SECTION IX
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LA LUNE ; DEUS LUNUS, PHŒBE
Ce symbole archaïque est le plus poétique de tous les symboles et en même temps le plus philosophique. Les anciens Grecs lui ont donné une place importante et les poètes modernes l'ont usé jusqu'à la corde. La Reine de la Nuit, parcourant les Cieux dans toute la majesté de sa lumière sans pareille, plongeant tout, même Hespérus, dans l'obscurité et étendant son manteau d'argent sur le monde sidéral tout entier, a toujours été le thème favori de tous les poètes de la Chrétienté, depuis Milton et Shakespeare jusqu'au plus moderne des versificateurs. Mais la brillante lampe de la nuit, avec son cortège d'étoiles innombrables, ne parlait qu'à l'imagination des profanes. Il y a peu de temps encore, la Religion et la Science ne s'occupaient pas de ce beau mythe. Cependant, la Lune froide et chaste, celle qui, d'après Shelley :
... rend beau tout ce qu'effleure son sourire,
Ce sanctuaire errant d'une flamme douce, mais glaciale Qui se transforme toujours et cependant reste la même, Qui ne chauffe pas, mais illumine... 204.
204 Dans Epipsychidion.
possède avec la Terre des rapports plus étroits que n'en a aucun autre globe sidéral. Le Soleil donne la Vie au Système Planétaire tout entier ; la Lune la donne à notre Globe et c'est ce que comprenaient et savaient les races primitives dès leur enfance. Elle est la Reine et elle est le Roi. Elle était le Roi Soma avant d'être transformée en Phœbé et en la chaste Diane. Elle est par-dessus tout la Divinité des Chrétiens, par le fait des Juif, Mosaïques et Cabalistes, bien que le monde civilisé ait pu l'ignorer pendant très longtemps ; en fait, depuis que le dernier initié Père de l'Eglise mourut en emportant avec lui dans la tombe les secrets des temples païens. Pour des "Pères" tels qu'Origène ou Clément d'Alexandrie, la Lune était le symbole vivant de Jéhovah ; le dispensateur de la Vie et de la Mort, qui dispose de l'Etre – dans notre Monde. Car si Artémise était Luna dans le ciel et, pour les Grecs, sur la Terre, Diane qui présidait à l'enfantement et à la vie, pour [II 106] les Egyptiens elle était, dans l'Enfer, Hékat (Hécate) la Déesse de la Mort, qui régnait sur la magie et les enchantements. Bien plus, en tant que personnification de la Lune, dont les phénomènes sont triadiques, Diana-Hécate-Luna est les trois en un. Car elle est Diva triformis, tergemina, triceps [La déesse aux trois formes, triple, aux trois têtes], trois têtes sur un seul cou 205, comme Brahmâ-Vishnou-Shiva. C'est pourquoi elle est le prototype de notre Trinité, qui n'a pas toujours été entièrement masculine. Le nombre sept, si proéminent dans la Bible, si sacré durant le septième jour, celui du Sabbat, vint de l'antiquité aux Juifs et tire son origine du quadruple nombre 7 contenu dans les 28 jours du mois lunaire, dont chaque partie septénaire est caractérisée par un quartier de la Lune.
205 La déesse Τρι̉µορφος [aux trois formes] dans la statuaire d'Alcaménès.
Il vaut la peine, dans cet ouvrage, de présenter une vue à vol d'oiseau sur l'origine et le développement du mythe et du culte lunaires dans l'antiquité historique, de notre côté du globe. Son origine première ne peut être retrouvée par la Science exacte qui rejette toute tradition, tandis que pour la Théologie, qui, sous l'habile direction des Papes, a mis l'interdit sur tout fragment de littérature qui ne portait pas l'imprimatur de l'Eglise de Rome, l'histoire archaïque de ce mythe est un livre scellé. Que la philosophie religieuse Egyptienne, ou bien celle des Aryens Hindous soit la plus ancienne – la DOCTRINE SECRETE affirme que c'est cette dernière – cela importe peu dans l'espèce, car les "cultes" Lunaire et Solaire sont les plus anciens du monde. Tous deux ont survécu et existent encore de nos jours dans le monde entier ; chez les uns ouvertement, chez d'autres – comme, par exemple, dans la symbologie Chrétienne – secrètement. Le chat, symbole lunaire, était consacré à Isis qui, dans un certain sens, était la Lune, de même qu'Osiris était le Soleil et on le voit souvent sur le sommet du Sistrum dans la main de la Déesse. Cet animal était tenu en grande vénération dans la ville de Bubaste qui portait un deuil sévère lors de la mort des chats sacrés, parce qu'Isis, en tant que Lune, était particulièrement adorée dans cette ville des mystères. Le symbolisme astronomique qui y était attaché a déjà été indiqué dans la Section I et personne ne l'a mieux décrit que M. Gerald Massey dans ses Lectures et dans The Natural Genesis. On dit que l'œil du chat semble suivre les phases lunaires dans leur croissance et leur déclin et ses globes brillent comme deux étoiles dans l'obscurité de la nuit. C'est de là que vient l'allégorie mythologique qui montre Diane se cachant dans [II 107] la Lune, sous la forme d'un chat, lorsqu'elle cherchait, avec d'autres divinités, à échapper à la poursuite de Typhon, ainsi qu'il est raconté dans les Métamorphoses d'Ovide. La Lune, en Egypte, était en même temps "l'œil d'Horus" et "l'œil d'Osiris", le Soleil.
Il en était de même du Cynocéphale. Le singe à tête de chien était un glyphe servant à symboliser tour à tour le Soleil et la Lune, bien qu'en réalité, le Cynocéphale fût plutôt un symbole Hermétique qu'un symbole religieux. C'est, en effet, l'hiéroglyphe de la planète Mercure et du Mercure des philosophes Alchimistes, qui disent que :
Mercure doit toujours être près d'Isis, comme son ministre, car sans Mercure, ni Isis ni Osiris ne peuvent accomplir quoi que ce soit dans le GRAND ŒUVRE.
Lorsque le Cynocéphale est représenté avec le Caducée, le Croissant ou le Lotus, c'est un glyphe du Mercure "philosophique", mais lorsqu'on le voit avec un roseau ou un rouleau de parchemin, il représente Hermès, le secrétaire et le conseiller d'Isis, fonctions qu'Hanumân remplissait auprès de Bâma.
Quoique les Adorateurs Réguliers du Soleil, les Parsis, soient peu nombreux, il n'en est pas moins vrai, non seulement que la plus grande partie de la mythologie Hindoue et de son histoire est basée sur ces deux cultes auxquels elle est mêlée, mais qu'il en est encore ainsi de la religion Chrétienne elle-même. Depuis leur origine jusqu'à nos jours, cette mythologie a coloré les théologies de l'Eglise Catholique Romaine et des Eglises Protestantes. En réalité, la différence entre la foi Aryenne Hindoue et celle des Aryens Européens est très Petite, si l'on ne considère que leurs idées fondamentales. Les Hindous s'enorgueillissent de s'intituler des Soûryavamshas et des Chandravamshas issus des dynasties Solaire et Lunaire. Les Chrétiens prétendent considérer cela comme de l'idolâtrie et cependant leur propre religion est entièrement basée sur le culte Solaire et Lunaire. C'est en vain que les Protestants se répandent en clameurs contre les Catholiques Romains à-propos de leur "Mariolâtrie" basée sur le culte antique des déesses lunaires, puisque eux-mêmes adorent Jéhovah qui est par excellence un Dieu lunaire et puisque les deux Eglises acceptent dans leurs théologies le Christ-Soleil et la Trinité Lunaire.
On sait fort peu de choses du Culte Chaldéen de la Lune et du Dieu Babylonien Sin, que les Grecs appelaient "Deus Lunus" et ce peu de choses est de nature à égarer souvent l'étudiant profane qui ne saisit pas la signification ésotérique [II 108] des symboles. D'après la croyance populaire des anciens écrivains et philosophes profanes – car les initiés étaient, par serment, voués au silence – les Chaldéens étaient les adorateurs de la lune sous ses divers noms, masculins et féminins, tout comme les Juifs qui vinrent après eux.
Dans le manuscrit inédit sur la Façon de Parler, dont nous avons déjà parlé et qui donne une clef de la formation de l'antique langue symbolique, on présente une raison d'être logique pour expliquer ce double culte. Cet ouvrage est écrit par un Mystique érudit merveilleusement bien informé qui donne cette raison d'être sous la forme facile à saisir d'une hypothèse. Celle-ci, toutefois, devient forcément un fait établi de l'histoire de l'évolution religieuse, pour quiconque a jamais entrevu le secret de la symbologie ancienne. Voici ce qu'il dit :
L'une des premières occupations des hommes, parmi celles qui sont réellement nécessaires, serait la notion des périodes de temps 206 marquées sur la voûte des cieux qui s'élève au-dessus de la surface unie de l'horizon ou du niveau des eaux tranquilles. Ces périodes seraient déterminées par le jour et la nuit, les phases de la Lune, ses révolutions stellaires et synodiques et par la durée de l'année solaire avec le retour des saisons, en appliquant à ces périodes la mesure naturelle du jour et de la nuit, ou du jour divisé en lumière et en obscurité. On découvrirait aussi qu'il y avait, dans la même période d'une année solaire, un jour solaire plus long et un autre plus court que tous les autres, ainsi que deux journées solaires durant lesquelles le jour et la nuit avaient la même durée et que l'époque de l'année qui correspondait à ces journées pouvait être marquée avec la plus grande précision dans les groupes d'étoiles des cieux ou dans les constellations, sous réserve de leur mouvement rétrograde qui, avec le temps, exigerait une correction par intercalation, comme c'était le cas pour le récit du Déluge, où une correction de 150 jours fut faite pour une période de 600 années, durant laquelle la confusion des signes indicateurs du temps avait augmenté... [Cela] devait naturellement s'appliquer à toutes les races, dans toutes les époques, et l'on doit considérer cette connaissance comme inhérente à la race humaine, avant ce que nous appelons la période historique, aussi bien que pendant cette période 207. [II 109]
206 La Mythologie antique comprend l'Astronomie aussi bien que l'Astrologie. Les planètes étaient les aiguilles marquant, sur le cadran de notre système Solaire, les heures de certains événements périodiques. Ainsi Mercure était le messager qui devait tenir compte du temps pendant les phénomènes journaliers, solaires et lunaires, et se trouvait d'autre part en rapport avec le Dieu et la Déesse de la Lumière.
207 pp. 7-8.
Sur cette base l'auteur cherche une fonction naturelle physique possédée en commun par la race humaine et liée aux manifestations périodiques, telle que "le lien entre les deux sortes de phénomènes... devint fixé dans l'usage commun ou populaire". C'est ce qu'il trouve dans :
- [Le phénomène physiologique féminin] qui se produit à chaque mois lunaire de 28 jours, ou 4 semaines de 7 jours chacune, de sorte que 13 répétitions de la période se produisent en 364 jours, qui constituent l'année solaire divisée en 52 semaines de 7 jours chacune.
- Le mouvement du fœtus qui est marqué par une période de 126 jours ou 18 semaines de 7 jours chacune.
- La période que l'on appelle "la période de viabilité" est une période de 210 jours, ou de 30 semaines de 7 jours chacune.
- La période de l'enfantement est accomplie en 280 jours, ou période de 40 semaines de 7 jours chacune, soit de 10 mois lunaires de 28 jours ou de 9 mois du calendrier de 31 jours chacun, le tout en comptant sur l'arc royal des cieux pour la mesure de la période traversée, du fond des ténèbres de la matrice jusqu'à la lumière et la gloire de l'existence consciente, ce mystère et ce miracle insondables et sans cesse renouvelés... Ainsi, les périodes observées et qui marquent l'élaboration de la fonction de la génération, seraient naturellement devenues une base de calculs astronomiques... Nous pouvons affirmer... que tel était le mode de calcul employé chez toutes les nations, soit de leur propre mouvement, soit indirectement et par l'intermédiaire de l'enseignement. C'était le mode employé par les Hébreux, car maintenant encore ils basent leur calendrier sur les 354 et les 355 jours de l'année lunaire et nous possédons des données spéciales qui nous permettent de dire que le même mode était usité chez les anciens Egyptiens ; en voici la preuve :
L'idée fondamentale de la philosophie religieuse des Hébreux était que Dieu contenait toutes choses en lui- même 208 et que l'homme, ainsi que la femme, étaient faits à son image... La place de l'homme et de la femme chez les Hébreux, était occupée, chez les Egyptiens, par le taureau et la vache, consacrés à Osiris et à Isis 209, qui étaient représentés respectivement par un homme à tête de taureau et par une femme à tête de vache et on rendait un culte à ces symboles. Il était notoire qu'Osiris représentait le Soleil et le fleuve Nil, l'année tropicale de 365 jours, nombre qui correspond à la valeur du mot Neilos, et le taureau, comme il était aussi le principe du feu et de la force vivifiante ; tandis qu'Isis était la lune, le lit du fleuve Nil, ou notre mère la terre, pour les énergies gestatrices de laquelle l'eau était une nécessité, l'année lunaire de [II 110] 354-364 jours, la régulatrice des périodes de la gestation et la vache marquée par la nouvelle lune croissante...
208 Notion travestie et rapetissée de l'idée Védantine de Parabrahman contenant en soi l'Univers tout entier, parce qu'il est lui-même sans borne et que rien n'existe en dehors de lui-même.
209 Exactement comme ils le sont encore de nos jours dans l'Inde ; le taureau de Shiva et la vache représentent plusieurs Shaktis ou déesses.
Mais le fait que les Egyptiens réservaient à la vache le rôle que la femme jouait chez les Hébreux, n'impliquait pas une différence radicale, mais plutôt une identité voulue dans l'enseignement et simplement la substitution d'un symbole de signification commune, à savoir que la période de gestation chez la vache et la femme était considérée comme étant la même, c'est-à-dire de 280 jours ou 10 mois lunaires de quatre semaines chacun. C'est dans la durée de cette période que résidait la valeur essentielle de ce symbole animal dont l'emblème était la lune croissante 210... On peut remarquer que ces périodes naturelles de gestation ont servi de base au symbolisme dans le monde entier... les Hindous s'en servaient ainsi et on reconnaît que les anciens Américains les mettaient clairement en avant, sur les tablettes de Richardson et de Gest, dans la Croix de Palenque et ailleurs et elles servaient manifestement de base à la formation des calendriers des Mayas de Yucatán, des Hindous, des Assyriens et des Babyloniens anciens, aussi bien qu'à ceux des Egyptiens et des anciens Hébreux. Les symboles naturels... seraient, soit le phallus, soit le phallus et le yoni.... mâle et femelle. En effet, les mots traduits par les termes généraux de mâle et femelle dans le 27ème verset du premier chapitre de la Genèsesont... sacr et n'cabvah ou, littéralement, phallus et yoni 211. Tandis que la représentation des emblèmes phalliques devait à peine indiquer les organes génitaux du corps
humain, lorsque l'on considère leurs fonctions et le développement des vésicules séminales, il en découlerait plutôt l'indication d'un moyen de mesurer les périodes lunaires et, par celles-ci, les périodes solaires 212.
210 C'est de là que vient le culte que les Hébreux vouent à la Lune.
211 "Il les créa mâle et femelle".
212 Manuscrit, pp. 11-15.
C'est là la clef physiologique ou anthropologique du symbole Lunaire. La clef qui ouvre le mystère de la Théogonie ou de l'évolution des Dieux manvantariques, est plus compliquée et ne comporte rien de phallique. Là tout est mystique et divin. Mais les Juifs, outre qu'ils établissaient une relation directe entre Jéhovah et la Lune, en qualité de Dieu générateur, préféraient ignorer les hiérarchies supérieures et ont fait leurs Patriarches de quelques-unes de ces constellations zodiacales et de ces dieux, planétaires, exotérisant ainsi l'idée purement Théosophique et la rabaissant au niveau de l'humanité pécheresse. Le manuscrit dont on a extrait ce que nous venons de dire explique très clairement à quelle hiérarchie de Dieux appartenait Jéhovah et ce qu'était ce Dieu juif ; car il démontre dans un langage précis ce sur quoi l'auteur a [II 111] toujours insisté, à savoir que le Dieu dont les chrétiens ont accepté le fardeau n'était autre que le symbole lunaire de la faculté reproductive ou génératrice de la Nature. Ils ont même toujours ignoré le Dieu Hébreu secret des Cabalistes, Ain Soph, conception que les premières idées Cabalistiques et mystiques faisaient aussi grande que Parabrahman. Mais ce n'est pas la Kabalah de Rosenroth qui peut jamais donner les vrais enseignements originaux de Siméon ben Yochaï qui étaient aussi métaphysiques et philosophiques que n'importe lesquels. Et combien y en a-t-il parmi les étudiants de la Kabalah qui en sachent quelque chose, si ce n'est par leurs traductions latines incorrectes ? Examinons un instant l'idée qui a conduit les anciens Juifs à adopter un substitut pour le TOUJOURS-INCONNAISSABLE et qui a induit en erreur les Chrétiens, au point de leur faire prendre le substitut pour la réalité.
Si l'idée de... périodes de temps peut être attachée à ces organes [le phallus et le yoni] comme symboles des pouvoirs créateurs cosmiques, alors, en vérité, dans la construction des Temples comme Demeures de la Divinité ou de Jéhovah, la partie désignée comme le Saint des Saints ou l'Endroit le Plus Sacré emprunterait son titre à la sainteté reconnue des organes générateurs considérés aussi bien comme symboles de mesures que comme cause créatrice.
Chez les anciens sages, il n'y avait ni nom, ni idée, ni symbole d'une Cause Première 213. Chez les Hébreux, la conception indirecte en était exprimée en un terme de compréhension négative, c'est-à-dire Ain-Soph ou Sans Bornes. Mais le symbole de sa première manifestation compréhensible était la conception d'un cercle avec son diamètre pour donner une idée à la fois géométrique, phallique et astronomique... car l'unité prend naissance du zéro ou du cercle, sans lequel elle ne pourrait exister et du 1 ou de l'un primordial sortent les neuf chiffres et, géométriquement, toutes les formes planes. Ainsi, dans la Cabale, ce cercle avec son diamètre représente les 10 Séphiroth ou Emanations composant l'Adam Kadmon ou Homme Archétype, origine créatrice de toutes choses... Cette idée d'établir un rapport entre la représentation du cercle et de son diamètre, c'est-à-dire entre le nombre 10 ou la signification des organes génitaux et l'Endroit le Plus Sacré était appliquée à la construction de la Chambre du Roi ou du Saint des Saints de la Grande Pyramide, du Tabernacle de Moïse et du Saint des Saints du Temple de Salomon... C'est la représentation d'une [II 112] double matrice, car en Hébreu la lettre Hé (ה) est en même temps le nombre 5 et le symbole de la matrice et deux fois 5 font 10, c'est-à-dire le nombre phallique 214.
213 Parce qu'elle était trop sacrée. Dans les Védas on en parle comme de Cela. C'est la "Cause Eternelle" et on ne peut, dès lors, en parler comme de la "Cause Première", terme qui implique l'absence de Cause à un moment donné.
214 Manuscrit, pp. 18-20.
215 Ibid., pp. 21-22.
Cette "double matrice" montre aussi la dualité de l'idée transportée du plan supérieur ou spirituel au plan inférieur ou terrestre et limitée à ce dernier par les Juifs. Chez eux, par conséquent, le nombre sept a pris la place la plus importante dans la religion exotérique qui est le culte des formes extérieures et des cérémonies vides, comme par exemple, leur Sabbat, le septième jour consacré à leur Divinité la Lune, symbole du Jéhovah générateur. Mais chez d'autres peuples, le nombre sept représentait l'évolution théogonique, les cycles, les plans cosmiques et les Sept Forces ou Pouvoirs Occultes du Cosmos considéré comme un Tout Sans Bornes, dont le premier Triangle supérieur était inaccessible à l'intellect limité de l'homme. Tandis que d'autres nations, dans leur limitation forcée du Cosmos dans l'Espace et le Temps, ne s'occupaient donc que de son plan septénaire manifesté, les Juifs ne plaçaient ce nombre que dans la Lune et basaient dessus tous leurs calculs sacrés. C'est pourquoi nous voyons l'auteur réfléchi du manuscrit que nous venons de citer faire remarquer, à propos de la métrologie des Juifs, que :
Si l'on multiplie 20.612 par 4/3, le produit donnera une base pour arriver à déterminer la révolution moyenne de la lune et si l'on multiplie encore ce produit par 4/3, le nouveau produit donnera une base pour fixer la période exacte de l'année solaire moyenne... cette forme... devenant d'une grande utilité pour trouver les périodes astronomiques de temps 215.
Ce double nombre – mâle et femelle – est symbolisé aussi par quelques idoles bien connues ; par exemple :
Ardhanâri-Ishvara, l'Isis des Hindous, Eridanus ou Ardan, ou le Jourdain des Hébreux, ou source de la descente. Elle se tient sur une feuille de lotus flottant sur l'eau. Mais cela signifie... qu'elle est androgyne ou hermaphrodite, c'est-à-dire le phallus et le yoni combinés, le nombre 10, la lettre hébraïque Yod [י] le contenu de Jéhovah. Elle, ou plutôt elle-il, [donne] les minutes du même cercle de 360 degrés 216.
216 Ibid., pp. 23-24.
"Jéhovah", sous son meilleur aspect, est Binah la "Mère Supérieure médiatrice, la Grande Mer ou le Saint-Esprit" et, par conséquent, plutôt un synonyme de Marie, Mère de Jésus, que de son Père ; cette "Mère qui est le mot latin Mare", la [II 113] Mer, est ici aussi Vénus, la Stella del Mare ou "l'Etoile de la Mer".
Les ancêtres des mystérieux Akkadiens – les Chandravamshas ou Indouvamshas, les Rois Lunaires que la tradition montre comme régnant à Prayâga (Allahabad), longtemps avant notre ère – étaient venus de l'Inde et avaient apporté avec eux le culte de leurs ancêtres, de Soma et de son fils Boudha, culte qui devient plus tard celui des Chaldéens. Cependant cette adoration, différente de l'Astrolâtrie et de l'Héliolâtrie populaires, n'était nullement de l'idolâtrie. Pas plus, en tout cas, que le symbolisme moderne des Catholiques Romains qui établit un rapport entre la Vierge Marie, la Magna Mater des Syriens et des Grecs avec la Lune.
Les Catholiques Romains les plus pieux sont très fiers de ce culte et le proclament hautement. Dans un Mémoire adressé à l'Académie française, le Marquis de Mirville dit :
Il n'est que naturel que, comme une prophétie inconsciente, Ammon-Râ soit le mari de sa mère, puisque la Magna Mater des chrétiens est précisément l'épouse du fils qu'elle conçoit... Nous [Chrétiens] pouvons maintenant comprendre pourquoi Neïth projette la lumière sur le Soleil tout en restant la Lune, puisque la Vierge, qui est la Reine des Cieux comme l'était Neïth, vêt le Christ-Soleil comme le fait Neïth et est vêtue par lui : "Tu vestis Solem et te Sol vestit" [comme chantent les catholiques romains durant leurs offices].
Nous [Chrétiens] comprenons aussi comment il se fait que l'inscription fameuse de Saïs ait dit que "nul n'a jamais soulevé mon voile [peplum]", puisque cette phrase, traduite littéralement, est le résumé de ce que l'on chante à l'église le jour de l'Immaculée Conception 217.
217 Pneumatologie : Des Esprits, t. III, p. 117 ; "Archéologie de la Vierge Mère".
Assurément rien ne pourrait être plus sincère que cela ! Cela justifie entièrement ce qu'a dit M. Gerald Massey dans sa Conférence sur la "Luniolâtrie ancienne et moderne" :
L'homme dans la Lune [Osiris-Sut, Jéhovah-Satan, Christ-Judas et autres Jumeaux Lunaires], est souvent accusé de mauvaise conduite... Dans les phénomènes lunaires la lune était une, en tant que lune, qui était double de sexe et triple de caractère, en sa qualité de mère, d'enfant et de mâle adulte. Par conséquent, l'enfant de la lune devient l'époux de sa propre mère ! Cela ne pouvait être évité si la reproduction devait avoir lieu. Il était forcé d'être son propre père ! Ces sortes de parentés étaient repoussées par la sociologie postérieure et l'homme primitif dans la lune devint tabou. Cependant, dans sa dernière phase, la plus inexplicable, c'est devenu la [II 114] doctrine fondamentale de la superstition la plus grossière que le monde ait jamais vue, car ces phénomènes lunaires et leurs parentés humainement représentées, y compris les incestueuses, sont la base même de la Trinité Chrétienne dans l'Unité. Par ignorance du symbolisme, la simple représentation des premiers temps est devenue le plus profond mystère religieux de la Luniolâtrie moderne. L'Eglise Romaine, sans avoir le moins du monde honte de la preuve, représente la Vierge Marie, revêtue du Soleil et ayant le croissant de la Lune sous ses pieds, tenant l'enfant lunaire dans ses bras – en qualité d'enfant et d'époux de la Lune-mère ! La mère, l'enfant et le mâle adulte sont fondamentaux...
De cette façon l'on peut prouver que notre Christologie n'est que la mythologie momifiée et la tradition légendaire qui nous ont été imposées, par l'Ancien et le Nouveau Testament, comme une révélation divine articulée par la voix même de Dieu 218.
218 Page 23.
On trouve dans le Zohar une allégorie charmante qui dévoile mieux qu'aucune autre le vrai caractère de Jéhovah ou YHVH, suivant la conception primitive des Cabalistes Hébreux. On la trouve maintenant dans la philosophie de la Kabalah d'Ibn Gebirol, traduite par Isaac Myer.
Dans l'introduction écrite par R. 'Hiz' qee-yah, qui est très ancienne et forme une partie de l'édition Brody du Zohar (I. 5 b. sq.) il y a le récit d'un voyage entrepris par
- El'azar, fils de B. Shim-on b. Yo'haï, et R. Abbah... Ils rencontrèrent un homme portant un lourd fardeau... Ils causèrent ensemble... et les explications de la Thorah données par l'homme qui portait le fardeau furent si merveilleuses, qu'ils lui demandèrent son nom ; il répondit : "Ne me demandez pas qui je suis, mais nous continuerons tous l'explication de la Thorah [la Loi]." Ils demandèrent : "Qui t'a fait ainsi marcher et porter un aussi lourd fardeau ?" Il répondit : "La lettre, (Yod, qui = 10, qui est la lettre symbolique de Kether et l'essence ainsi que le germe du Nom Sacré הוהי YHVH) fit la guerre, etc."... Ils lui dirent : "Si tu consens à nous dire le nom de ton Père, nous baiserons la poussière de tes pieds." Il répliqua : "Quant à mon père, il habitait dans la Grande Mer où il était un poisson [comme Vishnou et Dagon ou Oannès] qui [d'abord] détruisit la Grande Mer…, et il était grand et puissant et "Ancien des Jours" jusqu'à ce qu'il eût avalé tous les autres poissons de la (Grande) Mer"... R. El'azar écouta ses paroles et lui dit : "Tu es le fils de la Flamme Sacrée, tu es le fils de Rab Ham-'nun-ah Sabah (le vieux), [poisson en Aramaïque ou en Chaldéen se dit nun (noon)], tu es le Fils de la Lumière de la Thorah [Dharma], etc." 219.
219 Qabbalah de Myer, 335-6.
L'auteur explique alors que la Séphira féminine Binah [II 115] est appelée par les Cabalistes la Grande Mer ; par conséquent Binah, dont les noms divins sont Jéhovah, Yah et Elohim, n'est autre que le Tiamat des Chaldéens, le Pouvoir Féminin, le Thalatth de Bérose qui préside au chaos et qui devient plus tard dans la Théologie Chrétienne le Serpent et le Diable. Elle-il (Yah-Hovah) est le Hé céleste et Eve. Ce Yahhovah, ou Jéhovah, est donc identique à notre Chaos – Père Mère, Fils – sur le plan matériel et dans le Monde purement physique, Deus et Démon tout ensemble ; le soleil et la lune, le bien et le mal, Dieu et le Démon.
Le magnétisme lunaire génère la vie, la conserve et la détruit, psychiquement aussi bien que physiquement. Et si, au point de vue astronomique, la Lune est l'une des sept planètes du monde ancien, dans la Théogonie elle est l'un de ses Régents – chez les Chrétiens maintenant comme chez les Païens, les premiers y faisant allusion sous le nom d'un de leurs Archanges et les seconds sous celui d'un de leurs Dieux.
Aussi la signification du "conte de fées" traduit par Chwolsohn d'après la traduction Arabe d'un vieux manuscrit Chaldéen, dans lequel Qû-tâmy est instruit par l'idole de la Lune, est facile à comprendre. Seldenus nous en donne le secret, aussi bien que Maimonides dans son Guide pour ceux qui sont dans la perplexité 220. Les adorateurs des Téraphim (oracles des Juifs), "sculptèrent des images et prétendirent que la lumière des étoiles [planètes] principales les ayant complètement pénétrées, les VERTUS Angéliques [ou les Régents des étoiles et des planètes] causaient avec eux et leur enseignaient un grand nombre de choses et d'arts utiles". Et Seldenus explique que les Téraphim étaient construits et composés selon la position de certaines planètes, celles que les Grecs appelaient στοικει̃α [les éléments], d'après les figures placées dans les cieux et appelées άλζητήριοι [les défenseurs] ou les Dieux tutélaires. Ceux qui traçaient les στοιχεια étaient nommés στοιχεὶωµατιχοι ou devins par στοιχει̃α" 221.
220 Moreh Nebhuchim, III, XXX.
221 Voir De Diis Syriis, Téraph., II, Synt., p. 31.
Ce sont pourtant de pareilles phrases dans l'Agriculture Nabathéenne qui ont effrayé les hommes de Science et leur ont fait proclamer que c'était "un ouvrage apocryphe ou un conte de fées indigne de l'attention d'un Académicien". En même temps, comme nous l'avons vu, des Catholiques Romains et des Protestants pleins de zèle l'ont métaphoriquement mis en lambeaux, les premiers parce qu'il "décrivait le culte des démons", les derniers parce qu'il n'était pas "pieux". Encore une fois tous ont tort. Ce n'est pas un conte de fées et, en ce qui concerne les pieux Ecclésiastiques, [II 116] on peut trouver le même culte dans leurs Ecritures Saintes, quelque défiguré qu'il soit par la traduction. Le culte Solaire et Lunaire, ainsi que le culte des Etoiles et des Eléments, peuvent être découverts dans la Théologie Chrétienne où ils ont trouvé place. Les Papistes prennent leur défense et les Protestants ne les nient qu'à leurs risques et périls. Nous pouvons citer deux exemples.
Ammianus Marcellinus enseigne que les antiques divinations étaient toujours accomplies à l'aide des Esprits des Eléments (Spiritus Elementorum et, en grec, πνεύµατα τω̃ν στοιχείων) 222.
222 I, I, 21.
Mais on a découvert maintenant que les Planètes, les Eléments et le Zodiaque étaient représentés, non seulement à Héliopolis par les douze pierres appelées "mystères des éléments" (Elementorum Arcana), mais aussi dans le Temple de Salomon et, comme l'ont fait remarquer les divers écrivains, dans plusieurs vieilles églises Italiennes et même à Notre-Dame de Paris, où l'on peut les voir aujourd'hui encore.
Aucun symbole, sans excepter celui du Soleil, n'était, dans ses diverses significations, plus complexe que le symbole lunaire. Son sexe, cela va sans dire, était double. Pour les uns, il était mâle ; comme, par exemple, le "Roi Soma" Hindou et le Sin Chaldéen ; pour d'autres nations il était féminin, comme les belles déesses Diana-Luna, Ilithya [la déesse gracieuse ou propice], Lucine. Chez les Tauri, on sacrifiait des victimes humaines à Artémise, un des aspects de la déesse lunaire ; les Crétois l'appelaient Dictynna et les Mèdes ainsi que les Perses, Anaïtis, comme on peut le voir par une inscription de Colœ : ̉Αρτέµδι ̉Ανάεικι [Artémise ou Diane secourable]. Mais nous nous occupons maintenant surtout de la plus pure et de la plus chaste des déesses vierges Luna-Artémise, à qui Pamphôs donna le premier le surnom de Καλλίρτη [la plus belle] et à propos de qui Euripide, dans Hippolyte, écrivit Καλλίρτα πολὺ παρθένων [la plus belle de bien des jeunes filles] 223 Cette Artémise Lochia, Déesse qui présidait à la conception et à l'enfantement (Iliade, Pausanias, etc), est, dans ses fonctions et en qualité de triple Hécate, la Divinité Orphique, prédécesseur du Dieu des Rabbins et des Cabalistes pré-Chrétiens et son type lunaire. La déesse Τρίµορφος [à la triple forme] était le symbole personnifié des aspects variés et successifs représentés par la Lune dans chacune de ses trois phases et cette interprétation était déjà celle des Stoïques 224, tandis que les Orphéens expliquaient l'épithète de Τρίµορφος par les trois règnes de la nature qu'elle [II 117] régissait. Jalouse, avide de sang, vindicative et exigeante, Hécate-Luna est la digne contrepartie du "Dieu jaloux" des prophètes Hébreux.
L'énigme entière des cultes Solaire et Lunaire, telle qu'elle est spécifiée maintenant dans les églises, repose en effet sur ce mystère, vieux comme le monde, des phénomènes lunaires. Les forces corrélatives de "la Reine de la Nuit", qui sont encore latentes pour la Science Moderne, mais sont en pleine activité pour le savoir des Adeptes Orientaux, expliquent bien les mille et une images sous lesquelles la Lune était représentée par les Anciens. Elles démontrent aussi combien les Anciens étaient plus profondément versés dans les Mystères Séléniques que ne le sont nos Astronomes modernes. Le Panthéon entier des dieux et des déesses lunaires, Nephtys ou Neïth, Proserpine, Milytta, Cybèle, Isis, Astarté, Vénus et Hécate d'un côté et Apollon, Dionysos, Adonis, Bacchus, Osiris, Atys, Thammuz, etc, de l'autre, tous prouvent par leurs noms mêmes et leurs titres – ceux de "Fils"et "d'Epoux" de leurs "Mères" – leur identité avec la Trinité Chrétienne. Dans tout système religieux les Dieux ont fusionné leurs fonctions de Père, de Fils et d'Epoux en une seule et l'on identifiait les Déesses comme Epouse, Mère et Sœur du Dieu mâle. Les premiers synthétisant les attributs humains, en qualité de "Soleil Donneur de Vie", les dernières fondant tous les autres titres dans la grande synthèse connue sous le nom générique de Maia, Mâyâ, Maria, etc. – Maia, dans sa dérivation forcée, en est arrivée à signifier chez les Grecs "Mère", tiré de la racine ma (nourrice) et même à donner son nom au mois de mai qui, avant qu'on le consacrât à Maria, était consacré à toutes ces déesses 225. Sa signification primitive, toutefois, était Mâyâ, Durgâ, que les Orientalistes traduisent par "inaccessible", mais qui signifie en réalité "l'impossible à atteindre" dans le sens d'illusion et de non-réalité, comme étant la source et la cause des charmes, la personnification de l'illusion.
223 Voir Pausanias, VIII, 35-8.
224 CORNUTUS, De Natura Deorum, XXXIV, I.
225 C'est au païen Plutarque que les Catholiques Romains sont redevables de l'idée de consacrer le mois de Mai à la Vierge, car il démontre que "Mai est consacré à Maia (Μαι̃α) ou Vesta" (Aulu Gelle, sub voc. Maia) personnification de notre mère la Terre, de celle qui nous nourrit et nous soigne.
226 Thot-Lunus est le Bouddha-Soma de l'Inde, on "Mercure et la Lune".
Dans les rites religieux, la Lune servait à un double but personnifié comme déesse féminine pour les usages exotériques, ou comme dieu mâle dans l'allégorie et le symbole, notre satellite était considéré par la Philosophie Occulte comme un Pouvoir sans sexe, qu'il fallait bien étudier parce qu'il était à craindre. Chez les initiés Aryens, Khaldii [Chaldéens], Grecs et Romains, Soma, Sin, Artémise, Soteira (l'Apollon hermaphrodite dont l'attribut est la lyre et la Diane[II 118] barbue armée de l'arc et des flèches), Deus Lunus et surtout Osiris-Lunus et Thot-Lunus 226 étaient les pouvoirs occultes de la Lune. Mais qu'elle soit mâle ou femelle, qu'elle soit Thot ou Minerve, Soma ou Astoreth, la Lune est le mystère des mystères Occultes et plutôt un symbole du mal que du bien. Ses sept phases, dans la division originale ésotérique, sont réparties en trois phénomènes astronomiques et en quatre phases purement psychiques. Que la Lune n'était pas toujours respectée est montré dans les mystères où la mort du Dieu Lune – c'est-à-dire les trois phases de la décroissance graduelle et de la disparition finale – était symbolisée par la Lune représentant le génie du mal qui, pour un temps, triomphe du Dieu qui donne la vie et la lumière, le Soleil ; et il fallait toute l'habileté et tout le savoir des anciens Hiérophantes en Magie pour changer ce triomphe en défaite.
C'était le plus ancien de tous les cultes, celui de la Troisième Race de notre Ronde, les Hermaphrodites, culte dans lequel la Lune mâle devint sacrée, lorsque après la "Chute" prétendue, les sexes eurent été séparés. "Deus Lunus" devint alors un androgyne, tour à tour mâle et femelle, pour être finalement employé, pour des pratiques de sorcellerie, en guise de pouvoir double par la Quatrième Race-Racine, les Atlantes. Avec la Cinquième, notre Race à nous, le culte lunaire-solaire divisa les nations en deux camps distincts et opposés. Ce fut la cause des événements décrits des æons plus tard dans la Guerre du Mahâbhârata, qui est considérée par les Européens comme la lutte fabuleuse et par les Hindous et les Occultistes comme la lutte historique entre les Souryavamshas et les Indouvamshas. Après avoir eu pour cause première le double aspect de la Lune, c'est-à-dire le culte des principes mâle et femelle, la lutte se termina par l'adoption des cultes Solaire et Lunaire distincts. Chez les races Sémitiques, le Soleil fut pendant longtemps féminin et la Lune masculine ; cette dernière conception avait été tirée par eux des traditions Atlantes. La lune était appelée le "Seigneur du Soleil", Bel-Shemesh, avant le culte de Shemesh. L'ignorance des raisons premières de cette distinction et des principes occultes, conduisit les nations au culte anthropomorphique des idoles. [Pendant cette période dont il n'est pas parlé dans les livres mosaïques, c'est-à-dire depuis l'exil de l'Eden jusqu'au Déluge allégorique, les Juifs comme les autres Sémites, adorèrent Dayanisi 227, ישניד, le "Souverain des Hommes", "le Juge", ou le SOLEIL. Bien que le canon Juif et le Christianisme aient fait du Soleil le "Seigneur Dieu" et "Jéhovah" dans la Bible, celle-ci n'en est pas moins pleine [II 119] d'allusions indiscrètes à la Divinité androgyne qui était Jéhovah, le Soleil, et Astoreth, la Lune, sous son aspect féminin, sans métaphore aucune, comme de nos jours. Dieu est un "feu consumant", il apparaît dans le feu et il "en est entouré". Ce ne fut pas seulement dans ses visions qu'Ezéchiel vit les Juifs "adorant le Soleil" 228. Le Baal des Israélites – le Shemesh des Moabites et le Moloch des Ammonites – était le même "Jéhovah-Soleil" et il est aujourd'hui encore "le Roi des Légions du Ciel", le Soleil, tout comme Astoreth était la "Reine du Ciel", ou la Lune. Ce n'est qu'actuellement que le "Soleil de Justice" est devenu une expression métaphorique.] Les religions de toutes les nations anciennes avaient d'abord été basées sur les manifestations Occultes d'une Force ou d'un Principe purement abstrait que l'on appelle aujourd'hui "Dieu". L'établissement même d'un tel culte montre, par ses détails et ses rites, que les philosophes qui établirent de pareils systèmes de la Nature, subjective et objective, possédaient un savoir profond et connaissaient nombre de faits de caractère scientifique. A part leur côté purement Occulte, les rites du culte Lunaire étaient, en effet, basés, comme nous venons de le voir, sur la connaissance de la Physiologie – science qui, pour nous, est tout à fait moderne – de la Psychologie, des Mathématiques sacrées, de la Géométrie et de la Métrologie, dans leurs applications correctes aux symboles et aux figures, qui ne sont que des glyphes remémorant de faits naturels et scientifiques qui ont été observés, en un mot sur la connaissance la plus minutieuse et la plus profonde de la Nature. Comme nous venons de le dire, le magnétisme Lunaire génère la vie, la conserve et la détruit. Soma incarne le triple pouvoir de la Trimourti, bien qu'il ne soit pas reconnu jusqu'à présent par les profanes. L'allégorie qui représente Soma, la Lune, comme produite par le Barattement de l'Océan de Vie (l'Espace) par les Dieux durant un autre Manvantara, c'est-à-dire à une époque qui précéda la Genèsede notre Système Planétaire et le mythe 229 qui représente "les Richis trayant la Terre dont le veau était Soma ou la Lune" ont une profonde signification cosmographique, car ce n'est ni notre Terre qui est traite, ni la Lune que nous connaissons qui est le veau 230. Si [II 120] nos hommes de Science en savaient autant que les anciens Aryens sur les mystères de la Nature, ils n'auraient sûrement jamais imaginé que la Lune avait été projetée par la Terre. Encore une fois il faut se rappeler et prendre en considération les plus anciennes permutations de la Théogonie, le Fils devenant son propre Père et la Mère générée par le Fils, si l'on veut comprendre le langage symbolique des Anciens. Autrement la mythologie continuera à obséder les Orientalistes, comme n'étant "qu'une maladie qui apparaît à une certaine époque de la culture humaine !" – comme le dit gravement Renouf dans une Conférence Hibbert.
229 Cette autre allégorie – dans l'édition de 1888.
230 Dans l'allégorie, la Terre fuit, pour sauver sa vie, devant Prithou qui la poursuit. Elle prend la forme d'une vache, et, tremblante de frayeur, court se cacher même dans les régions de Brahmâ. Ce n'est donc pas notre Terre. De même dans chaque Pourâna, le veau change de nom. Dans l'un c'est Manou Svâyambhouva, dans un autre c'est Indra, dans un troisième l'Himavat (l'Himalaya) lui- même et Mérou était celui qui trayait. Cette allégorie est plus profonde que l'on pourrait le supposer.
Les Anciens enseignaient, pour ainsi dire, l'auto-génération des Dieux ; l'Essence Divine Unique non-manifestée engendrant continuellement un Second Soi manifesté, ce Second Soi, androgyne par nature, donne naissance d'une façon immaculée à toutes les choses macrocosmiques et microcosmiques dans cet Univers. C'est ce qui est démontré dans le Cercle et le Diamètre ou par le Dix-Sacré (10) que nous avons mentionnés un peu plus haut.
Mais nos Orientalistes, malgré leur extrême désir de découvrir un Elément homogène dans la Nature, ne veulent pas le voir. Limités dans leurs recherches par une pareille ignorance, les Aryanistes et les Egyptologues s'écartent constamment de la vérité dans leurs spéculations. Ainsi, de Rougé est incapable de comprendre, dans le texte qu'il traduit, la signification de ce qu'Ammon-Ra dit au roi Aménophès que l'on suppose être Memnon : "Tu es mon Fils, je t'ai engendré." Et comme il trouve cette même idée dans plusieurs textes et sous diverses formes, ce même Orientaliste très Chrétien en arrive à s'écrier :
Pour que cette idée soit entrée dans l'esprit d'un hiérogrammate, il faut qu'il y ait eu dans leur religion une doctrine plus ou moins définie, indiquant, comme un fait possible qui pouvait se présenter, une incarnation divine et immaculée sous une forme humaine.
C'est cela même. Mais pourquoi chercher l'explication dans une prophétie impossible, lorsque tout le secret est expliqué par la religion plus récente qui a copié l'ancienne ?
Cette doctrine était universelle et ce n'était pas le mental d'un hiérogrammate qui l'avait évoluée, car les Avatars Indiens sont la preuve du contraire. Après quoi, étant arrivé "à comprendre plus clairement 231", ce qu'étaient les "Divins [II 121] Père et Fils" chez les Egyptiens, de Rougé ne réussit pas davantage à expliquer et à concevoir ce qu'étaient les fonctions attribuées au Principe féminin dans cette génération primordiale. Il ne le trouve pas dans la Déesse Neïth de Saïs. Il cite, pourtant, la phrase du Commandeur à Cambyse lorsqu'il introduisit ce roi dans le temple Saïtique : "Je fis comprendre à Sa Majesté la dignité de Saïs, qui est la demeure de Neïth, la grande productrice (femelle) mère du Soleil qui est le premier né et qui n'est pas engendré, mais seulement enfanté" et qui est, par suite, le fruit d'une Mère Immaculée.
231 Cette compréhension claire est que les Egyptiens prophétisèrent Jéhovah (!) et son Rédempteur incarné (le bon serpent), etc. ; jusqu'à même identifier Typhon avec le méchant Dragon du jardin d'Eden. Et cela passe pour de la science sérieuse et censée !
Combien plus grandiose, plus philosophique et plus poétique – pour qui est capable de la comprendre et de l'apprécier – est la vraie distinction établie entre la vierge immaculée des anciens Païens et la conception Papale moderne. Chez les premiers, la Nature-Mère, toujours jeune, l'antitype de ses prototypes, le Soleil et la Lune, génère et enfante son Fils "né du mental", l'Univers. Le Soleil et la Lune en qualité de divinités mâles-femelles, fertilisent la Terre, Mère microcosmique et celle-ci conçoit et enfante à son tour. Chez les Chrétiens, le "Premier Né" (primogenitus) est, en effet, généré, c'est-à-dire engendré (genitus non factus, engendré, non créé) et positivement conçu et enfanté : "Virgo pariet [une Vierge enfantera]", explique l'Eglise Latine. C'est ainsi que cette Eglise rabaisse au niveau le plus terrestre l'idéal noble et spirituel de la Vierge Marie et la fait descendre au rang des plus basses déesses anthropomorphiques de la foule.
Il est vrai que Neïth, Isis, Diane, etc., quel que soit le nom qu'on lui donne, était "une Déesse démiurgique, à la fois visible et invisible ayant sa place dans le Ciel et aidant à la génération des espèces – la Lune, en un mot. Ses aspects et ses pouvoirs occultes sont sans nombre et sous l'un de ces aspects, la Lune devient chez les Egyptiens Hathor, autre aspect d'Isis 232, et l'on représente ces deux déesses comme allaitant Horus. Voyez dans la salle Egyptienne du British Museum, Hathor adorée par le Pharaon Thotmès qui se tient entre elle et le Seigneur des Cieux. Ce monolithe a été pris à Karnac. La légende suivante est inscrite sur le trône de cette même Déesse : "LA DIVINE MERE ET DAME, OU REINE DU CIEL", et aussi "ETOILE DU MATIN" et "LUMIERE DE LA MER". – Stella Matutina et Lux Maris. Toutes les déesses lunaires avaient un double aspect ; l'un divin, l'autre infernal. Toutes étaient les Vierges Mères d'un Fils – le Soleil – né d'une façon immaculée. Raoul Rochette montre la Déesse Lunaire des Athéniens, Pallas ou Cybèle, Minerve ou bien encore Diane, tenant dans son giron son jeune fils, invoquée [II 122] à l'époque de ses fêtes sous le nom de Μονογενής Θεού̉, [Seul engendré de Dieu] la "Seule Mère de Dieu", assise sur un lion et entourée de douze personnages ; dans lesquels l'Occultiste reconnaît les douze grands Dieux et le pieux Orientaliste Chrétien les Apôtres, ou plutôt la Prophétie Païenne des Grecs à leur sujet.
232 Hathor est l'Isis infernale, la déesse par excellence de l'Occident ou monde inférieur.
Ils ont tous deux raison, car la déesse Immaculée de l'Eglise latine est une copie fidèle des anciennes déesses païennes ; le nombre des Apôtres est celui des douze tribus qui ne sont que la personnification des douze grands Dieux et des douze Signes du Zodiaque. Presque chaque détail du dogme Chrétien est emprunté aux Païens. Sémélé, épouse de Jupiter et Mère de Bacchus, le Soleil, est aussi, selon Nonnus, "portée" ou élevée, après sa mort, au Ciel où elle préside entre Mars et Vénus, sous le nom de "Reine du Monde" ou de l'Univers [πανβασίλεια] ; "à son nom" comme à ceux de Hathor, d'Hécate et d'autres Déesses infernales "tous les démons tremblent" 233.
"Σεµέλην τρέµουσι δαίµονες [Les démons s'enfuient de Sémélé]". Cette inscription grecque ornant un petit temple, et reproduite sur une pierre trouvée par Beger, et copie par Montfaucon comme nous le dit de Mirville, nous apprend ce fait étonnant que la Magna Mater du monde ancien était un impudent "plagiat" de la Vierge Mère Immaculée de son Eglise, effectué par le Démon. Qu'il en soit ainsi ou vice versa, ce n'est pas important. Ce qui est intéressant de noter, c'est l'identité parfaite entre la copie archaïque et l'original moderne.
Si l'espace nous le permettait, nous pourrions faire ressortir l'aplomb et l'inconcevable impudence de certains membres de l'Eglise Catholique Romaine, lorsqu'ils sont forcés de regarder en face les révélations du Passé. Aux remarques de Maury que la "Vierge a pris possession de tous les Sanctuaires de Cérès et de Vénus et que les rites Païens annoncés et célébrés en l'honneur de ces Déesses furent en grande partie transférés à la Mère du Christ" 234, le défenseur de Rome répond qu'il en est bien ainsi et que ce n'est que juste et tout à fait naturel.
Comme le dogme, la liturgie et les rites professés par l'Eglise Romaine Apostolique en 1862 sont trouvés gravés sur des monuments, inscrits sur des papyrus et des cylindres d'une date à peine postérieure au Déluge, il semble impossible de nier l'existence d'un premier Catholicisme [Romain] préhistorique dont le [II 123] nôtre n'est que la fidèle continuation... [Mais tandis que le premier était le comble, le "summum" de l'impudence des démons et de la nécromancie goétique... le dernier est divin]. Si dans notre révélation [chrétienne], (Apocalypse), Marie, vêtue du Soleil et ayant sous ses pieds la Lune n'a plus rien de commun avec l'humble servante de Nazareth [sic], c'est parce qu'elle est maintenant devenue le plus grand des pouvoirs théologiques et cosmologiques de notre univers 235.
233 Tiré de de Mirville, qui avoue fièrement la similitude et il doit savoir. Voir "l'Archéologie de la Vierge Mère" dans son "Des Esprits", Tome III, pages 111-113.
234 Magie, p. 153.
235 De Mirville, Ibid., pp. 116 et 119.
236 Hymnes à Minerve, p. 19.
237 Pindare. Sermon sur la Sainte Vierge.
238 Verg. Ec., IV, 10.
239 Apoc., ch. XII.
Sans doute, puisque Pindare chante ainsi son "assomption" : "Elle est assise à la droite de son Père [Jupiter]... et elle est plus puissante que tous les autres [Anges ou] Dieux" 236 – hymne que l'on applique aussi à la Vierge. Saint Bernard aussi, cité par Cornélius à Lapide, s'adresse ainsi à la Vierge Marie : "Le Christ-Soleil vit en toi et tu vis en lui" 237.
Le même saint et véridique personnage admet aussi que la Vierge n'est autre que la Lune. Comme elle est la Lucine de l'Eglise, il lui applique, au moment de l'enfantement, ce vers de Virgile, "Casta fave Lucina, tuus jam regnat Apollo" [Sois favorable, ô chaste Lucine, c'est ton Apollon qui règne maintenant] 238. "Comme la Lune, la Vierge est la Reine du Ciel", ajoute enfin l'innocent saint 239.
Cela tranche la question. D'après les écrivains du genre de de Mirville, plus il y a de similitude entre les conceptions Païennes et les dogmes Chrétiens, plus la religion Chrétienne apparaît divine, et plus on voit que c'est la seule qui soit vraiment inspirée, surtout dans sa forme Catholique Romaine. Les Savants et les Académiciens sceptiques qui pensent voir dans l'Eglise Latine tout le contraire d'une inspiration divine et qui refusent de croire aux tours Sataniques de plagiat par anticipation, sont sévèrement pris à partie. Mais alors, gémit l'auteur du mémoire, "ils ne croient à rien et écartent même l'Agriculture Nabathéenne comme étant un roman et une collection de superstitieuses sottises. Dans leur opinion insensée, l'idole de la Lune de Qû-tâmy et la statue de la Madone ne font qu'un" ! Un noble marquis [J.-E. de Mirville] écrivait, il y a vingt-cinq ans, six grands volumes, ou, comme il les appelle, six grands "Mémoires à l'Académie Française", dans le seul but de prouver que le Catholicisme Romain était une foi inspirée et révélée. Il fournit comme preuves, des faits sans nombre tendant tous à démontrer que l'Ancien Monde tout entier, depuis le Déluge, avait, avec l'aide du diable, [II 124] systématiquement plagié les rites, les cérémonies et les dogmes de la future Sainte Eglise qui ne devait naître que bien des siècles après. Qu'aurait donc dit ce fidèle fils de Rome, s'il avait entendu son coreligionnaire, M. Renouf, l'Egyptologue distingué du British Museum, déclarer dans l'une de ses savantes conférences que "ni les Hébreux, ni les Grecs n'avaient emprunté aucune de leurs idées à l'Egypte" ? 240
240 Cité dans une conférence de M. G. Massey.
241 Wâgner et Mc. Dowall, Asgard and the Gods, p. 86.
Mais M. Renouf voulait peut-être dire que c'était les Egyptiens, les Grecs et les Aryens qui avaient emprunté leurs idées à l'Eglise Latine ? Et s'il en est ainsi, pourquoi, au nom de la logique, les Papistes écartent-ils les renseignements supplémentaires que les Occultistes peuvent donner au sujet du culte de la Lune, puisqu'ils tendent tous à prouver que le culte de l'Eglise Catholique Romaine est aussi vieux que le monde – du SABEANISME ET DE L'ASTROLATRIE ?
Le pourquoi de l'Astrolâtrie des premiers Chrétiens et des Catholiques Romains qui leur succédèrent, ou le culte symbolique du Soleil et de la Lune, culte identique à celui des Gnostiques, bien que moins philosophique et moins pur que le "culte du Soleil" des Zoroastriens, est le résultat naturel de sa naissance et de son origine. L'adoption par l'Eglise Latine de symboles tels que l'eau, le feu, le soleil, la lune, les étoiles et bien d'autres, n'est que la continuation par les premiers Chrétiens de l'ancien culte des nations Païennes. Ainsi Odin acquit sa sagesse, son pouvoir et sa connaissance en s'asseyant aux pieds de Mimir, le Jotun trois fois sage, qui passa sa vie auprès de la fontaine de Sagesse primordiale, dont les Eaux cristallines augmentaient tous les jours son savoir. "Mimir tira la plus haute connaissance de la fontaine, parce que le monde était né de l'eau, de sorte que la sagesse primordiale devait se trouver dans cet élément mystérieux. L'œil qu'Odin devait donner en gage pour acquérir cette connaissance est, peut-être, "le soleil qui illumine et pénètre toutes choses, son autre œil étant la lune dont la réflexion jaillit du fond des abîmes et qui, à la fin, lorsqu'elle disparaît, plonge dans l'Océan 241". Mais c'est quelque chose de plus. Loki, le Dieu de Feu, passe pour s'être caché dans l'eau, aussi bien que dans la Lune, le distributeur de lumière, dont il trouva l'image dans l'eau. Cette croyance que le Feu trouve un refuge dans l'eau n'était pas limitée aux anciens Scandinaves. Elle était partagée par toutes les nations et fut finalement adoptée par les premiers Chrétiens, qui symbolisèrent le Saint-Esprit sous la forme du Feu, "des langues fendues ressemblant à du feu" – le souffle du SOLEIL-Père. Ce feu descend aussi dans l'Eau ou dans la Mer – [II 125] Mare, Marie. La Colombe était pour plusieurs nations le symbole de l'Ame ; elle était consacrée à Vénus, la déesse née de l'écume de la mer, et elle devint plus tard le symbole de l'Anima Mundi Chrétienne ou Saint-Esprit.
L'un des chapitres les plus occultes du Livre des Morts est celui intitulé : "La transformation en Dieu qui donne la Lumière au sentier de l'Obscurité", où "la Femme-Lumière de l'Ombre" sert Thot dans sa retraite dans la Lune. On dit que Thot-Hermès s'y cache parce qu'il est le représentant de la Sagesse Secrète. Il est le Logos manifesté de son côté lumineux ; la Divinité cachée ou la "Sagesse Obscure", lorsqu'il est censé se retirer dans l'hémisphère opposé. En parlant de son pouvoir, la Lune se donne constamment le nom de : "La Lumière qui brille dans l'Obscurité", la "Femme-Lumière". Elle devint, en conséquence, le symbole accepté de toutes les déesses Vierges-Mères. De même que les méchants Esprits "du mal" luttèrent dans les premiers temps contre la Lune, ils sont supposés faire de même maintenant, sans cependant pouvoir l'emporter sur la Reine actuelle du Ciel, Marie, la Lune. C'est pourquoi la Lune était aussi intérieurement reliée, dans toutes les Théogonies Païennes, avec le Dragon son éternel ennemi. La Vierge ou Madone se tient sur le Satan mythique ainsi symbolisé, qui gît écrasé et impuissant sous ses pieds. Et cela parce que la tête et la queue du Dragon, qui jusqu'à nos jours, dans l'Astronomie Orientale, représentent les nœuds ascendants et descendants de la Lune, étaient aussi symbolisés dans la Grèce ancienne par les deux serpents. Hercule les tue le jour de sa naissance et l'Enfant dans les bras de sa Mère Vierge fait de même. Comme le dit avec raison M. Gerald Massey :
Tous ces symboles figuraient dès le commencement leurs propres faits et n'en spécifiaient pas d'autres d'un ordre tout à fait différent. L'iconographie [et les dogmes aussi] avaient survécu à Rome depuis une période bien antérieure à l'ère chrétienne. Il n'y avait ni falsification ni interpolation de types ; rien qu'une continuité d'images avec une perversion de leur signification.
[II 126]