LA "MALEDICTION" AU POINT DE VUE PHILOSOPHIQUE
Les précédents enseignements de la DOCTRINE SECRETE, complétés par les traditions universelles, doivent avoir maintenant démontré que les Brâhmanas et les Pourânas, la Vendidadet autres Ecritures mazdéennes, ainsi que les archives sacrées des Egyptiens, des Grecs, des Romains et enfin des Juifs ont toutes la même origine. Aucune n'est un récit dépourvu de sens et de fondement, inventé pour prendre au piège le profane imprévoyant ; toutes sont des allégories destinées à présenter, sous un voile plus ou moins fantastique, [III 512] les grandes vérités recueillies dans le même champ de la tradition préhistorique. Le manque de place nous interdit, dans ces volumes, d'entrer dans des détails plus minutieux au sujet des quatre Races qui précédèrent la nôtre. Toutefois, avant de présenter aux étudiants l'histoire de l'évolution psychique et spirituelle des pères antédiluviens directs de notre cinquième Humanité (Aryenne) et avant de démontrer quelle est sa portée sur toutes les autres branches latérales issues du même tronc, il nous reste encore à élucider quelques faits. Il a été établi, en se basant sur toute la littérature antique et sur les spéculations pleines d'intuition de plus d'un Philosophe ou d'un Savant des époques plus récentes, que les dogmes de notre Doctrine Esotérique sont, dans presque tous les cas, corroborés par des preuves, tant directes qu'indirectes, démontrant que ni les Géants "légendaires", ni les Continents perdus, ni même l'évolution des Races précédentes, ne sont des contes dépourvus de fondement. Dans l'Appendice qui termine ce volume, la science se trouvera plus d'une fois dans l'impossibilité de répondre : nous espérons que cet Appendice fera définitivement justice de toutes les remarques des sceptiques, au sujet du nombre sacré de la Nature et au sujet de nos chiffres, en général.
En attendant, nous avons laissé une tâche incomplète, celle de faire justice du plus pernicieux de tous les dogmes théologiques, la MALEDICTION, sous le poids de laquelle l'humanité est censée gémir depuis la prétendue désobéissance d'Adam et d'Eve, dans l'Eden.
Les pouvoirs créateurs de l'homme furent le don de la Sagesse Divine et non le résultat du péché. C'est clairement illustré par la conduite paradoxale de Jéhovah, qui commence par maudire Adam et Eve (ou l'Humanité) à cause du prétendu crime qu'ils ont commis, puis "bénit" son "peuple élu" en disant : "Croissez et multipliez et remplissez la Terre" 1008. La Malédiction n'a pas été attirée sur l'humanité par la Quatrième Race, attendu que la Troisième, comparativement sans péché, et les Antédiluviens, encore plus gigantesques, avaient péri de la même façon ; en conséquence le Déluge ne fut pas un châtiment, mais simplement le résultat d'une loi géologique et périodique. La Malédiction de KARMA ne fut pas non plus attirée sur eux parce qu'ils avaient cherché l'union naturelle, comme le fait tout le monde animal dépourvu de mental, aux époques voulues, mais pour avoir abusé du pouvoir créateur, pour avoir profané ce don divin et pour avoir gaspillé l'essence vitale sans autre but que celui de satisfaire leurs passions bestiales. Lorsqu'on le comprendra [III 513] bien, on constatera que le troisième chapitre de la Genèsese rapporte à l'Adam et à l'Eve de la fin de la Troisième Race et du commencement de la Quatrième. Aux débuts, la conception était aussi facile pour la femme, qu'elle l'était pour toute la création animale. L'intention de la Nature n'avait jamais été d'imposer à la femme d'enfanter "dans la douleur". Depuis lors, toutefois, pendant l'évolution de la Quatrième Race, l'inimitié surgit entre sa semence et celle des "Serpents", la semence ou produit de Karma et de la Divine sagesse. En effet, la semence de la femme, ou luxure, écrasa la tête de la semence du fruit de la sagesse et du savoir, en transformant le saint mystère de la procréation en satisfaction animale : en conséquence, la Loi de Karma "écrasa le talon" de la Race Atlante, en transformant graduellement, aux points de vue physiologique, moral, physique, et mental, toute la nature de la Quatrième Race de l'humanité 1009, au point qu'après avoir été le roi plein de santé de la création animale, pendant la Troisième Race, l'homme devint, durant la Cinquième, la nôtre, un être faible et scrofuleux et se trouve être maintenant, sur Terre, le plus riche héritier des maladies constitutionnelles et héréditaires, le plus consciemment et intelligemment bestial de tous les animaux 1010 !
1008 Genèse, IX, 1.
1009 Combien sages et excellentes, pleines de perspicacité et moralement salutaires, sont les lois de Manou sur la vie conjugale, comparées à la licence accordée à l'homme dans les pays civilisés. Que ces lois aient été négligées depuis deux mille ans ne nous empêche pas d'admirer la prévoyance qui a présidé à leur rédaction. Le Brahmane était un Grihasta, un chef de famille, jusqu'à une certaine époque de sa vie, ou, après avoir eu un fils, il rompait avec la vie conjugale et devenait un chaste Yogi. Sa vie conjugale elle-même était réglée par son astrologue Brahmane en accord avec sa nature. Aussi dans des contrées comme le Pundjâb, par exemple, où la mortelle influence de la licence musulmane et, plus tard, de la licence européenne, n'a fait qu'effleurer les castes Aryennes orthodoxes, on trouve encore les plus beaux hommes de la Terre, au point de vue de la stature et de la force physique – tandis que dans le Deccan et surtout dans le Bengale, les hommes puissants de jadis ont été remplacés par d'autres hommes dont les générations décroissent en taille et en force, de siècle en siècle – pour ne pas dire d'année en année.
1010 Les maladies et la surpopulation sont des faits qui ne sauraient être niés.
Telle est la réelle Malédiction, au point de vue physiologique, presque le seul abordé par l'Esotérisme Cabalistique. Vue sous cet aspect, la Malédiction est indéniable, parce qu'elle est évidente. L'évolution intellectuelle, en progressant côte à côte avec l'évolution physique, a certainement été une malédiction au lieu d'une bénédiction, un don activé par les "Seigneurs de Sagesse" qui ont infusé au Manas humain la fraîche rosée de leur propre Esprit et de leur propre Essence. Le Divin Titan a donc souffert en vain et l'on se sent porté à regretter ses bienfaits envers l'humanité et à soupirer en [III 514] pensant à l'époque si clairement décrite par Eschyle dans son "Prométhée Enchaîné", alors qu'à la fin de la première Epoque Titanique (l'Epoque qui suivit celle de l'Homme Ethéré, des pieux Kandou et Pramlochâ), l'humanité physique naissante, encore dépourvue de mental et (physiologiquement) de sens, était ainsi décrite :
Voyant, ils voyaient en vain ;
Entendant, ils n'entendaient pas ; mais comme des formes de rêves, Ils mêlaient tout au hasard durant le long cours des temps.
Nos Sauveurs, les Agnishvâtta et autres divins "Fils de la Flamme de la Sagesse" personnifiés en Grèce par Prométhée 1011 peuvent bien être laissés dans l'oubli, être traités avec ingratitude, par l'injustice du cœur humain. Par suite de notre ignorance de la vérité, ils peuvent être maudits indirectement à cause du don de Pandore ; mais entendre affirmer et déclarer par la bouche du clergé que ce sont les ETRES MAUVAIS, constitue un Karma trop lourd pour "Celui" qui, lorsque Jupiter "désira ardemment" étouffer la race humaine tout entière, "osa seul" sauver cette "race mortelle" de la perdition, ou, suivant les paroles que l'on prête au Titan torturé :
1011 Dans le volume de Mme Anna Swanwick, intitulé The Dramas of Æschylus, il est dit au sujet de "Prométhée Enchaîné" (Bibliothèque Classique de Bohn, p. 334), que Prométhée y est vraiment présenté comme "le champion et le bienfaiteur de l'humanité, dont la condition... est dépeinte comme faible et misérable à l'excès... Jupiter, dit-on, se proposait d'annihiler ces êtres chétifs et éphémères et d'implanter à leur place une nouvelle race sur la Terre". Nous voyons dans les STANCES le Seigneur des Etres faire de même et exterminer les premiers produits de la Nature et de la Mer. "Prométhée se représente comme ayant déjoué ce dessein et comme se trouvant par suite soumis, à cause des mortels, à la souffrance la plus cruelle, que lui inflige la cruauté impitoyable de Jupiter. Nous voyons donc le Titan, symbole de la raison limitée et du libre arbitre [de l'humanité intellectuelle, ou l'aspect supérieur de Manas], représenté comme un philanthrope sublime, tandis que Jupiter, la Divinité Suprême de l'Hellade, est dépeint comme un despote cruel et inflexible, type particulièrement révoltant aux yeux des Athéniens." L'explication de ceci est donnée plus loin. La "Divinité Suprême" comporte dans tout Panthéon antique – y compris celui des Juifs – un double caractère, composé de lumière et d'ombre.
Du danger d'être plongé dans les ténèbres de l'Hadès.
Pour cela je fléchis sous le poids de ces affreuses tortures,
Si pénibles à endurer, si pitoyables à contempler, Moi qui ai eu pitié des mortels...
Tandis que le Chœur s'écrie avec raison :
C'est là un grand bienfait que tu as accordé aux mortels
[III 515]
Prométhée répond :
Oui et, de plus, c'est moi qui leur donnai le feu.
LE CHŒUR
Ces créatures éphémères, ont-elles maintenant le feu aux yeux de flammes ?
PROMETHEE
Oui et grâce à lui ils apprendront bien des arts...
Mais, outre les arts, le "feu" reçu est devenu la plus grande des malédictions ; l'élément animal et la conscience de sa position, ont transformé l'instinct périodique en animalité et en sensualité chroniques 1012. C'est là ce qui est suspendu, comme un pesant linceul, au- dessus de l'humanité. Ainsi naquirent, la responsabilité du libre arbitre et les passions Titanesques qui représentent l'humanité sous son aspect le plus sombre.
L'insatiabilité inquiète des passions inférieures et des désirs qui, avec une outrecuidante insolence, lancent un défi aux restrictions de la loi. 1013
1012 Le monde animal, n'étant guidé que par l'instinct, a ses saisons de procréation et les sexes sont neutralisés pendant le reste de l'année. Aussi l'animal libre n'est-il malade qu'une fois dans sa vie, avant de mourir.
1013 Introduction de "Prométhée Enchaîné", p. 340 (édit. anglaise).
Prométhée ayant doté l'homme, suivant le Protagoras, de Platon, de la "sagesse qui procure le bien-être physique", mais l'aspect inférieur de Manas de l'animal (Kama) étant resté le même, il en résulta, au lieu "d'un mental sans tache, premier don du ciel", la création de l'éternel vautour du désir à jamais insatisfait, du regret et du désespoir, accouplé avec "la faiblesse rêveuse qui enchaîne la race aveugle des mortels" (556), jusqu'au jour où Prométhée fut rendu à la liberté par Hercule, son libérateur désigné par le Ciel.
Les Chrétiens – surtout les Catholiques Romains – ont cherché à établir un rapport prophétique entre ce drame et la venue du Christ. On ne pouvait commettre une plus grande erreur. Le véritable Théosophe, le chercheur de Sagesse Divine et l'adorateur de l'Absolue Perfection – la Divinité Inconnue, qui n'est ni Jupiter ni Jéhovah – rejettera une pareille idée. Se reportant à l'antiquité, il prouvera qu'il n'y a jamais eu de péché originel, mais simplement un abus de l'intelligence physique, le Psychique étant guidé par l'Animal et tous deux chassant la lumière du Spirituel. Il dira : que tous ceux d'entre vous qui sont capables de lire entre les lignes étudient l'Antique Sagesse dans les drames antiques, [III 516] l'Indien et le Grec : qu'ils lisent avec soin le "Prométhée Enchaîné", représenté sur les théâtres d'Athènes il y a 2.400 ans ! Le mythe n'appartient, ni à Hésiode, ni à Eschyle, mais, comme le dit Bunsen, il est "plus ancien que les Hellènes eux-mêmes" car il appartient, en vérité, à l'aurore de la conscience humaine. Le Titan Crucifié est le symbole personnifié du Logos collectif, de la "Légion" et des "Seigneurs de la Sagesse" ou de L'HOMME CELESTE qui s'incarna dans l'Humanité. En outre, comme le prouve son nom (Prome-theus, "celui qui voit devant lui", ou l'avenir 1014), dans les arts qu'il imagina et enseigna à l'humanité, la connaissance approfondie de la psychologie occupait un des premiers rangs. En effet, il se plaignait en ces termes aux filles d'Océanus :
J'ai fixé les divers modes de prophéties (492) Et j'ai été le premier à discerner dans les rêves La vision véritable... et j'ai guidé les mortels Vers un art mystérieux........................
Les mortels doivent tous les arts à Prométhée...
Abandonnons le sujet principal, pendant quelques pages et faisons une pause pour chercher à découvrir quel peut être le sens caché de cette allégorie traditionnelle, qui est la plus ancienne en même temps que la plus suggestive de toutes. Comme elle a directement trait aux premières Races, ce ne sera pas vraiment une digression.
Le sujet de la trilogie d'Eschyle dont deux parties sont perdues, est connu de tous les lecteurs instruits. Le demi-dieu [III 517] dérobe aux Dieux (aux Elohim) leur secret : le mystère du Feu créateur. En raison de cette action sacrilège, il est frappé par Cronos 1015 et livré à Zeus, le Père et le Créateur d'une humanité, qu'il aurait voulu voir intellectuellement aveugle et semblable aux animaux ; une Divinité Personnelle ne voulant pas voir l'HOMME "semblable à l'un de nous". Aussi Prométhée, le "Donneur du Feu et de la Lumière", est-il enchaîné sur le Mont Caucase et condamné à des tortures. Mais le Destin triforme (Karma), aux décrets duquel, comme le dit Titan, Zeus lui-même –
le premier constitué, ne peut échapper...
– ordonne que ces souffrances ne dureront que jusqu'au moment où un fils de Jupiter –
Oui, un fils surpassant en force son père (787).
..................................................................
Ce doit être l'un de tes [d'Io] propres descendants (791)
– naîtra. Ce "Fils" délivrera Prométhée (l'Humanité souffrante) de son don fatal. Son nom est, "Celui qui doit venir".
Sur l'autorité de ces quelques lignes, qui, comme toutes les phrases allégoriques, peuvent être déformées pour avoir presque tous les sens, en se basant sur les paroles adressées par Prométhée à Io, fille d'Inachos, persécutée par Zeus, quelques auteurs Catholiques ont édifié toute une prophétie. Le Titan crucifié dit :
Et croyance sinistre du passé, les chênes parlants
1014 De προ-µη̃τις, "prévoyance". Le professeur Kuhn, nous dit-on, dans les volumes déjà cités, les Dramas of Æschylus, considère le nom du Titan comme étant dérivé du sanscrit Pramantha, qui désigne l'instrument employé pour allumer le feu. La racine mand ou manth, implique l'idée du mouvement rotatoire et le mot manthâmi, employé pour désigner le processus d'allumage du feu, acquit le second sens d'arracher ; aussi trouvons-nous un autre mot du même groupe, pramatha, qui veut dire vol. C'est très ingénieux, mais n'est peut-être pas tout à fait correct ; en outre, cela renferme un élément très prosaïque. Dans la nature physique, les formes supérieures peuvent, sans aucun doute, se développer du sein des formes inférieures, mais il n'en est guère ainsi dans le monde de la pensée. Or, comme on nous enseigne que le mot manthâmi passa dans la langue grecque où il devint le mot manthanô, apprendre, – c'est-à-dire s'approprier la connaissance, d'où provient prometheia prescience, prévoyance – nous pouvons, en cherchant, découvrir une origine plus poétique au "porte-feu", que celle que comporte son origine sanscrite. La Svastica, le signe sacré et l'instrument servant à allumer le feu sacré, peut mieux expliquer cette origine. "Prométhée, le Porte-feu, est le Pramantha personnifié, poursuit l'auteur, et il a son prototype dans la Mâtarishvan Aryen, divin... personnage, étroitement associé à Agni, le dieu du feu des Védas." En sanscrit, Matih veut dire "compréhension" [intellect], c'est un synonyme de MAHAT et MANAS, qui doit jouer un certain rôle dans l'origine du nom : Pramatih [celui qui est intelligent] est le fils de Fohat et a aussi son histoire.
1015 Cronos, c'est le "Temps", de sorte que l'allégorie devient très suggestive.
Par lesquels, très clairement, en expressions sans ambiguïté,
Tu fus saluée comme l'illustre épouse de Zeus.
......................................................... (853).
.......................................... te caressant
Et ne te touchant que d'une main rassurante ; Alors tu porteras le sombre Epaphos, dont le nom Rappelle l'origine sacrée ........................... (870).
Divers fanatiques – des Mousseaux et de Mirville, entre autres – transformèrent cela en une prophétie parfaitement claire. Io, nous dit-on, "est la Mère de Dieu", et le "Sombre Epaphos" est le Christ. Mais celui-ci n'a pas détrôné son Père, sauf au point de vue métaphorique, si nous devons considérer Jéhovah comme ce Père ; le Sauveur Chrétien n'a pas [III 518] davantage Précipité SON Père dans les Profondeurs de l'Hadès. Prométhée dit (dans le verset 930) que Zeus sera humilié encore :
................................... il prépare des mariages Qui, du haut de son puissant trône, le précipiteront Dans les profondeurs du néant ; ainsi s'accomplira La malédiction de son père Cronos.......................
........................................... Qu'il reste assis,
Plein de confiance dans ses sublimes éclats de tonnerre Et tenant dans ses deux mains les traits ardents,
Car ceux-ci ne serviront à rien et il tombera.
Faisant une chute honteuse, impossible à supporter...
(980)
Le "Sombre Epaphos" était Dionysos-Sabasius, le fils de Zeus et de Demeter dans les Mystères Sabéens, au cours desquels le "Père des Dieux", revêtant la forme d'un Serpent, engendre avec Demeter, Dionysos
ou le Bacchus Solaire. Io, c'est la Lune et, en même temps, l'Eve d'une nouvelle race et il en est de même de Demeter – dans le cas actuel Le mythe de Prométhée constitue, en effet, une prophétie, mais elle ne se rapporte à aucun des Sauveurs cycliques qui ont fait périodiquement leur apparition dans divers pays, et au milieu de divers peuples, pendant leurs états transitoires d'évolution. Elle fait allusion au dernier mystère des transformations cycliques, an cours desquelles l'humanité, après avoir passé de l'état éthéré à l'état physique solide, de la procréation spirituelle à la procréation physiologique, se trouve maintenant entraînée en avant sur l'arc opposé du cycle, vers la seconde phase de son état primitif, pendant laquelle la femme ne connaissait aucun homme et la progéniture humaine était créée et non engendrée.
Cet état sera de nouveau son apanage et celui du monde en général, lorsque celui-ci découvrira et saura réellement apprécier les vérités que cache ce vaste problème des sexes. Ce sera comme "la lumière qui n'a jamais brillé sur mer ou sur terre" et qui doit arriver jusqu'aux hommes par l'entremise de la Société Théosophique. Cette lumière conduira en haut jusqu'à la véritable intuition spirituelle. Alors, comme on l'a écrit une fois dans une lettre adressée à un Théosophe :
"Le monde possédera une race de Bouddhas et de Christs, car le monde aura découvert qu'il est au pouvoir des individus de procréer, soit des enfants semblables à des Bouddhas, soit des Démons... Quand on saura cela, toutes les religions dogmatiques périront et, avec elles, les Démons." [III 519]
Si nous réfléchissons sur les développements successifs de l'allégorie et sur le caractère des héros, le mystère sera éclairci. Cronos est, cela va sans dire, le "Temps" dans sa course cyclique. Il avale ses enfants – y compris les Dieux personnels des dogmes exotériques. Au lieu de Zeus, il a avalé son idole en pierre, mais le symbole a grandi et n'a fait que se développer dans l'imagination humaine, pendant que l'humanité parcourait le cycle descendant, vers sa perfection physique et intellectuelle – mais non pas spirituelle. Lorsque son évolution spirituelle sera aussi avancée, Cronos ne sera plus trompé. Au lieu de l'image de pierre, il aura avalé la fiction anthropomorphe elle-même. Parce que le Serpent de la Sagesse, représenté, dans les Mystères Sabéens par le Logos anthropomorphisé, l'unité des Pouvoirs spirituels et physiques, aura enfanté dans le Temps
(Cronos) une progéniture – Dionysos-Bacchus, ou le "Sombre Epaphos", "l'Etre puissant", la Race qui le renversera. Où naîtra-t-il ? Prométhée, dans sa prophétie à Io, remonte jusqu'à son origine et son lieu de naissance. Io est la déesse lunaire de la génération – car elle est Isis et elle est Eve, la Grande Mère 1016. Il décrit la course errante (raciale), aussi clairement que les mots le permettent. Elle est obligée de quitter l'Europe et de gagner le continent d'Asie, où elle gagne la plus haute des montagnes du Caucase (v. 737) et le Titan lui dit :
Lorsque tu auras franchi l'eau, limite entre
Deux continents, faisant face au brûlant Orient... (810)
[III 520]
qu'elle doit se diriger vers l'Est, après avoir traversé le "Bosphore Cimmérien" et franchir ce qui est évidemment le Volga et aujourd'hui Astrakan, sur la Mer Caspienne. Après cela elle rencontrera "de furieux vents du nord" et de là elle gagnera la terre de la "légion Arimaspienne" (à l'Est de la Scythie d'Hérodote), le
Fleuve plein d'or de Pluton... (825)
Le professeur Newman suppose avec raison que cela veut dire l'Oural, attendu que les Arimaspi d'Hérodote sont "les habitants reconnus de cette région dorée".
1016 L'auteur de la traduction de "Prométhée Enchaîné" se plaint de ce que dans cet exposé de la course errante d'Io, "on n'arrive à rien qui soit d'accord avec ce que nous connaissons de la géographie" (p. 379). Il peut y avoir de bonnes raisons pour cela. Tout d'abord, c'est le voyage et la course errante de localité en localité, de la Racedu sein de laquelle doit sortir le "dixième" Avatar ou Kalki Avatar. Il appelle celle-ci la "race Royale née à Argos" (888), mais cet Argos n'a aucun rapport avec l'Argos de Grèce. Le nom dérive d'arg ou arka – la puissance génératrice femelle symbolisée par la Lune – l'Argha en forme de nef des Mystères, qui signifie la Reine du Ciel. Eustathius montre que dans le dialecte des Argiens, Io signifiait la Lune, tandis que l'Esotérisme l'explique comme étant l'Androgyne divin, le mystique Dénaire (10) : en Hébreu, Io est le nombre parfait ou Jéhovah. En Sanscrit, Arghya est la coupe des libations, le vaisseau en forme de nef ou de barque dans lequel on offre des fleurs et des fruits aux Divinités. Argbyanâth est un titre du Mahâ Chohan, qui veut dire "Seigneur des Libations" et Arghyavarsha, la "Terre des libations", est le nom de mystère de la région qui s'étend du mont Kailâsa presque jusqu'au Désert de Chamo d'où l'on attend la venue de Kalki Avatar. L'Airyâna-Varsedya [? Airyana-Vaêjô] des Zoroastriens lui est identique, en tant que localité. On dit maintenant qu'elle était située entre la Mer d'Aral, le Baltistan et le petit Tibet, mais dans les temps antiques sa surface était beaucoup plus grande et c'était le lieu de naissance de l'humanité physique, dont Io est la mère et le symbole.
Puis on trouve (entre les versets 825 et 835) une énigme pour tous les interprètes Européens. Le Titan dit :
De ceux-ci [Arimaspi et Grypes] ne t'approche pas ; tu atteindras ensuite
Une contrée limitrophe éloignée où habite une race basanée
Auprès des sources du Soleil, d'où vient le fleuve Æthiop ;
Suis ses rives jusqu'à ce que tu atteignes
Les puissants rapides, où des hauteurs de Bybline Le Neilos envoie des flots purs d'eau sacrée.
Là, Io reçut l'ordre de fonder une colonie pour elle et ses fils. Voyons maintenant comment ce passage est interprété. On dit à Io de se diriger vers l'Est jusqu'à ce qu'elle atteigne le fleuve Ethiops, qu'elle doit suivre jusqu'au point où il se jette dans le Nil : de là vient un doute. L'auteur de la traduction de "Prométhée Enchaîné" nous fait savoir que "suivant les théories géographiques des plus anciens Grecs" :
Cette condition était remplie par l'Indus. Arrien (VI, I) mentionne qu'Alexandre le Grand, lorsqu'il se préparait à descendre l'Indus [n'ayant vu des crocodiles que dans l'Indus et dans nul autre fleuve, sauf le Nil... ] crut avoir découvert les sources du Nil ; comme si le Nil, prenant sa source quelque part dans les Indes et coulant à travers beaucoup de pays déserts, perdrait ainsi son nom d'Indus, puis... traversait des pays inhabités et était appelé Nil par les Ethiopiens de ces régions et ensuite par les Egyptiens.
Virgile, dans la IVème Géorgique, se fait l'écho de cette erreur surannée. 1017
1017 Op. cit., p. 385, note.
Alexandre et Virgile peuvent s'être trompés tous deux considérablement dans leurs notions géographiques, mais la prophétie de Prométhée n'a nullement péché de la même façon – du moins dans son esprit Esotérique. Lorsqu'une [III 521] Race est symbolisée et que les événements qui se rattachent à son histoire sont présentés allégoriquement, on ne doit s'attendre à aucune précision topographique, en ce qui concerne l'itinéraire tracé pour sa personnification. Il se trouve cependant que le fleuve Ethiops est certainement l'Indus et que c'est aussi le Nil ou Nîlâ. C'est le fleuve né sur la montagne Céleste de Kailâsa, la demeure des Dieux – à 22.000 pieds au-dessus du niveau de la mer. C'était le fleuve Ethiops et il était appelé de ce nom par les Grecs, longtemps avant l'époque d'Alexandre, parce que ses rives, depuis Attock jusqu'au Sind, étaient peuplées par des tribus que l'on appelait généralement les Ethiopiens d'Orient. L'Inde et l'Egypte constituaient deux nations apparentées et les Ethiopiens d'Orient – les puissants constructeurs – sont venus des Indes, comme on espère l'avoir assez bien prouvé dans Isis Dévoilée 1018.
Pourquoi donc Alexandre et même le savant Virgile, n'auraient-ils pas employé le mot Nil ou Neilos en parlant de l'Indus, puisque c'est un de ses noms ? Jusqu'à présent, dans les régions qui entourent Kalabagh, l'Indus est appelé Nil, "bleu", et Nîlâ, le "fleuve bleu". L'eau y est d'un tel bleu foncé, que ce nom lui fut donné de temps immémorial ; une petite ville, située sur ses rives, porte le même nom et existe encore de nos jours. Il est évident qu'Arrien, qui écrivit bien après l'époque d'Alexandre et qui ignorait l'antique nom de l'Indus, a inconsciemment calomnié le conquérant grec. Nos historiens modernes ne sont guère plus sages en jugeant comme ils le font, car ils émettent souvent les déclarations les plus tranchantes en se basant sur de simples apparences, avec tout autant de désinvolture que leurs anciens collègues de jadis, à l'époque où aucune Encyclopédie n'était encore à leur disposition.
La race d'Io, la "vierge aux cornes de vache", est donc tout simplement la première race de pionniers Ethiopiens, amenée par elle de l'Indus jusqu'au Nil, qui reçut son nom en mémoire du fleuve de la mère- patrie des colons, aux Indes 1019. Aussi Prométhée dit-il à Io 1020 que le Neilos sacré – [III 522] le Dieu, non pas le fleuve – la conduira "jusqu'au pays aux trois angles", c'est-à-dire jusqu'au Delta, où ses fils ont pour mission de fonder "cette colonie éloignée (833 et sqq.).
1018 II, 390 et seqq.
1019 Alexandre le Grand, qui connaissait mieux Attock que l'Inde – car il n'entra jamais dans l'Inde proprement dite – n'aurait pu manquer d'avoir entendu appeler l'Indus, Nil et Nîlâ, près de ses sources. L'erreur – si erreur il y a – s'explique donc aisément.
1020 Ce qui prouve qu'Io est allégoriquement identique à Isis et à la Lune, c'est qu'elle porte des "cornes de vache". La Grèce reçut incontestablement cette allégorie des Indes, où Vâch – la "Vache Mélodieuse" du Rig Véda "de qui descend l'humanité" (Bhâgavata Pourâna) nous est représentée dans l'Aitareya Brâkmana comme poursuivie par son père Brahmâ, qui était mû par une passion illicite et qui la changea en Cerf. De là Io, refusant de se soumettre à la passion de Jupiter, devint "ornée de cornes". La Vache était dans tous les pays le symbole de la puissance génératrice passive de la nature, Isis, Vâch, Vénus – la mère de Cupidon, le prolifique Dieu de l'Amour, mais en même temps, celle du Logos, dont le symbole, chez les Egyptiens et les Indiens, devint le Taureau, comme le témoignent le Bœuf Apis et les Taureaux Hindous dans les plus anciens temples. Dans la Philosophie Esotérique, la Vache est le Symbole de la Nature Créatrice et le Taureau (son veau) l'Esprit qui la vivifie ou le "Saint Esprit" comme le démontre le docteur Kenealy. De là vient le symbole des cornes. Celles-ci étaient aussi sacrées chez les Juifs, qui plaçaient sur l'autel des cornes en bois de Setim et un criminel assurait son salut en les saisissant.
1021 Tuscul. Quæst., I, II, 20.
1022 Strom., I, II, Oper., I, 467, Ed. de Potter.
C'est là qu'une nouvelle race (les Egyptiens) commencera et une "race femelle" (873) qui "descend en cinquième ligne" du sombre Epaphos.
Au nombre de cinquante retournera à Argos.
Alors une des cinquante vierges faillira par amour et
........................ Portera une race royale dans Argos.
.................................................................
Mais de cette semence naîtront des héros intrépides, Archers fameux, qui me délivreront de ces maux.
Quand surgiront ces héros, le Titan ne le dit pas ; en effet, comme il le fait remarquer :
Pour exposer cela complètement, il faudrait un long discours.
Mais "Argos" est Arghyavarsha, la Terre des Libations des antiques Hiérophantes, d'où doit venir le Libérateur de l'Humanité et ce nom devint, bien des siècles plus tard, celui de sa voisine, l'Inde, l'Aryâvarta de jadis.
Nous savons par divers auteurs anciens, entre autres Cicéron 1021 et Clément d'Alexandrie 1022, que ce sujet faisait partie des Mystères Sabéens.
Ces derniers auteurs sont les seuls qui aient attribué à sa véritable cause le fait qu'Eschyle fut accusé de sacrilège par les Athéniens et fut condamné à être lapidé. Ils disent qu'Eschyle, qui n'était pas initié, avait profané les Mystères en les représentant dans ses Trilogies, sur une scène publique 1023, mais il aurait encouru la même [III 523] condamnation s'il avait été initié ; ce devait être le cas, car autrement il eût dû avoir, comme Socrate, un Daimon pour lui révéler le Drame allégorique secret et sacré de l'Initiation. En tout cas, ce ne fut pas le "père de la tragédie grecque" qui inventa la prophétie de Prométhée, car il ne fit que répéter, sous une forme dramatique, ce qui était révélé par les prêtres durant les mystères Sabéens 1024. Ces mystères constituaient une des plus antiques fêtes sacrées, dont l'origine est jusqu'à présent inconnue pour l'histoire. Les mythologues les rattachent à Jupiter et à Bacchus, par Mithras (le soleil, appelé Sabasius sur quelques monuments antiques). Ils ne furent pourtant jamais la propriété des Grecs, mais dataient de temps immémorial.
Le Traducteur du drame s'étonne qu'Eschyle ait pu se rendre coupable d'une telle
Contradiction, entre le caractère de Zeus tel qu'il est décrit dans "Prométhée Enchaîné" et tel qu'il est dépeint dans les autres drames. 1025
1023 Hérodote et Pausanias supposaient que la condamnation était due à ce qu'Eschyle, adoptant la Théogonie des Egyptiens, fit de Diane la fille de Cérès et non de Latone. (Voyez Ælian, Var. Hist., I, V, XVIII ; I, 433, Edition Gronov.) Mais Eschyle était initié.
1024 Les Sabaries étaient une fête périodique accompagnée de Mystères en l'honneur de certains Dieux ; une variante des Mystères Mithriaques. L'évolution entière des Races était représentée durant ces Mystères.
1025 Mrs A. Swanwick, op. cit.
C'est précisément parce qu'Eschyle, tout comme Shakespeare, fut et restera toujours le "Sphinx" intellectuel des siècles. Entre Zeus, la Divinité Abstraite de la pensée Grecque et le Zeus Olympien, il y avait un abîme. Ce dernier ne représentait pas dans les Mystères un principe plus élevé que l'aspect inférieur de l'intelligence humaine physique – Manas uni à Kâma ; tandis que Prométhée, l'aspect divin de Manas se fondant dans Bouddhi vers lequel il tend – était l'Ame divine. Zeus, toutes les fois qu'on le représente comme cédant à ses passions inférieures, est l'Ame Humaine et rien de plus – le Dieu jaloux, vindicatif et cruel dans son Egoïsme ou dans son "Je suis". Aussi Zeus est-il représenté comme un Serpent – le tentateur intellectuel de l'homme – qui, pourtant, engendre, au cours de l'évolution cyclique, "le Sauveur Homme", le Bacchus Solaire ou Dionysos – plus qu'un homme.
Dionysos ne fait qu'un avec Osiris, Krishna et Bouddha, le céleste Sage et avec le futur (le dixième) Avatar, le glorieux Christos Spirituel, qui délivrera le douloureux Chrestos, l'humanité ou Prométée, de son épreuve. Cela, disent les légendes Brahmaniques et Bouddhiques dont se font l'écho les enseignements Zoroastriens et maintenant ceux des Chrétiens (ces derniers, parfois seulement), cela se produira à la [III 524] fin du Kali Yuga. Ce n'est qu'après l'apparition de l'Avatar Kalki, ou Sosiosh, que l'homme naîtra de la femme sans péché. Alors Brahmâ, la divinité Hindoue, Ahura Mazda (Ormazd), la Zoroastrienne, Zeus, le Don Juan Gréco-Olympien, Jéhovah, le Dieux jaloux, repentant, cruel et tribal des Israëlites et tous leurs semblables dans le Panthéon universel de l'imagination humaine – s'évanouiront et disparaîtront dans les airs. En même temps qu'eux, s'évanouiront leurs ombres, les aspects sombres de toutes ces Divinités, toujours représentés comme leurs "Frères jumeaux" et leurs créatures, dans les légendes exotériques, leurs propres reflets sur Terre, dans la Philosophie Esotérique. Les Ahrimans et les Typhons, les Samaëls et les Satans, doivent être détrônés ce jour-là, lorsque toutes les sombres passions mauvaises seront vaincues.
Il existe dans la Nature une Loi Eternelle, une loi qui tend toujours à ajuster les contraires et à produire l'harmonie finale. C'est grâce à cette Loi de développement spirituel, se substituant au développement physique et purement intellectuel, que l'humanité sera débarrassée de ses faux Dieux et obtiendra finalement son Auto-rédemption.
Dans sa révélation finale, l'antique mythe de Prométhée, dont les prototypes et les antitypes se retrouvent dans toutes les anciennes Théogonies, se trouve dans chacune d'elles à l'origine même du mal physique, parce qu'il a sa place sur le seuil de la vie physique humaine. Cronos, c'est le "Temps" dont la première loi est que l'on observe strictement l'ordre des phases successives et harmonieuses, au cours du processus évolutif pendant le développement cyclique, sous peine d'un développement anormal, avec toutes les conséquences qui en découlent. Il n'était pas dans le programme du développement naturel que l'homme, tout animal supérieur qu'il soit, devînt tout de suite, au point de vue intellectuel, spirituel et psychique, le Demi-dieu qu'il est sur la Terre, alors que sa charpente physique reste plus faible, plus impuissante et plus éphémère que celle de presque tous les grands mammifères. Le contraste est trop grotesque et trop violent ; le tabernacle est trop indigne du Dieu qui l'habite. Le don de Prométhée devient ainsi une Malédiction, bien que connue d'avance et prévue par la Légion que personnifie ce personnage, comme le prouve bien son nom 1026. C'est en ceci que résident, en même temps, son péché et sa rédemption. En effet, [III 525] la Légion qui s'incarna dans une portion de l'humanité, bien qu'elle fût conduite à cela par Karma ou Némésis, préféra le libre arbitre à l'esclavage passif, la douleur et même la torture intellectuelle soi-consciente, "durant le cours de myriades de temps", à une béatitude instinctive, vide et stupide. Sachant qu'une telle incarnation était prématurée et ne faisait pas partie du programme de la Nature, la Légion Céleste, "Prométhée" se sacrifia pourtant afin d'en faire profiter, au moins, une partie de l'humanité 1027. Mais tout en sauvant l'homme des ténèbres mentales, elle lui infligea les tortures de la soi-conscience de sa responsabilité – résultat de son libre- arbitre – sans compter tous les maux qui font partie de l'héritage de l'homme mortel et de la chair. Prométhée accepta cette torture pour lui- même, puisque la Légion se mêla dès lors au tabernacle préparé pour elle et qui n'était pas encore terminé durant cette période de formation.
1026 Voyez la note (p. 516) concernant l'étymologie de προ-µη̃τις ou prévision. Prométhée le confesse dans le drame, lorsqu'il dit :
ô éther saint, brises aux ailes rapides...
Voyez ce que moi, un dieu, j'endure de la part des dieux
.......................................................................
Et pourtant que dis-je ? Clairement je sais d'avance
Tout ce qui doit arriver.................................
..............................................il convient que J'endure
De mon mieux ce qui est marqué, car je sais bien
A quel point est indomptable la force du Destin... (105) "Destin" est mis ici pour KARMA ou NÉMÉSIS.
1027 L'humanité est évidemment divisée en hommes animés par Dieu et en créatures humaines inférieures. La différence intellectuelle qui existe entre l'Aryen et autres nations civilisées et des sauvages comme les Insulaires des Mers du Sud, reste inexplicable avec toute autre hypothèse. Aucun degré d'instruction, ni des générations successives d'entraînement au sein de la civilisation, ne pourraient élever des spécimens humains tels que les Bushmen, les Veddhas de Ceylan et quelques tribus d'Afrique, jusqu'au niveau intellectuel des Aryens, des Sémites et des Touraniens. "L'Etincelle Sacrée" manque chez eux et ce sont eux qui représentent les seules races inférieures de notre globe, qui – grâce aux sages arrangements de la Nature qui travaille toujours dans ce sens – tendent à disparaître rapidement. En vérité, l'humanité est "du même sang", mais non pas de la même essence. Nous sommes, dans la Nature, les plantes de serre-chaude, artificiellement poussées et nous avons en nous une étincelle, qui n'est que latente chez eux.
L'évolution spirituelle étant incapable de suivre pas à pas l'évolution physique, dès que son homogénéité fut rompue par suite du mélange, le don devint la cause principale, sinon la seule origine du Mal 1028. Elle est très philosophique, l'allégorie qui nous montre Cronos maudissant Zeus pour l'avoir détrôné, durant l'Age d'Or primitif de Saturne, lorsque tous les hommes étaient des Demi-dieux et pour avoir créé une race physique d'hommes faibles et impuissants, comparativement, puis nous le montre livrant à sa vengeance (celle de [III 526] Zeus) le coupable qui avait dépouillé les Dieux de leur prérogative créatrice et qui, par suite, avait élevé l'homme à leur niveau, au point de vue intellectuel et spirituel. Dans le cas de Prométhée, Zeus représente la Légion des Progéniteurs Primordiaux, de PITIRIS, des "Pères" qui créèrent l'homme insensible et sans mental ; tandis que le divin Titan représente les Créateurs Spirituels, les Dévas qui "tombèrent" dans la génération. Les premiers sont spirituellement inférieurs, mais physiquement plus forts que les "Prométhéens" ; aussi ces derniers sont-ils représentés comme vaincus. "La Légion inférieure, dont le Titan bouleversa l'œuvre en ruinant ainsi les plans de Zeus" était, sur cette Terre, dans sa propre sphère et sur son propre plan d'action, tandis que la Légion supérieure était une exilée du Ciel, qui s'était trouvée prise dans les filets de la Matière. La Légion inférieure était maîtresse de toutes les Forces Cosmiques et Titanesques inférieures ; le Titan supérieur ne possédait que le Feu Spirituel et Intellectuel. Ce drame de la lutte de Prométhée contre le tyran et despote de l'Olympe, le sensuel Zeus, nous le voyons se dérouler journellement au sein même de notre humanité ; les passions inférieures enchaînent les aspirations supérieures au rocher de la Matière, en donnant naissance, dans bien des cas, au vautour du chagrin, de la douleur et du repentir. Dans chacun de ces cas, l'on voit une fois de plus – Un dieu... dans les fers, accablé d'angoisses :
Ennemi de Zeus, haï par tous,
un Dieu, privé même de cette suprême consolation de Prométhée, qui souffrait en se sacrifiant –
Parce qu'il [Je] aimait trop les hommes.
car le divin Titan est poussé par l'altruisme, mais l'homme mortel obéit à l'égoïsme dans tous les cas.
1028 La théorie philosophique de la métaphysique Indienne localise la Racine du Mal dans la différenciation de l'Homogène en Hétérogène, de l'Unité en Pluralité.
Le Prométhée moderne est devenu maintenant Epi-méthée, "celui qui ne voit qu'après l'événement", parce que l'universelle philanthropie du premier a depuis longtemps dégénéré en égoïsme et en adoration de soi- même. L'homme redeviendra le libre Titan de jadis, mais non pas avant que l'évolution cyclique ait rétabli l'harmonie rompue entre les deux natures – terrestre et divine ; il deviendra, après cela, imperméable aux Forces Titanesques Inférieures, invulnérable dans sa Personnalité et immortel dans son Individualité – mais cela ne peut se produire avant que tout élément [III 527] animal ait été éliminé de sa nature. Lorsque l'homme comprendra que "Deus non fecit mortem" 1029 [Dieu ne créa pas la mort], mais que l'homme l'a créée lui-même, il redeviendra le Prométhée d'avant la Chute.
Pour le symbolisme complet de Prométée et l'origine de ce mythe en Grèce, le lecteur est prié de se reporter au Volume IV, Section VI, "Prométhée, le Titan", etc. Dans cette partie, sorte de supplément à celle- ci, on donne tous les renseignements additionnels au sujet des dogmes qui susciteront les plus nombreuses controverses et seront mis en doute. Cet ouvrage est si hétérodoxe, lorsqu'on le compare aux modèles reconnus de Théologie et de Science moderne, qu'il importe de ne négliger aucune preuve tendant à établir que ces modèles usurpent souvent une autorité illégale.
1029 Sap., I, 13.