nous avons atteint le milieu de notre sous-race de la Cinquième Race-Racine – comble de matérialité pour chacune – les propensions animales, bien que plus raffinées, n'en sont pas moins développées, et cela se remarque surtout dans les pays civilisés.
682 Le Livre d'Enoch. Traduction de l'Archevêque Laurence, chap. LXXIX.
[II 387]