SECTION XLIV
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"REINCARNATIONS" DE BOUDDHA
Chacune des parties du chapitre qui traite du "De-zhin Shegs-pa 102" (Tathâgata) dans les Commentaires représente un an de la vie du grand Philosophe, sous son double aspect d'instructeur public et privé, que l'on compare et que l'on commente. On y montre le Sage atteignant l'état de Bouddha à la suite de longues études, de méditations et d'Initiations, comme tout autre Adepte aurait eu à le faire, sans omettre un seul des degrés de l'échelle qui mène à l'ardu "Sentier de Perfection". Le Bodhisattva devint un Bouddha et un Nirvânî par ses efforts personnels et ses mérites, après avoir eu à subir toutes les dures épreuves que subissent les autres néophytes – et non pas en vertu de sa naissance divine, comme certains le pensent. Seule, l'entrée en Nirvâna, alors qu'Il vivait encore dans un corps physique sur cette terre, était due au niveau élevé qu'il avait atteint, dans des vies précédentes, sur la "Voie de Dzyan" (savoir, sagesse). Les facultés mentales et intellectuelles et les connaissances abstraites, accompagnent l'Initié dans sa nouvelle vie, mais il lui faut acquérir de nouveau les pouvoirs phénoménaux, en passant par toutes les phases successives. Il lui faut acquérir Rin-ch'en-na-dun ("les sept choses précieuses") 103, l'une après l'autre. Durant les périodes de méditation, aucun phénomène de ce monde du plan physique ne doit être admis à occuper son esprit ou traverser ses pensées. Zhine-lhagthong [VI 81] (en Sanscrit : Vipashya, méditation religieuse abstraite), développera en lui les plus merveilleuses facultés et cela salis son intervention personnelle. Une fois acquis les quatre degrés de contemplation, ou Sam-tan : concentration complète de la pensée (en Sanscrit : Dhyana), tout devient facile. En effet, dès que l'homme s'est entièrement débarrassé de l'idée d'individualité, a fondu son Soi dans le Soi Universel, en devenant, pour ainsi dire, la barre d'acier à laquelle sont conférées les propriétés inhérentes à l'aimant (Adi Bouddha ou Anima Mundi), des pouvoirs qui, jusqu'alors, dormaient en lui, sont éveillés, les mystères de l'invisible Nature sont dévoilés et transformés en Thonglam-pa (un Voyant), il devient un Dhyâni-Bouddha. Chaque Zung (Dhârani, mot magique ou mantra) de Lokottaradharma (le plus haut monde des causes) lui sera connu.
Aussi, après Sa mort extérieure, vingt ans plus tard, le Tathâgata, dans Son immense amour, dans Sa "compassion apitoyée" pour l'humanité égarée et ignorante, refusa le Paranirvâna 104, afin de pouvoir continuer à aider les hommes.
102 Littéralement, "Celui qui marche [ou suit] dans la voie [ou le sentier] de ses prédécesseurs".
103 Schmidt, dans Slanong Seetsen, p. 471 et Shlagintweit, dans Buddhism in Tibet, p. 53, acceptent ces précieuses choses littéralement, en les énumérant ainsi : "la roue, la pierre précieuse, le consort royal, le meilleur trésorier, le meilleur cheval, l'éléphant, le meilleur guide". Après cela, on ne peut guère s'étonner si, "outre un Dhyâni Bouddha et un Dhyâni Bodhisattva", chaque Bouddha humain est pourvu "d'une compagne, d'une Shakti" alors qu'en réalité "Shakti" n'est que le pouvoir de l'Ame, l'énergie psychique du Dieu comme de l'Adepte. Le "consort royal", le troisième des "sept dons précieux", amena très probablement le savant Orientaliste à commettre cette erreur risible.
104 Un Bodhisattva peut atteindre le Nirvâna et continuer à vivre, comme le fit Bouddha, et après sa mort il peut, soit refuser la réincarnation objective, soit l'accepter et l'employer librement pour le bien de l'humanité, qu'il peut instruire de différentes manières, tout en demeurant dans les régions Dévachaniques, dans le champ d'attraction de notre Terre. Mais une fois qu'il a atteint le Paranirvâna ou le "Nirvâna sans restes", la plus haute condition de Dharmakâya, dans lequel il demeure complètement en dehors de tous les états terrestres, il ne revient plus, jusqu'au commencement d'un nouveau Manvantara, puisqu'il est passé au-delà du cycle des naissances.
105 [T'ul-Ku ?], c'est l'incarnation volontaire d'un Adepte dans un corps vivant, que ce soit celui d'un adulte, d'un enfant ou d'un nouveau-né.
106 Kou-Soum, c'est la triple forme de l'état de Nirvâna avec ses durées respectives dans le "cycle du Non-Etre". Le nombre sept se rapporte Ici aux sept Rondes de notre Système septénaire.
On lit dans un commentaire :
Ayant atteint la Voie de la Libération [Thar-lam] des transmigrations, on ne peut plus accomplir Toulpa 105 car devenir un Paranirvânî, c'est fermer le cercle du Kou- Soum Septénaire 106. Il a fondu son Dorjesempa [Vajrasattava] d'emprunt dans l'Universel et ne fait plus qu'un avec lui.
Vajradhara, ou Vajrasattva (en Tibétain : Dorjechang), Dorjedzin ou Dorjesempa, est le régent ou Président de tous les Dhyân Chohans ou Dhyâni Bouddhas, le plus haut, le Suprême Bouddha ; personnel et pourtant jamais objectivement manifesté ; le "Vainqueur Suprême", le "Seigneur de tous les Mystères", "l'Unique sans Commencement ni Fin" – bref le Logos du Bouddhisme. En effet, comme Vajrasattva, Il est simplement le Tsovo (Chef) des Dhyânis Bouddhas ou [VI 82] Dhyân Chohans et la Suprême Intelligence du Second Monde, tandis que comme Vajradhara (Dorjechang), Il est tout ce qui a été énuméré plus haut. "Ces deux ne sont qu'un et pourtant sont deux" et au-dessus d'eux, il y a "Chang, la Sagesse Suprême, Non-manifestée et Universelle, qui n'a pas de nom." Comme deux en un Il (Ils) est le Pouvoir qui soumit et vainquit le Mal dès le début, ne lui permettant de régner que sur des sujets consentants sur terre, sans avoir aucun pouvoir sur ceux qui le méprisent et le haïssent. Esotériquement, l'allégorie est facilement comprise : exotériquement, Vajradhara (Vajrasattva) est le Dieu auquel tous les mauvais esprits jurèrent qu'ils n'empêcheraient pas la propagation de la Bonne Loi (du Bouddhisme) et devant qui tous les démons tremblent. Aussi disons-nous que ce double personnage joue, dans le Bouddhisme Tibétain canonique et dogmatique, le même rôle que celui qui est assigné à Jéhovah et à l'Archange Michel, le Métatron des Cabalistes Juifs. Ceci est facilement démontré. Michel est "l'Ange de la face de Dieu", ou celui qui représente son Maître. "Ma face ira avec toi" (en anglais "présence") devant les Israélites, dit Dieu à Moïse (Exode, XXXIII-14). "L'ange de ma présence" (en Hébreu, "de ma face") (Isaïe, LXIII-9), etc. Les Catholiques Romains identifient le Christ avec Michel, qui est aussi son férouer, ou sa "face" mystiquement. C'est exactement la position de Vajradhara, ou Vajrasattva, dans le Bouddhisme du Nord. En effet, ce dernier, dans Son Soi Supérieur comme Vajradhara (Dorjechang), n'est jamais manifesté, sauf pour les Sept Dhyân Chohans, les Constructeurs primordiaux. Esotériquement, c'est l'Esprit des "Sept" collectivement, leur septième principe, ou Atman. Exotériquement, on peut trouver autant de fables que l'on veut dans Kâla Chakra, le plus important ouvrage de la division Gyut [ou (D)gyu], partie du Kanjour, la division du savoir mystique [(D)gyul. Dorjechang (sagesse) Vajradhara, est réputé vivre dans le second Monde Aroûpa, ce qui le rattache à Métatron, dans le premier monde des purs Esprits, le monde Briathtique des Cabalistes, qui appellent cet ange El-Shaddai, l'Omnipotent et le Puissant. Métatron est en Grec (Messager), ou le Grand Instructeur. Michel combat Satan, le Dragon, et le défait, lui et ses Anges. Vajrasattva, qui ne fait qu'un avec Vajrapâna, le Vainqueur des Mauvais Esprits, défait Râhou, le Grand Dragon qui cherche toujours à dévorer le soleil et la lune (éclipses). "La Guerre dans le Fiel" est basée, dans la légende Chrétienne, sur le fait que les mauvais anges avaient découvert les secrets (la sagesse magique) des bons (Enoch) et le mystère de "l'Arbre de Vie". Quiconque lira les récits exotériques des Panthéons Hindou, et Bouddhiste [VI 83] – la version du second est tirée de celle du premier – constatera qu'ils reposent tous deux sur la même allégorie primordiale, archaïque, tirée de La Doctrine Secrète. Dans les textes exotériques (Hindou et Bouddhiste), les Dieux barattent l'Océan pour en extraire l'Eau de la Vie – l'Amrita – ou Elixir de la Connaissance. Dans tous deux, le Dragon en vole un peu et il est exilé du Ciel par Vishnou, ou Vrajradhara ou le Dieu principal, quel qu'en soit le nom. Nous trouvons le même récit dans le Livre d'Enoch et il est poétisé dans l'Apocalypse de saint Jean. Aujourd'hui, l'allégorie, avec tous ses ornements fantaisistes, est devenue un dogme !
Comme il en sera fait mention plus tard, les Lamaseries Tibétaines renferment de nombreux volumes, secrets et semi-secrets, qui exposent en détail les vies des grands Sages. Beaucoup des récits qu'ils renferment sont rendus confus à dessein et, dans d'autres, le lecteur est dérouté, à moins d'être averti, par l'emploi d'un seul et même nom pour désigner un grand nombre d'individus rattachés à la même lignée d'enseignement. Ainsi il y a une succession de "Bouddhas vivants" et le nom de "Bouddha" est donné à une série d'instructeurs. Schlagintweit écrit :
A chaque Bouddha humain appartient un Dhyâni- Bouddha et un Dhyâni-Bodhisattva et le nombre illimité des premiers, implique aussi un nombre également illimité des autres 107.
[Mais, s'il en est ainsi – et l'emploi exotérique et semi-exotérique de ce nom justifie cette affirmation – le lecteur doit s'en rapporter à sa propre intuition pour distinguer entre les Dhyânis Bouddhas et les Bouddhas humains et ne doit pas attribuer au grand BOUDDHA de la Cinquième Race tout ce que l'on attribue "au Bouddha" dans des ouvrages où, comme nous l'avons déjà dit, on use constamment de voiles.
Dans l'un de ces ouvrages, on trouve certains récits étranges et obscurs que l'auteur donne ici, comme il l'a déjà fait, sous son entière responsabilité, car quelques personnes peuvent découvrir un sens caché, sous des mots dont le sens apparent est trompeur] 108. [VI 84]
107 Buddhism in Tibet. p. 52. Ce même emploi générique, d'un nom se retrouve chez les Hindous avec celui de Shankarâchârya, pour ne citer qu'un exemple. Tous Ses successeurs portent Son nom, mais ne sont pas Ses réincarnations. Il en est de même des "Bouddhas".
108 [Les mots entre parenthèses sont ajoutés pour préparer aux récits suivants, qui sont présentés d'une façon confuse et contradictoire, et que H. P. B. avait sans doute l'intention d'élucider jusqu'à mi certain point car ils sont reproduits deux ou trois fois, suivis, chaque fois, de phrases différentes.
Il y est dit qu'à l'âge de trente-trois ans, Shankarâchârya, fatigué de son corps mortel, "s'en dépouilla" dans la caverne où il s'était retiré et que le Bodhisattva qui lui servait de personnalité inférieure fut libéré, chargé du fardeau d'un péché qu'il n'a pas commis.
On ajoute en même temps :
Quel que soit l'âge auquel on quitte volontairement son corps extérieur, on mourra, contre son gré, de mort violente, au même âge, dans sa vie suivante. – Commentaire.
Or, Karma ne pouvait avoir aucune prise sur "Mahâ Shankara" (nom donné à Sankara dans l'ouvrage secret) puisqu'en sa qualité d'Avatar, il n'avait pas d'Ego qui lui fut propre, mais un Bodhisattva, une victime se sacrifiant volontairement. Celle-ci n'était aucunement responsable des actions, fussent-elles bonnes ou mauvaises. C'est pourquoi nous ne saisissons pas le problème, puisque Karma ne peut agir injustement. Il y a un terrible mystère impliqué dans toute cette histoire, un mystère qu'aucun intellect non initié ne saurait jamais déchiffrer. Pourtant, il existe, ce mystère, et suggère tout naturellement cette question : "Qui donc était puni par Karma ?", question qui reste sans réponse.
Quelques siècles plus tard, Bouddha tenta, dit-on, une nouvelle incarnation dans ***, puis encore une autre, cinquante ans après la mort de cet Adepte, dans une personnalité à laquelle fut donné le nom de Tiani- Tsang. Aucun détail, ni aucun autre enseignement ou explication ne sont donnés. On se borne à déclarer que le dernier Bouddha avait à épuiser ce qui restait de son Karma, tâche à laquelle aucun des Dieux eux-mêmes ne saurait se soustraire et qu'il fut forcé de voiler encore plus complètement certains mystères, à demi révélés par lui – et, par suite, mal interprétés. Voici la traduction des termes employés 109 :
Le manuscrit est très confus, et tout ce qu'a dit H P. B. est rassemblé ici en mettant entre parenthèses les phrases ajoutées, afin de les distinguer des siennes. A. B.]
109 Il y a plusieurs noms indiqués seulement par des étoiles.
Né cinquante-deux ans trop tôt comme Shramana Gautama, fils du Roi Zastang 110, puis se retirant cinquante-sept ans trop tôt comme Mahâ Shankara, qui s'était fatigué de sa forme extérieure. Cet acte volontaire éveilla et attira le Roi Karma qui tua la [VI 85] nouvelle forme de *** à trente-trois ans 111, âge du corps qui avait été abandonné. Il mourut dans son (corps) suivant, à un peu plus de trente-deux ans, et dans le suivant à quatre- vingts ans, une Mâyâ, et à cent ans, en réalité. Le Bodhisattva choisit Tiani-Tsang 112, puis le Sougata devint Tsong-Kha-pa, qui devint ainsi De-zhin Shegs-pa [Tathâgata, "celui qui suit la voie et les manières de ses prédécesseurs"]. Le Béni pu faire du bien à sa génération comme ***, mais n'en put faire à la postérité, de sorte que comme Tiani-Tsang il ne se réincarna que pour les "restes" [de son précédent Karma, suivant notre interprétation]. Les Sept Voies et les Quatre Vérités furent une fois de plus cachées à tous les yeux. Le Miséricordieux réserva depuis lors son attention et ses soins paternels au cœur de Bodyoul, la pépinière des semences de vérité. Les "restes" bénis ont, depuis lors, inspiré les saints corps de bien des Bodhisattva humains et s'y sont reposés.
110 Le Roi Souddhodana.
111 Shankarâchârya mourut aussi à l'âge de trente-deux ans, ou plutôt disparut aux yeux de ses disciples, suivant la légende.
112 "Tiani-Tsang" est-il mis ici pour Apolonius de Tyane ? C'est une simple conjecture. Certaines choses de la vie de cet Adepte sembleraient cadrer avec cette hypothèse, d'autres sembleraient aller à son encontre.
On ne donne aucun autre renseignement et surtout on ne trouve dans le volume secret ni détails, ni explications. Tout y est ténèbres et mystères, car il n'a été évidemment écrit que pour ceux qui sont déjà instruits. Plusieurs étoiles rouges et flamboyantes y remplacent les noms, et la description de quelques faits qui y sont mentionnés est brusquement interrompue. La clef de l'énigme est laissée à l'intuition du disciple, à moins que les "disciples directs" de Gautama le Bouddha – "ceux qui doivent être reniés par Son Eglise dans le prochain cycle" – et de Shankarâchârya, ne consentent à ajouter quelque chose de plus.
La section finale contient une sorte de sommaire des soixante-dix sections – qui traitent de soixante-treize ans de la vie de Bouddha 113 et nous en résumons ainsi le dernier paragraphe :
Emergeant de …, le très excellent siège des trois secrets [Sang-Soum], le Maître à l'incomparable pitié ayant accompli sur tous les anachorètes le rite de … et chacun de ceux-ci ayant été tranché 114, comprit grâce à [la puissance de] Hloun- [VI 86] Choub 115 quel était son devoir suivant. Le Très Illustre médita et se demanda si cela viendrait en aide aux générations [futures]. Ce qu'il leur fallait, c'était la vue de Mâyâ dans un corps illusoire. Lequel ?... Le grand vainqueur des douleurs et des chagrins se leva et retourna à son lieu de naissance. Là, Sougata fut bien accueilli par les élus, car ils ne connaissaient pas Shramana Gautama. "Shâkya [le Puissant] est en Nirvâna... Il a donné la science aux Shouddhas (Shoûdra)", dirent ceux de Damze Youl [le pays des Brahmanes : l'Inde]... C'est pour cela que, mû par la pitié, le Tout Glorieux doit se retirer à …, puis apparaître [Karmiquement] comme Mahâ Shankara ; puis, par pitié, comme – et encore comme Tsong-Kha-pa... Car celui qui choisit dans l'humiliation doit descendre et celui qui n'aime pas permet à Karma de l'élever 116.
113 D'après l'enseignement Esotérique, Bouddha vécut en réalité cent ans, bien qu'ayant atteint le Nirvâna dans sa quatre-vingtième année, il a été considéré comme mort pour le monde des vivants. Voyez l'article intitulé "Shâkyamunni's Place in History" dans Five Years of Theosophy, p. 230.
114 C'est un rite secret qui se rattache à la haute Initiation et qui a la même signification que celui auquel Clément d'Alexandrie fait allusion, lorsqu'il parle du signe de reconnaissance qui nous est commun, "comme de trancher le Christ". (Strom. 13.) Schlagintweit se demande ce que cela peut être. "La représentation typique d'un ermite, dit-il, est toujours Celle d'un homme ayant de longs cheveux et une longue barbe... Un rite qui est très souvent choisi, bien que je sois incapable de dire pourquoi, est celui de Chod. ("couper" ou "détruire") dont la signification est un profond secret, jalousement gardé par les Lamas". (Buddhism in Tibet, p. 163).
115 Hloun-Choub est l'esprit divinatoire de l'homme, le plus haut degré, de voyance.
116 Le sens secret de cette phrase, c'est que Karma exerce son pouvoir sur l'Adepte autant que sur n'importe quel autre homme : "les Dieux" y échappent aussi peu que les simples mortels. L'Adepte qui, après avoir atteint le Sentier et conquis Son Dharmakâya, le Nirvâna d'où l'on ne revient pas jusqu'au nouveau grand Kalpa, préfère oser de Son droit de choisir une condition inférieure à celle qui Lui appartient, mais qui le laisse libre de revenir toutes les fois qu'il le juge convenable, et sous la personnalité qu'il Lui plaît de choisir, doit être prêt à courir toutes les chances d'un échec, peut- être, et à accepter une condition inférieure à celle qui constituait Son lot, certainement, car c'est une loi occulte. Karma seul est la justice absolue et est infaillible dans ses choix. Celui qui use de ses droits envers lui (Karma) doit en subir les conséquences, s'il y en a. Ainsi la première réincarnation (le Bouddha fut provoquée par Karma, et elle Le conduisit plus haut que jamais ; les deux autres furent "dues à la pitié" et ***.
Il est admis que ce passage est obscur et écrit pour le petit nombre. Il n'est pas permis d'en dire davantage, car les temps ne sont pas encore venus, où les nations seront prêtes à entendre toute la vérité. Les anciennes religions sont pleines de mystères et le seul fait d'en expliquer quelques- uns provoquerait sûrement une explosion de haine, suivie, peut-être, d'effusion de sang et pis encore. Il suffira de savoir que bien que Gautama Bouddha soit plongé dans le Nirvâna depuis sa mort, Gautama Shâkyamouni a pu avoir eu à se réincarner – car cette double personnalité interne est un des plus grands mystères du psychisme ésotérique. [VI 87]
"Le siège des trois secrets" se rapporte à un endroit habité par de hauts Initiés et par leurs disciples. Les "secrets" sont les trois pouvoirs mystiques connus sous les noms de Gopâ, Yasodhara et Ouptala Varna 117, que Csoma de Köros prit pour les trois femmes de Bouddha, comme d'autres Orientalistes ont pris pour Sa femme la Shakti (le pouvoir de Yoga) personnifiée par une divinité féminine ; ou encore Draupadi – un pouvoir spirituel aussi – pour l'épouse commune des cinq frères Pândava.
117 [Devrait se lire Outpala ou Oupalam, signifiant "un lotus bleu", varna veut dire couleur.]