-
Détails
-
Catégorie : MEDITATION
-
Affichages : 8727
VERS LA RÉALITÉ INTÈRIEURE
18 novembre 1972, Bombay, Inde
22. Placez votre attention sur un événement passé, et même votre forme, ayant perdu ses caractéristiques présentes, sera transformée.
23. Ressentez la présence d'un objet devant vous. Ressentez l'absence de tous les autres objets. Puis, au-delà de la présence de l'un et de l'absence des autres, réalisez.
24. Quand vous éprouvez un sentiment envers quelqu'un, quelque soit ce sentiment, ne le projetez pas sur la personne en cause, mais restez au centre de vous-même.
SUTRA
L'un des plus grands adeptes du tantrisme de notre époque, George Gurdjieff, a dit que l'identification était Ie seul péché. Comme le prochain sutra que nous allons étudier concerne l'identification, il faut, avant tout, éclaircir ce que recouvre ce terme.
Vous avez été un enfant; maintenant, vous êtes un adulte. Votre enfance appartient au passé, mais vous vous identifiez toujours à elle. Vous ne pouvez pas imaginer que tous ces événements sont arrivés à quelqu'un d'autre. Vous ne pouvez pas en être le témoin. Vous faites un avec votre passé.
En réalité, maintenant ce n'est plus qu'un rêve. Et si vous pouvez voir votre enfance comme un rêve, comme un film qui passe devant vous, sans vous identifier avec elle, en restant en dehors, vous y gagnerez une subtile connaissance de vous-même.
Si l'enfance est un rêve, si votre passé est un rêve, ce que vous êtes, ce que vous faites aujourd'hui appartiendra au domaine du rêve le jour suivant. Essayez de devenir l'observateur de voire passé, de vous « désidentifier ». Et faites de même avec l'avenir. Vous pourrez alors observer votre présent très facilement, parce que vous saurez que ce que vous vivez aujourd'hui faisait partie de l'avenir hier et sera, demain, le passé. Mais votre rôle de témoin est en dehors du temps, il est éternel.
Quand, la nuit, vous faites un rêve, vous vous identifiez avec ce rêve; vous ne pensez pas, pendant que vous rêvez, que vous faites un rêve. Ce n'est qu'au matin, quand vous vous réveillez, que vous constatez que ce n'était qu'un rêve, et non pas la réalité. Pourquoi cela ? Parce que vous n'êtes plus dans le rêve, vous avez pris du recul.
Votre passé ressemble à un rêve. C'est un souvenir; rien de plus. Vous ne pouvez pas prouver maintenant que les souvenirs que vous avez gardés de votre enfance sont réels ou imaginaires. Il arrive d'ailleurs que l'on confonde la réalité et le rêve. En particulier les vieillards et les enfants.
Les jeunes enfants arrivent difficilement à différencier leurs rêves de la réalité. Ils pleurent en se réveillant s'ils ont rêvé qu'un de leurs jouets était cassé, par exemple. Vous aussi, vous pouvez être affecté par un rêve particulièrement marquant, alors même que vous vous êtes réveillé. Si, dans votre rêve, quelqu'un tentait de vous assassiner, vous vous réveillez le coeur battant, le front couvert de sueur, et, pendant quelques instants, la peur subsiste en vous. Il vous faut quelque temps pour comprendre que ce n'était qu'un rêve. Mais une fois que vous avez compris cela, la peur s'évanouit, parce que vous êtes hors du rêve.
Si vous parvenez il observer votre passé, à en prendre conscience sans y être impliqué, sans vous identifier à lui, il deviendra un rêve. Tout ce que vous pouvez observer de loin est un rêve.
Ainsi, Shankara et Nagarjuna peuvent dire que ce monde n'est qu'un rêve. Non pas qu'il le soit, mais Shankara et Nagarjuna en sont devenus les observateurs. Quand on dit que le monde est une « maya », une illusion, cela ne veut pas dire qu'il est irréel, mais qu'on peut en devenir l'observateur. Et, quand on peut l'observer, il perd sa réalité, il s'évanouit comme un rêve
Il a quelques jours, je relisais Les Confessions de Jean-Jacques ROUSSEAU, ou il est dit dans l'introduction, « quand viendra le jour du jugement dernier, je pourrai dire au Toul Puissant, il suffit de lire ce livre pour avoir tout de moi. » Mais quand on lit Les Confessions, on s'aperçoit vite que Rousseau se complaît à parler de ses péchés, de son immoralité. Il s'identifie totalement à ses péchés, même à ceux qu'il s'attribue sans les avoir commis. En fait, le seul péché qu'il ne reconnaît pas, c'est justement l'identification, publique péché pour ceux qui savent comment fonctionne l'esprit humain.
Quand, pour la première fois, il lu ses Confessions a un petits groupe d'intellectuels, Rousseau crut qu'il allait changer le monde. Mais on l'écouta en silence et tout le monde fut soulagé quand il termina sa lecture les vertus et les péchés de Rousseau ne les intéressaient pas.
Tout ce qui se passe dans le temps est un rêve, et si vous ne vous en détachez pas, vous ne saurez jamais ce qu'est la félicité. L'identification est souffrance; la non-identification est félicitée. Voilà l'objet de ce sutra
« Placez votre attention sur un événement passe, et même votre forme, ayant perdu ses caractéristiques présentes, sera transformée. »