Ce qu'est la Magie en réalité
La Science Esotérique est, par-dessus tout, la connaissance de nos rapports avec nos Soi divins et de l'impossibilité où nous sommes, dans la Magie 237 Divine, de nous en séparer – ce SOI signifiant quelque chose de plus que notre propre esprit supérieur. Aussi, avant de commencer à donner des exemples de ces rapports et à les expliquer, il peut être utile de donner à l'étudiant une idée correcte de la signification complète de ce mot si mal compris de "Magie". Nombreux sont ceux qui désirent ardemment étudier l'Occultisme, mais il y en a bien peu qui aient une idée, même approximative, de la science elle-même. Or, bien rares sont ceux de nos étudiants américains et européens qui peuvent profiter des ouvrages Sanscrits, ou même de leurs traductions, attendu que celles-ci sont, en majeure partie, de simples voiles pour les non-initiés. Je me propose donc d'attirer leur attention sur des démonstrations tirées d'ouvrages des Néo- Platoniciens. Les traductions de ces ouvrages sont accessibles ; et pour éclairer ce qui est resté, jusqu'à présent, plein d'obscurité, il suffira d'indiquer une certaine clef qu'ils comportent. Ainsi, la Gnose, tant pré- chrétienne que post-chrétienne, servira admirablement notre but.
Des millions de Chrétiens connaissent le nom de Simon le Magicien et le peu que l'on dit de lui dans les Actes, mais bien peu ont jamais entendu parler des détails variés, fantastiques et contradictoires que la tradition enregistre au sujet de sa vie. Le récit de ses prétentions et de sa mort se trouve seulement dans les annales mi-fantastiques et pleines de parti-pris, dans les œuvres de Pères de l'Eglise, tels qu'Irénée, Epiphane et saint Justin, et surtout dans l'ouvrage anonyme [VI 169] qui porte le titre de Philosophumena. C'est cependant un personnage historique et le titre de "Magicien" lui fut donné et fut accepté par tous ses contemporains, y compris les chefs de l'Eglise Chrétienne, comme un qualificatif indiquant les pouvoirs merveilleux qu'il possédait, sans s'occuper de savoir s'il était considéré comme un Magicien blanc (divin) ou noir (infernal). A cet égard, l'opinion s'est toujours faite la servante des tendances païennes ou chrétiennes du chroniqueur.
237 Magie, Magia, veut dire, dans son sens spirituel secret, la "Grande Vie" ou vie divine en esprit. Sa racine est magh, comme l'indique le sanscrit mahat, le zend maz, le grec mégas et le latin magnus, mots qui, tous, signifient "grand".
C'est dans son système et dans celui de Ménandre, son élève et successeur, que nous trouvons ce que signifiait le mot "Magie" pour les Initiés de cette époque.
Simon, comme tous les autres Gnostiques, enseignait que notre monde avait été créé par les anges inférieurs, auxquels il donnait le nom d'Æons. Il ne mentionne que trois catégories de ces anges, parce qu'il était et qu'il demeure inutile, comme nous l'avons déjà expliqué, d'enseigner quoi que ce soit au sujet des quatre catégories supérieures, et il commence en conséquence, sur le plan des globes A et G. Son système se rapproche, autant que n'importe quel autre, de la Vérité Occulte, de sorte que nous pouvons l'étudier, ainsi que ses déclarations et celles de Ménandre au sujet de la "magie", afin de découvrir ce qu'ils entendaient par ce mot. Pour Simon, le point culminant de toute la création manifestée était le Feu. C'était, pour lui, comme pour nous, le Principe Universel, la Puissance Infinie, née du sein de la Potentialité cachée. Ce Feu était la cause primordiale du monde manifesté de l'être et était double, car il possédait un côté caché ou secret.
Le côté secret du Feu est caché dans son côté évident [ou objectif] et le côté objectif dérive du côté secret" 238 écrit-il, ce qui revient à dire que le visible est toujours présent dans l'invisible, et l'invisible dans le visible. Ce n'était là qu'une nouvelle manière d'exposer l'idée de Platon sur l'Intelligible (Noêton) et le Sensible (Aisthêton) et ce qu'Aristote enseignait au sujet de la Puissance (Dunamis) et de l'Acte (Energeia). Pour Simon, tout ce que l'on peut imaginer, tout ce sur quoi l'on peut agir, constitue l'intelligence parfaite. Le feu contenait tout. En conséquence, toutes les parties de ce Feu étant douées d'intelligence et de raison, sont susceptibles de développement par extension et par émanation. C'est là notre enseignement au sujet du Logos. Manifesté, et ces parties, dans leur émanation primordiale, sont nos Dhyân Chohans, les "Fils de la Flamme et du Feu", ou les Æons supérieurs. Ce "Feu" est le symbole du côté actif et vivant de la Nature Divine. Derrière lui se trouve "la Potentialité infinie dans la Potentialité" [VI 170] que Simon appelait "ce qui fut, est et sera", ou la stabilité permanente et l'immutabilité personnifiée.
238 Philosophumena, VI, 9.
Du sein de la Puissance de la Pensée, l'Idéation Divine passait ainsi à l'Action. De là, la série des émanations primordiales, au moyen de la Pensée donnant naissance à l'Acte, le côté objectif du Feu étant la Mère et son côté sacré étant le Père. Simon appelait ces émanations des Syzygies (une paire unie, ou couple), car elles émanaient deux par deux, l'une en qualité d'Eon actif, et l'autre en qualité d'Eon passif. Trois couples émanèrent de la sorte (ou six en tout, le Feu étant le septième) et Simon leur donna les noms suivants : "Mental et Pensée, Voix et Nom, Raison et Réflexion" 239, le premier de chaque paire étant mâle et le second féminin. Du sein de ces six Æons primordiaux, émanèrent les six Æons du Monde moyen. Voyons ce que dit Simon lui-même :
"Chacun de ces six êtres primitifs contenait toute la puissance infinie [de son père] ; mais elle n'était là qu'à l'état potentiel et non en Action. Cette Puissance devait être appelée à l'activité [ou conformée] par l'entremise d'une image, afin de se manifester dans toute son essence, sa vertu, sa grandeur et ses effets ; car c'est seulement alors que la Puissance émanée peut devenir semblable à son père, le Pouvoir éternel et infini. Si, au contraire, il demeurait simplement à l'état potentiel dans les six Puissances, et ne parvenait pas à prendre forme par l'entremise d'une image, le Pouvoir n'entrerait pas en action mais serait perdu." 240
239 Nous, Epinoia ; Phônê, 0noma ; Logismos, Enlhumesis.
240 Philosophumena, VI, 12.
241 Voyez Doctrine Secrète, sub voce.
En d'autres termes, il s'atrophierait, suivant l'expression moderne.
Or, que peut vouloir dire cela, si ce n'est que, pour égaler en tout la Puissance Infinie, les Æons doivent l'imiter dans son action et devenir à leur tour des Principes émanateurs, comme l'était leur Père, donnant la vie à de nouveaux êtres et devenant eux-mêmes des Puissances in actu ? Le résultat direct de cette puissance, c'est de produire des émanations, ou d'acquérir le don de Kriyâshakti 241, et c'est un effet qui dépend de notre propre action. Cette puissance est donc inhérente à l'homme, comme elle l'est aux Æons primordiaux et même aux Emanations secondaires, par le fait même de leur descente, et de la nôtre, du sein du Principe Unique Primordial, du Pouvoir Infini ou Puissance. Nous trouvons donc, dans le système de Simon le Magicien, que les six premiers Æons [VI 171] synthétisés par le septième, la Puissance Mère, entrèrent en Action et émanèrent à leur tour six Æons secondaires, dont chacun était synthétisé par son Père respectif. Nous lisons dans les Philosophumena que Simon comparaît les Æons à "l'Arbre de Vie". Simon dit dans la Révélation242 :
"Il est écrit qu'il y a deux ramifications des Æons universels, qui n'ont ni commencement ni fin, et qui émanent toutes deux de la même Racine, la Potentialité invisible et incompréhensible, Sigé [le Silence]. Une de celles-ci [de ces séries d'Æons] apparaît d'en haut. C'est la Grande Puissance, le Mental Universel [ou Divine Idéation, le Mahat des Hindous] ; elle organise toutes choses, et elle est mâle. L'autre vient d'en bas, parce que c'est la Grande Pensée (manifestée), l'Eon femelle, qui génère toutes choses. Celles-ci [les deux sortes d'Æons] se correspondant 243 entre elles, entrent en conjonction et manifestent la distance moyenne, [la sphère ou plan intermédiaire], l'Air incompréhensible qui n'a ni commencement ni fin 244."
242 La "Grande Révélation" (Hê Megalé Apophasis) dont Simon lui-même est supposé être l'auteur.
243 Littéralement, se faisant face par rands ou par paires.
244 Philosophumena, VI, 18.
Cet "Air" femelle est notre Ether, ou la Lumière Astrale Cabalistique. C'est donc le Second Monde de Simon, né du FEU, le principe de toutes choses. Nous l'appelons la VIE UNIQUE, la Flamme Intelligente et Divine, omniprésente et infinie. Dans le système de Simon, ce second Monde était gouverné par un Etre, ou Pouvoir, à la fois mâle et femelle, ou actif et passif, bon et mauvais. Cet Etre-Père, de même que le Pouvoir primordial infini, est aussi appelé "ce qui fut, est et sera", tant que durera le Cosmos manifesté. Lorsque cet Etre émana in actu et devint semblable à son Père, il n'était ni double ni androgyne. C'est la Pensée (Sigê) qui émana de lui, qui devint comme lui (le Père), étant devenue semblable à son image (ou antétype) ; le second étant maintenant devenu à son tour le premier (sur son propre plan ou sphère). Comme le dit Simon :
"Il [l'Auteur ou Père] était unique. Car l'ayant [la Pensée] en lui-même, il était seul. Il n'était cependant pas premier, bien qu'il fût pré-existant, mais se manifestant à lui-même, par lui-même, il devint second (ou double). Il n'était pas non plus appelé Père avant qu'elle [la Pensée] ne lui donnât ce nom. De même que lui-même se développant lui-même par lui-même, manifesta à lui- même sa propre Pensée, de même la Pensée, une fois manifestée, n'agit pas, mais voyant le Père, le cacha en elle-même, c'est-à-dire [VI 172] (cacha) ce Pouvoir (en elle-même). Et le Pouvoir [Dunamis, ou le Nous] et la Pensée [Epinoia] sont mâles-femelles. A cause de cela ils correspondent entre eux – car le Pouvoir ne diffère en aucune façon de la Pensée – ne faisant qu'un. Ainsi, dans les choses d'en haut, se trouve le Pouvoir, et, dans celles d'en bas, la Pensée. Il arrive alors que ce qui est manifesté par eux, bien que ne faisant qu'un, se trouve pourtant être double, l'androgyne ayant en lui la femelle. Ainsi est le Mental dans la Pensée, choses inséparables l'une de l'autre, qui, bien que ne faisant qu'un, sont pourtant doubles 245.
"Il [Simon] donne à la première Syzygie des six Pouvoirs et du septième qui est avec elle, les noms de Nous et Epinoia, Ciel et Terre : le mâle jette des regards d'en haut en pensant à sa Syzygie [ou épouse] car la Terre qui est en bas reçoit les fruits intellectuels qui sont descendus du haut du Ciel et qui sont allés à la Terre." 246
245 Ibid, VI, 18.
246 Ibid, I, 13.
Le Troisième Monde de Simon, avec sa troisième série de six Æons et le septième, le Père, est émané de la même façon. C'est la même note qui vibre dans tous les systèmes Gnostiques – le développement graduel, en descendant dans la Matière, par similitude, et c'est une loi dont on peut suivre la trace en remontant jusqu'à l'Occultisme primordial ou Magie. Pour les Gnostiques comme pour nous, ce septième Pouvoir, qui synthétise tous les autres, est l'Esprit qui plane au-dessus des eaux sombres de l'espace non différencié ; Nàrâyana ou Vishnou dans l'Inde ; le Saint-Esprit dans le Christianisme. Mais tandis que dans ce dernier la conception est rapetissée par des limitations qui nécessitent la foi et la grâce, la Philosophie Orientale nous le montre pénétrant chaque atonie, conscient ou inconscient. Irénée complète les renseignements au sujet du développement ultérieur de ces six Æons. Il nous enseigne que la Pensée, s'étant séparée de son père, et sachant ce qu'elle devait connaître grâce à son identité d'Essence avec lui, s'avança sur le second plan, ou plan intermédiaire, ou plutôt sur le Monde intermédiaire (chacun de ces Mondes étant composé de deux plans, le supérieur et l'inférieur, le mâle et la femelle, ce dernier assumant plus tard les deux Puissances et devenant androgyne), pour créer des Hiérarchies inférieures, des Anges et des Puissances, des Dominations et des Légions, de tous genres, qui, à leur tour, créèrent, ou plutôt firent émaner du sein de leur Essence, notre monde avec ses hommes et ses êtres, sur lesquels ils veillent. [VI 173] Il s'ensuit que tout être rationnel – appelé Homme sur la Terre – est de la même essence que les Æons supérieurs, les Sept primordiaux, et possède tous leurs attributs à l'état potentiel. C'est à lui qu'il appartient de développer, "en ayant devant les yeux l'image du très haut", par imitation in actu, la Puissance dont est cloué le plus élevé de ses Ascendants ou de ses Pères. Ici nous pouvons encore emprunter avec avantage une citation aux Philosophumena :
"Ainsi donc, suivant Simon, le [principe] plein de béatitude et impérissable, est caché dans toutes choses, potentiellement et non activement. C'est là "ce qui fut, est et sera", à savoir : ce qui fut, en haut, dans la Puissance ingénérable ; ce qui est, en bas, dans le courant des eaux, généré sous forme d'image ; ce qui sera, en haut, auprès de la Puissance infinie pleine de béatitude, s'il se fait semblable à cette image. Car, dit-il, il y en a trois qui se tiennent debout, et, sans ces trois Æons de stabilité, il n'y a pas d'ornement du générable, qui, suivant eux [les Simoniens], est né sur l'eau et, étant modelé suivant la similitude, est un (Eon) parfait et céleste, en aucune façon de penser inférieur à la Puissance ingénérable. Ils s'expriment ainsi : "moi et toi [sommes] un ; avant moi tu [étais] ; ce qui est après toi [c'est] moi". Ceci, dit-il, est la Puissance divisée entre haut et bas, se générant elle-même, se nourrissant elle-même, se cherchant elle-même, se trouvant elle-même ; qui est sa propre mère, son propre père, son propre frère, sa propre épouse, sa propre fille, son propre fils, unique parce qu'elle est la Racine de tout" 247.
Nous apprenons donc, au sujet de ce triple Eon, que le premier existe comme "ce qui fut, est et sera", ou le Pouvoir incréé, Atmân ; le second est généré dans les eaux obscures de l'Espace (le Chaos, ou Substance indifférenciée, notre Bouddhi), de, ou par l'image du premier, reflétée dans ces eaux, son image à Lui, qui plane au-dessus d'elles ; le troisième Monde (ou, dans l'homme, Manas) sera doué de tous les pouvoirs de cette image éternelle et omniprésente, s'il arrive à s'assimiler à elle. En effet,
"tout ce qui est éternel, pur et incorruptible, est caché dans tout ce qui est" potentiellement, sinon réellement. Et "toute chose est cette image, pourvu que l'image inférieure (l'homme) s'élève jusqu'à cette Source Suprême, cette Racine Suprême, en Esprit et en Pensée".
La Matière, en tant que Substance, est éternelle et n'a jamais été créée. C'est pourquoi Simon le Magicien, comme tous les [VI 174] grands Instructeurs Gnostiques et grands Philosophes Orientaux, ne parle jamais de son commencement. La "Matière Eternelle" reçoit ses différentes formes dans l'Eon inférieur, par les Anges Créateurs, ou Constructeurs, comme nous les appelons. Pourquoi donc l'Homme, héritier direct de l'Eon suprême, n'en ferait-il pas autant, par la puissance de sa pensée, qui est née de l'Esprit ? C'est là le Kriyâshakti, le pouvoir de produire des formes sur le plan objectif, par la puissance de l'Idéation et de la Volonté, en les tirant de la Matière invisible et indestructible.
247 VI, 17.
248 Chap. I, 5.
Jérémie 248 dit avec raison, en citant le "Verbe du Seigneur" :
"Avant de te former dans les entrailles, je te connaissais et avant ta sortie de la matrice, je t'ai sanctifié", car Jérémie représente ici l'Homme lorsqu'il était encore un Eon, ou Homme Divin, tant pour Simon le Magicien que pour la Philosophie Orientale. Les trois premiers chapitres de la Genèsesont aussi occultes que ce qui est donné dans l'Instruction n° 1. En effet, le Paradis terrestre est la Matrice, dit Simon 249 ; l'Eden, la région qui l'entoure. La rivière qui sortait de l'Eden pour arroser le jardin est le Cordon Ombilical ; ce cordon est divisé en quatre Canaux qui servent à la nutrition du Fœtus, c'est-à-dire les deux artères et les deux veines qui charrient le sang et l'air au fœtus qui, selon Simon, étant entièrement enveloppé dans l'amnios, est nourri par le Cordon Ombilical et reçoit l'air vital qui lui vient de l'Aorte 250. [VI 175]
249 Philosophumena, VI, 14.
250 Il y a d'abord les vaisseaux omphalo-mésentériques, deux artères et deux veines, qui disparaissent ensuite tout à fait avec "l'aire vasculaire" de la Vésicule Ombilicale d'où ils tirent leur origine. Quant aux "Vaisseaux Ombilicaux" proprement dits, ils sont formés par l'enroulement autour du Cordon de droite à gauche de la Veine Ombilicale qui porte au Fœtus le sang oxygéné de la mère et des deux Artères Ombilicales ou Hypogastriques, qui prennent le sang désoxygéné du Fœtus et le portent au Placenta ; le contenu des vaisseaux est donc l'opposé de ce qu'il est après la naissance. C'est ainsi que la Science corrobore la sagesse et le savoir de l'antique Occultisme, car, à l'époque de Simon le Magicien, nul homme, s'il n'était un Initié, ne connaissait quoi que ce fût au sujet de la circulation du sang ou de la Physiologie. Pendant que cette Instruction était sous presse, j'ai reçu du Dr Jérome A. Anderson deux petits opuscules imprimés en 1884 et 1888, et dans lesquels on trouve la démonstration scientifique de la nutrition du fœtus, telle qu'elle est décrite dans l'Instruction N° 1. En résumé, le Fœtus est nourri par osmose par le Liquide Amniotique et respire par le Placenta. La Science ne sait rien ou presque rien du Liquide Amniotique ni de son rôle. Si quelqu'un désire poursuivre l'étude de cette question, je lui recommande la brochure du Dr Anderson, intitulée : Remarks on the nutrition of the Fœtus (Wood et Co., New-York).
Ce qui précède est donné pour servir à élucider ce qui suit. Les disciples de Simon le Magicien étaient nombreux, et il leur enseignait la Magie. Ils avaient recours à ce qu'on appelle les "exorcismes" (comme dans le Nouveau Testament), aux incantations, aux philtres ; ils croyaient aux songes et aux visions et les provoquaient à volonté ; ils forçaient enfin les esprits des catégories inférieures à leur obéir. Simon le Magicien était appelé "le Grand Pouvoir de Dieu", littéralement "la Puissance de la Divinité qui est appelée Grande". Ce qui était alors appelé Magie, nous le nommons maintenant Théosophie, ou Sagesse divine, Pouvoir et Connaissance.
Son disciple direct, Ménandre, était aussi un grand Magicien. Irénée, entre autres auteurs, dit :
"Le successeur de Simon fut Ménandre, un Samaritain de naissance, qui atteignit les plus hauts sommets de la Science de la Magie."
Ainsi le maître et l'élève nous sont signalés tous deux comme ayant développé les plus hautes facultés dans l'art des enchantements, facultés dont le développement ne peut être obtenu "qu'avec l'aide du Diable", comme le prétendent les Chrétiens, et pourtant leurs "œuvres" étaient identiques à celles qui sont décrites dans le Nouveau Testament, où de tels résultats phénoménaux sont qualifiés de divins miracles, et par suite crus et acceptés comme venant de Dieu et faits par l'aide de Dieu. Mais la question qui se pose est celle-ci : ces soi-disant "miracles" du "Christ" et des Apôtres ont-ils jamais été plus expliqués que les œuvres magiques des soi-disant Sorciers et Magiciens ? Je dis : non, jamais. Nous autres Occultistes nous ne croyons pas aux phénomènes surnaturels et le mot "miracle" fait rire les Maîtres. Voyons donc quel est le sens réel du mot Magie.
La Magie a sa source et sa base dans l'Esprit et dans la Pensée, que ce soit sur le plan purement divin ou sur le plan terrestre. Ceux qui connaissent l'histoire de Simon ont le choix entre les deux versions, celle de la Magie blanche et celle de la Magie noire, dans l'union dont on a tant parlé, entre Simon et Hélène, qu'il appelait son Epinoia (Pensée). Ceux qui cherchaient, comme les Chrétiens, à discréditer un dangereux rival, parlaient d'Hélène comme d'une femme belle et réelle, que Simon aurait rencontrée à Tyr dans une maison mal famée, et qui aurait été, d'après ceux qui ont écrit sa biographie, la réincarnation d'Hélène de Troie. Comment était-elle donc la "Pensée Divine" ? On fait dire à Simon, dans les Philosophumena, que les Anges inférieurs, ou troisièmes Æons, étant si matériels, avaient en eux plus de méchanceté que tous les autres. Les pauvres hommes, créés par eux, ou émanant d'eux, [VI 176] avaient le Vice de leur origine. Qu'était-ce ? Tout simplement ceci : lorsque les troisièmes Æons prirent à leur tour possession de la Divine Pensée, grâce à la transmission du Feu en eux, au lieu de faire de l'homme un être complet, conformément au plan universel, ils retinrent d'abord hors de lui cette Etincelle Divine (la Pensée : sur la Terre, Manas) et ce fut la cause qui amena l'homme, dépourvu de sens, à commettre le péché originel, tout comme les Anges l'avaient déjà commis, bien des Æons auparavant, en refusant de créer 251. Enfin, après avoir retenu Epinoia prisonnière parmi eux, et après avoir infligé à la Pensée Divine toutes sortes d'insultes et de profanations, ils finirent par l'enfermer dans le corps, déjà souillé, de l'homme. Après cela, suivant l'interprétation donnée par les ennemis de Simon, elle passa d'un corps de femme dans un autre, au cours des siècles et des races, jusqu'au jour ou Simon la découvrit et la reconnut sous la forme d'Hélène, la "prostituée", la "brebis perdue" de la parabole. On représente Simon comme se donnant pour le Sauveur descendu sur la Terre pour le salut de son "agneau" et de ceux des hommes chez lesquels Epinoia est encore soumise à la domination des Anges inférieurs. On attribue ainsi à Simon les plus grands exploits magiques, grâce à son union sexuelle avec Hélène : par conséquent de la Magie Noire. En effet, les principales cérémonies de ce genre de Magie sont basées sur cette répugnante interprétation littérale de nobles mythes, parmi lesquels un des plus nobles fut ainsi inventé par Simon polir servir de marque symbolique à ses propres enseignements. Ceux qui les comprenaient bien savaient ce qu'il entendait par "Hélène". C'était le mariage de Nous (Atmâ-Bouddhi) avec Manas, l'union par laquelle la Volonté et la Pensée sont unifiées et douées de pouvoirs divins. En effet, Atmân dans l'homme étant d'une pure essence, le Feu Divin primordial (ou l'éternel et universel "ce qui fut, est et sera"), appartient à tous les plans, et Bouddhi est son véhicule, ou Pensée, générée par le "Père" et le générant à son tour, ainsi que la Volonté. Elle est "ce qui fut, est et sera", devenant ainsi, en conjonction avec Manas, mâle-femelle, dans cette sphère seulement. Aussi, lorsque Simon parlait de lui-même comme du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et d'Hélène comme de son Epinoia, on Pensée Divine, faisait-il allusion à l'union de son Bouddhi avec Manas. Hélène était la Shakti de l'homme intérieur, le pouvoir féminin.
251 Voyez Doctrine Secrète, vol. III, p. 214.
Or, que dit Ménandre ? Il enseigne que les anges inférieurs étaient les émanations d'Ennoia (la Pensée Artificieuse). C'était Ennoia qui enseignait la Science de la Magie et ce fut [VI 177] elle qui la lui communiqua, en même temps que l'art de conquérir les anges créateurs du monde inférieur. Ces derniers représentent les passions de notre nature inférieure. Ses disciples, après avoir reçu de lui le baptême (c'est-à-dire après l'Initiation), étaient réputés "ressuscités d'entre les morts" et "ne vieillissant plus", devenus "immortels" 252. La "résurrection" promise par Ménandre n'était, naturellement, qu'une indication du passage des ténèbres de l'ignorance à la lumière de la vérité, de l'éveil de l'immortel Esprit de l'homme à la vie interne et éternelle. C'est là la Science des Râja Yogis – la Magie.
Toutes les personnes qui ont lu la Philosophie Néo-Platonicienne savent combien ses principaux Adeptes, comme Plotin et particulièrement Porphyre, luttèrent contre la Théurgie phénoménale. Mais, entre nous, Jamblique, l'auteur du De Mysteriis, dévoile le sens réel du mot Théurgie et nous montre qu'il cache la véritable Science Divine du Râja Yoga.
La Magie, dit-il, est une Science élevée et sublime, Divine et exaltée au-dessus de toutes les autres.
C'est le grand remède à tout... Elle ne prend pas sa source dans le corps et n'est pas limitée à lui ou à ses passions, au composé humain ou à sa constitution ; mais tout est tiré par son entremise de nos Dieux supérieurs, nos Egos divins, qui se déroulent comme des fils d'argent, depuis l'Etincelle qui est en nous, jusqu'au Feu divin primordial 253.
252 Voyez Eusèbe, Hist. Eccles. lib. III, cap. 26.
253 De Mysteriis, p. 100, lignes 10 à 19 ; p. 109, fol. 1.
Jamblique exècre les phénomènes physiques produits, dit-il, par les mauvais démons qui trompent les hommes (les spectres des séances de spiritisme), et il met autant de véhémence à exalter la Théurgie Divine. Mais il enseigne que, pour pratiquer celle-ci, le Théurgiste doit impérativement être "un homme d'une haute moralité et une Ame chaste". L'autre espèce de Magie n'est employée que par les hommes impurs et égoïstes et ne renferme rien de Divin en elle. Aucun réel Vates ne consentirait jamais à trouver dans ses communications quelque chose provenant de nos Dieux supérieurs. Ainsi l'une (la Théurgie) est la connaissance de notre Père (le Soi Supérieur), l'autre la soumission à notre nature inférieure. L'une exige la sainteté de l'Ame, une sainteté qui repousse et exclut tout ce qui est corporel ; l'autre exige sa profanation (de l'Ame). L'une est l'union avec les Dieux (avec le Dieu de chacun), avec la source de tout Bien ; l'autre représente [VI 178] les rapports avec les démons (Elémentals) qui nous subjuguent et nous conduisent, pas à pas, à la ruine morale (à la médiumnité). Bref :
La Théurgie nous unit très puissamment à la nature divine. Cette nature s'engendre par elle-même, se meut en vertu de ses propres pouvoirs, soutient tout et est intelligente. Constituant l'ornement de l'Univers, elle nous invite à la vérité intelligible, à la perfection et à la transmission de cette perfection aux autres. Elle nous unit d'une façon si intime à toutes les actions créatrices des Dieux, suivant les capacités de chacun de nous, que l'âme, ayant accompli les cérémonies sacrées est consolidée dans leurs actions et leurs intelligences (celles des Dieux), jusqu'au moment où elle se plonge dans l'essence divine primordiale et se trouve absorbée par elle. Tel est le but des Initiations sacrées des Egyptiens 254.
254 De Mysteriis, p. 290, lignes 15 à 18 et seq., V et VII
255 Ibid., p. 100, sec. III, chap. III.
Or Jamblique nous enseigne comment doit être effectuée cette union de notre Ame Supérieure avec l'Ame Universelle, avec les Dieux. Il parle de Manteia qui est le Samâdhi, le plus haut état d'extase 255. Il parle aussi du rêve qui est la vision divine, alors que l'homme redevient de nouveau un Dieu. Par la Théurgie ou le Raja Yoga, l'homme atteint :
- Le Discernement prophétique par l'entremise de notre Dieu (l'Ego Supérieur de chacun de nous), qui nous révèle les vérités qui concernent le plan sur lequel il se trouve que nous agissons ;
- L'Extase et l'Illumination ;
- L'Action en Esprit (dans le Corps Astral ou au moyen de la Volonté) ; et enfin :
- La Domination sur les démons inférieurs dépourvus de sens (les Elémentals), grâce à la nature même de nos Egos purifiés. Mais cela exige la purification complète de ceux-ci. Et il appelle cela la Magie par l'Initiation à la Théurgie.
La Théurgie doit être cependant précédée par un entraînement de nos sens et par la connaissance du Soi humain dans sa relation au Soi DIVIN. Tant que l'homme ne s'est pas complètement familiarisé avec cette étude préliminaire, il serait oiseux d'anthropomorphiser ce qui est sans forme. Par "sans forme" j'entends les Dieux supérieurs et inférieurs, les Esprits ou Etres, tant super-mondains que mondains, qui ne peuvent être révélés aux débutants que par les Couleurs et les Sons. En effet, le haut adepte seul peut percevoir un "Dieu" sous sa véritable forme transcendante, qui pour l'intellect non entraîné, pour le Chéla, ne sera visible que par son Aura. Les visions de personnages, occasionnellement perçues par les sensitifs et les médiums, appartiennent à l'une des trois seules catégories qu'ils puissent voir :
- Corps astrals d'hommes [VI 179] vivants ;
- Nirmânakâyas (Adeptes bons et mauvais, dont les corps sont morts, mais qui ont appris à vivre dans les espaces invisibles, dans leurs personnalités éthérées) ;
- Spectres, Elémentaires et Elémentals, se livrant à des mascarades sous des formes empruntées à la Lumière Astrale en général ou à des images se trouvant dans "l'œil mental" des assistants ou du médium et qui se reflètent immédiatement dans leurs Auras respectives.
Après avoir lu ce qui précède, les étudiants comprendront mieux la nécessité d'étudier d'abord les correspondances entre nos "principes" – qui ne sont que les divers aspects de l'homme triple (spirituel et physique) – et notre Paradigme, les racines directes de ceux-ci dans l'Univers.
Pour atteindre ce but, il nous faut reprendre notre enseignement au sujet des Hiérarchies qui ont des rapports directs avec l'homme et se rattachent à jamais à lui.
Nous en avons assez dit pour établir que, tandis que pour les Orientalistes et les masses profanes la phrase – "Om Mani Padme Hum", veut simplement dire : "Oh le Joyau dans le Lotus", elle signifie, au point de vue Esotérique – "Oh, mon Dieu, qui êtes en moi". Oui, il y a un Dieu dans chaque être humain, car l'homme fut et redeviendra Dieu. La phrase fait allusion à l'union indissoluble entre l'Homme et l'Univers. Le Lotus est, en effet, le symbole universel du Cosmos, en tant que totalité absolue, et le Joyau est l'Homme Spirituel, ou Dieu.
Dans la précédente Instruction, nous avons indiqué les correspondances entre les Couleurs, les Sons et les "Principes", et ceux qui ont lu notre troisième volume se souviendront que ces sept principes dérivent de sept grandes Hiérarchies d'Anges ou de Dhyân-Chohans, qui sont, à leur tour, associés aux Couleurs et aux Sons et forment collectivement le Logos Manifesté.
Dans l'éternelle musique des sphères, nous trouvons la gamme parfaite qui correspond aux couleurs ; et dans le nombre, déterminé par les vibrations – des couleurs et des sons, qui "sert de base à toutes les formes et guide tous les sons", nous trouvons le résumé de l'Univers Manifesté.
Nous pouvons donner des exemples de ces correspondances en montrant les rapports existant entre les couleurs et les sons, et les figures géométriques 256 qui expriment les phases progressives de la manifestation du Cosmos.
256 Voir Vol. I, p. 41 et seq. Vol. III, p. 49 et seq.
Mais l'étudiant risque certainement de confondre si, en [VI 180] examinant les Diagrammes, il n'a soin de se rappeler deux choses :
- Que notre plan, étant un plan de réflexion et, par suite, un plan illusoire, les diverses numérations sont renversées et doivent être comptées de bas en haut. La gamme musicale va de bas en haut, commençant avec le Do grave, et finissant avec le Si, qui est bien plus aigu ;
- Que le Kâma Roûpa (qui correspond au Do de la gamme musicale), renfermant, comme il le fait, toutes les potentialités de la Matière, constitue nécessairement le point de départ sur notre plan. En outre, c'est bien par lui que commence la notation, sur chacun des plans, attendu qu'il correspond à la "matière" de chacun d'eux.
L'étudiant doit se rappeler, de plus, que ces notes doivent être rangées en cercle, de façon à faire ressortir que le Fa est la note centrale de la Nature. Bref, les notes de musique, ou les Sons, les Couleurs et les Nombres, vont de un à sept, et non de sept à un, comme le montre à tort le spectre des couleurs prismatiques dans lequel le Rouge est compté le premier : fait qui m'a obligé à classer au hasard les principes et les jours de la semaine, dans le Diagramme II. En tenant compte du nombre des vibrations, la gamme musicale et les couleurs s'élèvent dans l'ordre suivant, du monde de la Matière grossière à celui de l'Esprit :
Principes |
Couleurs |
Notes |
Nombres |
Etats de matière |
Chhâyâ, Ombre ou Double. |
Violet |
Si |
7 |
Ether |
Manas Supérieur, Intelligence Spirituelle. |
Indigo |
La |
6 |
Etat Critique, appelé Air en Occultisme. |
Enveloppe Aurique. |
Bleu |
Sol |
5 |
Vapeur |
Manas Inférieur ou Ame Animale. |
Vert |
Fa |
4 |
Etat Critique |
Bouddhi ou Ame Spirituelle. |
Jaune |
Mi |
3 |
Eau |
Prâna ou Principe Vital. |
Orange |
Ré |
2 |
Etat Critique |
Kâma Roûpa, Siège de la Vie Animale. |
Rouge |
Do |
1 |
Glace |
Ici encore on prie l'étudiant de chasser de son esprit toute correspondance entre les "principes" et les nombres, pour les raisons déjà données. On ne peut faire concorder la classification Esotérique avec la classification exotérique conventionnelle. L'une constitue la réalité ; la classification de l'autre est basée sur des apparences illusoires. Les principes humains, tels qu'ils sont énumérés dans le Bouddhisme ésotérique, ont été classés pour des commençants, de façon à ne pas jeter la confusion dans leurs esprits. C'était à moitié un voile. [VI 181]