LA RESPIRATION

L'être vivant respire. Aucommencement est le souffle. La respiration Zen n'est comparable à aucune autre. Elle vise avant tout à établir un rythme lent, puissant et naturel. Si l'on est concentré sur une expiration douce, longue et profonde, l'attention rassemblée sur la posture, l'inspiration viendra naturellement. L'air est rejeté lentement et silencieusement, tandis que la poussée due à l'expiration descend puissamment dans le ventre. On « pousse sur les intestins », provoquant ainsi un salutaire massage des organes internes. Les maîtres comparent le souffle Zen au mugissement de la vache ou à l'expiration du bébé qui crie aussitôt né. Ce souffle c'est le « am », la semence, c'est le pneuma, source de la vie.

L’ATTITUDE DE L'ESPRIT.
 La respiration juste ne peut surgir que d'une posture correcte. De même, l'attitude de l'esprit découle naturellement d'une profonde concentration sur la posture physique et la respiration. Qui a du souffle vit longtemps, intensément, paisiblement. L'exercice du souffle juste permet de neutraliser les chocs nerveux, de maîtriser instincts et passions, de contrôler l'activité mentale.

La circulation cérébrale est notablement améliorée. Le cortex se repose, et le flux conscient des pensées est arrêté, tandis que le sang afflue vers les couches profondes. Mieux irriguées, elles s'éveillent d'un demi-sommeil, et leur activité donne une impression de bien-être, de sérénité, de calme, proche du sommeil profond, mais en plein éveil. Le système nerveux est détendu, le cerveau « primitif » en pleine activité. On est réceptif, attentif, au plus haut point, à travers chacune des cellules du corps. On pense avec le corps, inconsciemment, toute dualité, toute contradiction dépassées, sans user d'énergie. Les peuples dits primitifs ont conservé un cerveau profond très actif. En développant notre type de civilisation, nous avons éduqué, affiné, complexifié l'intellect, et perdu la force, l'intuition, la sagesse liée au noyau interne du cerveau. C'est bien pourquoi le Zen est un trésor inestimable pour l'homme d'aujourd'hui, celui, du moins, qui a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Par la pratique régulière de za-zen, chance lui est donnée de devenir un homme nouveau en retournant à l'origine de la vie. Il peut accéder à la condition normale du corps et de l'esprit (qui sont un) en saisissant l'existence à sa racine.

Assis en za-zen, on laisse les images, les pensées, les formations mentales, surgissant de l'inconscient, passer comme nuages dans le ciel sans s'y opposer, sans s'y accrocher. Comme des ombres devant un miroir, les émanations du subconscient passent, repassent et s'évanouissent. Et l'on arrive à l'inconscient profond, sans pensée, au-delà de. Toute pensée (hishiryo), vraie pureté. Le Zen est très simple, et en même temps bien difficile à comprendre. C'est affaire d'effort et de répétition comme la vie. Assis sans affaires, sans but ni esprit de profit, si votre posture, votre respiration et l'attitude de votre esprit sont en harmonie, vous comprenez le vrai Zen, vous saisissez la nature de Bouddha.