"Les Vérités Éternelles", Le côté occulte de la Nature
Le mot Nature, dans son sens le plus large, (comme lorsque nous évoquons la Grande Nature, ou la Mère Nature), désigne l’ensemble de ce qui est extérieur — tout ce qui est en dehors de nous — les arbres, les grands espaces et le monde des hommes. En fait, nous ne savons pas ce qu’est cette Nature parce qu’elle nous présente un aspect qui est externe pour notre perception. Nous parlons des "lois de la nature" en constatant que cette nature procède toujours de manière ordonnée, sans que nous sachions, en fait, le moins du monde, d'où proviennent ces lois, ni en quoi elles reposent. Et pourtant la nature ne peut exister d'elle-même, par elle-même, ni venir du néant. Elle doit procéder d'une cause suffisante. Il doit y avoir nécessairement un côté occulte à la nature. Cette "cause suffisante" réside en fait sur les plans qui nous sont invisibles, mais qui constituent cependant une partie de la nature. Cet aspect invisible est la face productrice (l'aspect causal) de ce qui est visible pour nous ; et toutes les lois observées du côté visible existent en réalité dans ce côté invisible de la nature et procèdent de lui.
Essayons donc d’abord de comprendre ce qui constitue le fondement de la nature, ce qui la sous-tend tout entière. Ce n'est certainement pas un Créateur qui, par un coup de tête ou un commandement de sa part, fait que tous les êtres et toutes les choses dans la nature existent et se meuvent à leurs endroits respectifs. CE en quoi résident tous les pouvoirs, toutes les possibilités, toute infinitude, est plus grand que tout Être, aussi élevé soit-il. CELA est un Dieu impersonnel. Appelez, si vous voulez, le divin présent en chacun de nous l'Esprit, le Soi ou Dieu — à condition de ne pas le personnifier, le limiter ou l'enfermer dans une définition. Cet Esprit Unique n'est pas divisé, bien qu'il semble se diviser dans toutes les créatures, tout comme les rayons du Soleil ne sont que l'expansion du Soleil — ils ne se dissipent pas quand le Soleil disparaît de notre vue, mais ils reviennent s'absorber à la Source d'où ils sont issus. L'Esprit est ce qui vit, pense et perçoit, en chacun de nous, et ce qui souffre et se réjouit en chacun de nous. Tout ce que l'on peut connaître du Très-Haut — de Dieu — est ce que l'on connaît en soi-même, à travers soi-même et par soi-même. Aucune information extérieure ne peut nous apporter cette perception, mais uniquement cette réabsorption dans l'essence intime de notre être — le centre, le même centre que le Grand Centre d'où il est issu.
Les lois qui nous régissent ne sont pas imposées par un Être, ou plusieurs êtres, d’aucune sorte. Au centre de chaque être, quelle que soit sa forme, réside le pouvoir d’action. L’action entraîne toujours la réaction, et c’est cette Loi — ou Karma — qui opère de l’intérieur et de la même façon chez tous les individus, infailliblement et sans interruption. Ainsi, également, nous avons les actions et réactions collectives de tous les êtres, à tous les niveaux, qui constituent le monde et ses habitants. Ces actions collectives forment ce que nous appelons les lois des divers éléments et règnes, mais elles sont subordonnées à la Loi unique universelle de Karma, et comprises dans cette Loi qui, sous l'angle éthique, se traduit par "récolter ce qu'on a semé".
La Loi règne en tous temps, depuis le tout premier commencement, dans la matière radiante la plus éthérée. Cette matière fut élaborée par des êtres de tous les niveaux de chaque sorte — des êtres d’un monde qui a précédé le nôtre, où ils avaient parcouru leur trajectoire évolutive, avant d'être réabsorbés dans le Centre du Soi. Puis vint l’aube d’un autre Grand Jour de manifestation, et tous ces êtres se trouvèrent là de nouveau, avec toutes les potentialités, et les idées [directrices] ainsi que toute leur expérience passée — pour se manifester une fois de plus et continuer la tâche qu’ils avaient commencée. C’est l’action et la réaction dues à différentes classes d’êtres qui produit un changement et une solidification de la substance primordiale et ce processus se poursuit de stade en stade, jusqu'au plus bas des sept niveaux de l’échelle de la matière. Sur chacun de ces plans, les êtres se sont revêtus de sa substance particulière, et nous sommes ces êtres qui ont traversé tous les différents degrés de cette échelle. C’est pourquoi se trouve cachée en nous une nature (ou des natures) dont nous n'avions encore aucune idée. Il y a en nous quelque chose qui n’est pas évident pour nos modes actuels de perception. Et cependant ces natures invisibles nous appartiennent ; elles ne sont pas en dehors de nous ; nous ne les avons pas abandonnées quelque part sur l'échelle descendante des sept mondes. Cette nature extérieure que nous percevons tous par le corps, et à l'aide des sens physiques, n'est que l'enveloppe extérieure d'états et de niveaux de conscience cachés à la plupart des êtres humains.
Il y a un aspect occulte non seulement à notre propre nature mais aussi à celle de tous les êtres, comme cela aurait toujours dû nous apparaître si nous avions été plus observateurs, si nous avions pensé par nous-mêmes et n'avions pas pris pour argent comptant ce que d'autres nous ont transmis comme religion ou révélation. Il y a en effet des phases de notre vie quotidienne qui nous sont cachées. À l'état de veille, nous opérons dans notre corps, ce qui n’est plus le cas quand nous dormons, et ce côté de notre nature est caché à la plupart des gens. Même s’ils savent qu'ils rêvent, ils considèrent que l'état de rêve n'a pas de rapport avec les lignes qu'ils suivent quant ils agissent à l'état de veille ; ils ne comprennent pas que le rêve est un stade de transition précédant la pénétration dans notre nature spirituelle authentique, et aussi le retour à l'activité dans le corps. Généralement, l'état de rêve est une répétition des scènes ou expériences de la vie quotidienne, mais il arrive parfois que des choses nous arrivent en rêve qui sont très très loin d'une quelconque expérience vécue dans notre corps, et d'une nature entièrement différente. Souvent, les rêves qui se présentent au moment du réveil nous apportent un influx venant de notre soi le plus profond ; ils nous apportent certaines des expériences d’un passé très lointain. Nous avons des prémonitions, des pressentiments. Il nous arrive parfois que ce qu'on appelle des "initiations mineures" se produisent en rêve. Nous ne cessons jamais un seul instant d’être conscients, que ce soit en rêve, ou dans la pleine conscience des enveloppes plus subtiles de l’âme, au delà du rêve, ou encore dans l’état de " rêve " qui fait suite à la " mort " ; comment donc pourrions-nous jamais connaître la mort ?
Dans l'air qui (partout) nous environne se trouvent des vies invisibles pour nous. Il n’y a aucun espace, pas même un seul point, qui soit vide. Tout est vie. Tout est être, sous une forme ou sous une autre. À chaque inspiration, nous inhalons de petites vies, invisibles pour nous. Toutes ces vies sont des classes d’êtres obéissant à leurs propres lois, lesquelles ont trait aux actions et réactions qui leur sont spécifiques. Cependant, pour comprendre notre nature propre, il nous faut comprendre les lois qui opèrent sur les plans de l’être dont nous faisons partie et où aucun de nous n’est séparé des autres. Cette immense connaissance nous précède, elle est en nous et il faut la retrouver. Elle présente toujours une expression supérieure et une autre inférieure. Elle peut s’exprimer pleinement ou partiellement. La plénitude de notre expression se situe sur le plan le plus élevé ; son aspect incomplet se trouve sur le plan le plus bas. Nous avons touché le plus bas de l'échelle, avec, en plus, tout l'acquis de notre expérience ; mais pour accéder de nouveau à l'état d'où nous avons amorcé cette descente, sans faire de faux pas, il nous faut comprendre les vraies lois occultes qui régissent tous les différents stades de notre être.
Il y a des gens qui prétendent connaître ces lois occultes ; malheureusement, beaucoup de bien ne peut être apporté à un moment quelconque sans ouvrir les portes en même temps à une égale quantité de mal. Considérons par exemple le pouvoir de la dynamite : il peut être bénéfique pour l’homme s'il l’utilise à bon escient, mais, dans les mains d’une personne inclinée au mal, il peut nuire énormément à l’humanité. De même, une connaissance des lois occultes permet à l’homme de faire du bien, dans tout domaine de son choix, sans même lever le petit doigt, mais également de faire du mal. Le moyen par lequel ce bien ou ce mal est fait implique toujours une maîtrise d’êtres invisibles, qui sont les messagers de celui qui sait les utiliser et qui les comprend. Il lui suffit de libérer en lui-même le pouvoir qui pousse ces entités à remplir leur mission, quelle qu’elle soit. Tous ces pouvoirs, il convient de le souligner, sont latents dans les enveloppes de tout homme, et dans le corps humain, car ce corps qui est actuellement le nôtre est formé selon les mêmes lois que celles du système solaire, et il ne s’y trouve aucun organe qui ne corresponde avec l’une ou l’autre des régions célestes, avec l’une des enveloppes de l'âme ou des plans de conscience et avec tous les pouvoirs qui leur appartiennent. Il convient de nous demander si nous sommes prêts à accepter la responsabilité qu’implique une connaissance de ces lois. Pourrions-nous nous permettre d'avoir ces lois mises à notre disposition — des lois qui seraient mises en action par le simple effet de notre pensée et de notre sentiment ?.
Pour utiliser correctement ces pouvoirs, il faut avoir une attitude universelle, et tous nos actes doivent avoir comme base cette nature universelle. La Philosophie de la Théosophie nous propose d’adopter cette attitude et cette base universelles qui font apparaître que chacun est le SOI ; chacun observe tous les autres et reçoit de tous les autres ce qu'il peut en recueillir de compréhension et de connaissance ; chacun doit agir pour ce SOI et comme ce SOI, qui comprend tous les autres soi. En agissant de la sorte, toutes les idées d'égoïsme, de personnalité, de désir de récompense, ou de crainte de châtiment nous abandonnent ; nos défauts sont corrigés, et toute la force de ce que nous pouvons appeler la nature, dans son sens le plus large, est mise en activité ; tous les grands pouvoirs de la nature se déversent en celui qui agit dans cette optique et sur cette base. Nous en viendrons un jour à comprendre toutes les lois ; car, à mesure que nous avançons, elles se dévoilent d'elles-mêmes en nous. Nous découvrons que nous possédons en nous le pouvoir d'accomplir des choses par la pensée, le pouvoir de faire ceci ou cela à distance, le pouvoir de parler à distance, d'être entendu ou vu à distance, de connaître toute chose à distance. Pour celui qui travaille sur la nature, et avec elle, il n'est rien de caché ; préoccupé des intérêts de tous, il dispose de l'énergie de tous.
Les pouvoirs qu’a utilisés Jésus, selon le Nouveau Testament, et ceux de certains des anciens prophètes de l’Ancien Testament, n’étaient pas des pouvoirs "conférés par Dieu". Ils provenaient d'une connaissance des lois occultes, des lois secrètes de la soi-disant "nature". Les miracles de Jésus, où on l'a vu changer l'eau en vin, ressusciter les morts, agir là où son corps ne se trouvait pas, dérivaient tous de sa connaissance occulte. Tous ceux qui agissent selon cette ligne universelle apprennent comment fonctionnent ces lois. H.P. Blavatsky et W.Q. Judge firent des choses aussi étonnantes, et même plus merveilleuses que celles qu'on a attribuées à Jésus. Ils connaissaient les lois occultes de la nature. Ils connaissaient les opérations de la loi occulte en eux-mêmes et donc dans la nature de tous les autres êtres. Ces pouvoirs sont latents en chaque être humain — ils ne sont pas le fait de quelques grands personnages. H.P.B. et W.Q.J. connaissaient l'adage "Abandonne ta vie, si tu veux vivre". Si nous voulions bien mener la vie d’un être spirituel, toutes nos enveloppes — telles que le corps et toutes les autres — seraient à notre service. Possédant tout, nous n'aurions besoin rien. Nous serions capables de tout faire, mais nous n'emploierions aucun pouvoir pour nous-mêmes. De même qu’il nous faut vivre la Théosophie pour connaître sa doctrine, de même nous faut-il "vivre la vie" pour pouvoir connaître ses lois.
Les lois mineures qui permettent de produire des phénomènes sur notre plan ne représentent qu’une partie infime de l’étude de l’occultisme dans son aspect universel. Celui-ci embrasse en effet toutes les sciences, toutes les lois et tous les pouvoirs des êtres, tous les plans d’existence et tous les états de conscience qui ont jamais existé. Nous ne sommes jamais seuls. En permanence, dans l’une ou l’autre de nos enveloppes, corporelle ou non, nous sommes reliés à d’autres êtres, d’autres états et niveaux de matière et d’autres plans de conscience. En ce sens, nous ne pouvons jamais être perdus. Mais nous pouvons souffrir, et même énormément, en commettant une erreur sur notre véritable nature, et en agissant avec le pouvoir de notre nature spirituelle sur des lignes erronées, en créant ainsi, comme l'ont dit les Anciens "les noires corneilles de la mort et de la douleur" (Note 1). Il nous incombe de nous ressaisir pour nous engager sur le sentier qui nous est indiqué et l’éprouver par nous mêmes. C’est alors seulement que chacun connaîtra la vérité sur lui-même et tous les autres êtres ; alors seulement qu'il obtiendra le pouvoir que nous recherchons tous : celui d’être une force bénéfique de la nature.
Note
1) [Cf La Voix du Silence, p. 44 : "Mais si tu pétris de la balle avec la rosée de Mâyâ, tu ne pourras créer que de la nourriture pour les noires coreilles de la mort, les oiseaux de la naissance, de la décrépitude et de la douleur."]
Cahier Théosophique 185
© Textes Théosophiques, Paris
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