L'ECOLE CONFUCIANISTE

 Parallèlement au Taoïsme, et lui faisant beaucoup d'emprunts, un autre courant culturel initié par Confucius, influença la pratique du Qi Gong.

Erigée en lois et principes de morale, la doctrine philosophique de Confucius, distincte de toute religion ou métaphysique, influença les rapports et les règles de la société chinoise à partir des Royaumes

 Combattants, et reste vivante encore dans les moeurs chinoises à travers leur héritage culturel.

Confucius (551-479 av. J.-C.) avait assisté à la période décadente qui précédait les Royaumes Combattants dans la fin des Han, alors que l'empire féodal de l'époque s'effondrait. De là naquirent son désir de réformes et son oeuvre. Son travail et ses idées furent recueillis par Mencius (374-289 av. J .-C.).

L'opinion de Confucius sur le Qi Gong et les exercices physiques n'est pas très éloignée de celle de Juvénal à qui l'on doit en Occident la formule « Mens sana in corpore sano ».

Le sage approuvait la pratique des exercices physiques car ceux-ci pouvaient à la fois augmenter la vigueur, former le caractère, fortifier les bons penchants, éliminer les mauvaises tendances de l'individu et lui donner la notion de loyauté.

Le confucianisme enseigne que le corps donné par les parents doit retourner « net et entier » dans le domaine respecté de la mort. Le Qi Gong de cette doctrine insiste sur la maîtrise de la pensée, la sincérité, la force morale.

Malgré cette présentation dogmatiquement moraliste, le but visé dans la pratique n'est pas si éloigné de celui des Taoïstes de faire naître l'équilibre, au-dessus des passions: « Pendant qu'il n'y a pas de perturbations de la volonté, de colère, de tristesse ou de joie, on dit que l'esprit est en état d'équilibre. Cet équilibre est la racine à partir de laquelle vont naître tous les actes des êtres humains dans le monde » .

Tszé-Tszé, un disciple de Confucius, introduit deux concepts fonda- mentaux dans le confucianisme, et importants pour la pratique du Qi Gong: le Chung et le Yung.

Chung est la vertu de l'équilibre, ou « d'être sans inclinaisons à droite ou à gauche ». Cela doit se comprendre comme la modération en toute chose. Rien n'est interdit: boissons, épices, vêtements confortables, etc. mais rien n'est exagéré ni dans l'ascèse ni dans le luxe ou la luxure. Cette vertu est à rapprocher de l'attitude juste préconisée dans le Bouddhisme Mahayana, comme « voie du Milieu », d'aucun excès, et n'est pas éloignée non plus du « non agir » du Taoïsme.

Yung est la persistance ou « la continuation sans changement ». (( On ne doit pas quitter le bon chemin un seul instant; si l'on peut s'en écarter, ce n'est pas alors le bon chemin ».

Yung évoque donc la Paramitade « discipline » du Bouddhisme, alors que le désir de tracer d'avance une attitude correcte n'a pas été le souci majeur du Taoïsme dont l'enseignement laisse à la nature de l'homme le soin de définir ses actes, recherchant plus une morale du geste authentique et spontané que celle d'une loi rigide préétablie. Dans le domaine du Qi Gong, Yung est la vertu qui nous fait supposer que rien n'est obtenu sans une discipline régulière, adoptée dans une habitude de vie, un style nouveau dans lequel le Qi Gong fait partie de notre vie. Alors il n'y a plus d'efforts véritables et les résultats s'accomplissent.

Ce que les Taoïstes ont laissé en flou, les Confucianistes l'ont réglé pour aider les gens de niveau moyen à se conformer et à progresser. Ainsi la civilisation chinoise a bénéficié d'une influence culturelle ambiguë, entre la loi tracée d'avance comme discipline à suivre sans discuter, et la loi tirée de l'inspiration, de la spontanéité du moment, éveillé à ce qui est.

Dans la pratique d'une conduite juste, à côté de l'esprit, une place de choix est réservée au Qi, à l'énergie. Mencius, disciple de Confucius, dans la première partie du livre Il exprime :

« l’esprit c' est le commandant du Qi, et le Qi c' est ce dont le corps est rempli. L’esprit détient l'autorité suprême, et le Qi vient tout de suite après. Aussi faut-il toujours tenir son esprit et s'abstenir de dépenser son Qi improprement. ».