LE MAGNETISME LUNAIRE


« La lune est le soleil des statues. »
Jean Cocteau

Après le magnétisme terrestre que les rationalistes pourront concevoir aisément qui niera en effet que deux aimants s'attirent ou se repoussent, intéressons-nous au magnétisme lunaire. Nous entrons à présent dans le monde de ceux qui acceptent l'existence d'une (ou plusieurs) forme d'esprit supérieure.
Cet univers est dit magique. C'est l'au-delà du miroir de la conscience, là où l'image devient magie.

Si les traditions le connaissent depuis fort longtemps, nos scientifiques commencent à peine à l'évoquer; ce qui laisse supposer que nous le comprendrons peut être bientôt...
Dans cette vision magique, nous établirons des distinctions, formelles, entre trois approches de la guérison : la sorcellerie ; le chamanisme ; la magie.

De la Terre à la Lune

De la Terre à la Lune (sommes-nous sur la piste de Jules Verne ?), de la Lune au Soleil... voilà les deux grands sentiers du magnétisme que nous appellerons désormais guérison.
Nous pénétrons donc dans l'univers magique, un univers très inquiétant pour certains scientifiques, adulé par les poètes qui nous en restituent quelques images. Seuls les occultistes et les initiés en partageaient jusqu'à présent la connaissance.

Peut-être le temps est-il venu d'accepter la réalité de ce monde psychique et d'explorer les lois qui le gèrent. Nous abordons là un champ où la guérison utilise désormais la puissance de l'imagination, de l'émotion, du rituel.

L'homme initié à ce niveau devient plus efficace pour guérir, mais il a encore besoin d'outils. Il passe par l'utilisation de l'image, de l'émotion, de la forme, ainsi que par la chicane des lois secrètes propres à cet univers (nous verrons qu'au niveau de la guérison solaire il n'a plus besoin d'outils: il est un initié qui les a incorporés).

Utilisons une comparaison très prosaïque: le magnétisme lunaire est une ligne téléphonique qui a besoin de passer par un standard; le magnétisme solaire, quant à lui, obtient directement la ligne... à ceci près que certains pensent avoir la ligne des anges quand ils n'ont que celle de leur inconscient! (Et si les anges étaient "inconscient"... ?)
L'homme qui a atteint cette qualité de rayonnement solaire ne passe pas inaperçu: il a intégré ses propres contradictions et la matière répond, en miroir, à son ouverture spirituelle.

Certains passent par une initiation, processus qui consiste à être introduit dans une chaîne de signifiants. Nous ne pouvons nous étendre sur ce sujet, mais les initiations ont toute un point commun: elles font traverser une mort symbolique. Cette épreuve ouvre le passage vers le monde psychique.
Tout cela sera compris lorsque la véritable dimension du symbole sera reconnue: le symbole est, de fait, le seul lien entre l'univers de l'esprit et celui de la matière, l'initié devenant la chair même de ce symbole.

Au niveau solaire, nous rencontrerons ces grands Maîtres qui ont fait évoluer la conscience planétaire. Ils ont une action sur la matière -nous dirions presque "à leur insu" bien au delà de leur volonté égotique.

Nous trouverons notamment ceux que nous appelons les saints, les prophètes, les hommes ayant atteint le plus haut degré de spiritualité, ceux qui ont incarné dans leur chair la transmutation dont l'humanité a besoin: Bouddha, Moïse, Christ, Mahomet...

Lorsque nous explorons les possibilités du magnétisme terrestre, nous pouvons mesurer une vibration: selon l'unité de mesure adoptée, les radiesthésistes et les géobiologues repèrent de fortes intensités, notamment dans certains hauts lieux spirituels. Les expériences de Harrold Burr, citées précédemment, mettent en évidence de façon scientifique un champ électrique, ou électromagnétique.

Dès lors que nous abordons le monde psychique, nous nous devons d'évoquer un autre niveau de conscience. Nous le voyons avec les états de transe, quels qu'ils soient.
La transe n'est pas un état de conscience altéré, c'est un "état de conscience élargi", un "ravissement au sens étymologique du terme", nous dit Jacques Donnars, "Un état dans lequel l'individu est arraché à sa vie et à sa conscience quotidienne et plongé brutalement dans un état de conscience totalement autre, incroyablement plus large et plus complexe, dont il est extrêmement difficile de rendre compte avec des mots, ce qui l'amène souvent à garder le silence, et dans lequel la notion habituelle d'espace et de temps se trouve profondément remise en cause, la bonne vieille conscience de veille n'étant là qu'un simple fétu au milieu de cet extraordinaire système à être qui se révèle à nous quand la porte du dedans s'est ouverte sur cet infini."'

Au niveau solaire l'énergie de guérison est complètement disponible, comme dans l'exemple de la guérison de la femme hémorragique par le Christ.

Ainsi que nous l'avons annoncé, ce monde psychique a sa trinité: aux pouvoirs de l'image, nous associons la Lune; aux pouvoirs de la forme, Mercure; aux pouvoirs de la force, Vénus.

Nous reprenons ainsi une symbolique millénaire: nous n'avons rien trouvé de plus puissant que les mythes grecs qui de surcroît sont ceux de notre culture pour exprimer les réalités de Psyché, notre âme.

Le principe lunaire

Le monde lunaire, univers des illusions, de La Maya, est à jamais sur le passage de celui qui cherche. Les illusionnés et les illusionnistes y sont chez eux: illusionnistes, nous en avons, tous, les moyens; illusionnés, nous le sommes plus encore. Mais illusion n'est pas synonyme de néant: dans cet univers, on crée, on fabrique, on agit, on peut être très efficace, et les pratiques de guérison classées sous cette rubrique nous le démontrent.
"La Transe, technique d'épanouissement", Ed. Homme et Connaissance.

Pourquoi "magnétisme lunaire" ?

La symbolique des planètes est, à notre insu, très influente dans notre monde occidental. Que l'on pense, par exemple, aux jours de la semaine qui représentent les sept planètes.
La Lune a une influence sur le plan énergétique et magnétique pur, ainsi que sur le plan symbolique. Nous connaissons le rapport entre les marées et la Lune; il est désormais établi, grâce aux statistiques, que les périodes de pleine Lune accentuent l'intensité des forces psychiques, ce qui se traduit chez les délinquants, par une tendance plus marquée au délit.

Nous savons aussi qu'à travers notre propre planète, de nombreuses méditations spirituelles ont lieu à ce moment précis. La Lune stimule les énergies psychiques, pour le meilleur ou pour le pire: "Au cours de cette période le voile de l'illusion est illuminé et il en résulte des hallucinations, des visions astrales, des besoins psychiques pressants, et cette série d'interprétations erronées de la vie, d'accents excessifs mis sur certains aspects, que nous appelons phobies, lunatisme, etc.
" La Guérison Esotérique", Alice A. Bailey, Ed.lucis, 1976

Son symbolisme représente une force aussi influente et formative que l'influence physique directe. La Lune, miroir du Soleil, est la maîtresse des illusions, le poète le sait, qui nous dit :"De deux choses Lune, l'autre c'est le Soleil"
(Jacques Prévert).Méditation sur les 22 Arcanes du tarot", opus cité.

Elle est le principe de la réflexion: "De même qu'elle réfléchit la lumière du Soleil, de même l'intelligence humaine réfléchit la lumière créatrice de la conscience. "

Elle sert de réflecteur à la lumière, mais elle ne peut être considérée par là même comme la lumière pure, la conscience pure: elle n'est qu'un maillon de la chaîne entre les énergies spirituelles et la matière.

Cette "matière psychique" est relativement dense. On peut l'imaginer comme du nuage. Les clairvoyants la perçoivent dans les auras, ou dans des manifestations particulières: fantômes, entités diverses (gnomes, elfes, lutins, ondines, dévas...). Peut-on parler de la réalité de ces présences ? Personne ne saurait répondre catégoriquement à cette question, mais on évoque couramment le très fort sentiment de réalité qui accompagne ces visions vécues dans un état de conscience élargi. On suppose qu'à ce moment précis, la conscience humaine met en image quelque chose qui ne relève pas uniquement du plan personnel. Un voile s'est levé la Papesse du tarot symbolise ce voile qui autorise à percevoir une autre réalité, grâce à notre fonction « d’imager ».

Cette matière dispose également d'une relative autonomie. Nos pensées personnelles, quand elles sont liées à nos émotions, créent une matière psychique que l'on appelle "forme pensée".

La plupart des êtres humains restent à l'état de veille ("Jagrat" en sanscrit) qui "correspond à la Terre, à la matière, au corps, à la vie quotidienne", même si leur pensée fait par fois une incursion dans la Lune (état de rêve, "Svapna" en sanscrit). C'est une intrusion sans conséquence, car ils n'en retirent rien. Mais nombreux sont ceux qui entreprennent quand même le grand voyage de la conscience.
Pierre Etévenon, "Les Aveugles éblouis", Ed. Albin Michel


Que se passe-t-il de la Terre à la Lune ?

La conscience s'est, en quelque sorte, extirpée de la matière, où elle était confondue dans un état de néant absolu.

Cette pesanteur absolue, cette conscience "plombée", est associée à un aspect de Saturne dans l'Arbre des Sephiroth, auquel on associe le plomb. Si nous descendons plus encore dans la lourdeur et le néant, alors nous rencontrerons peut-être cet état que Sri Aurobindo appelle "nescience" et que nous pouvons associer aux énergies plutoniennes.

Pluton est maître des enfers, et Sri Aurobindo parle de la nescience comme de la zone de l'inconscient la plus noire, proche d'enfers, du refus et de la négation, de la cruauté et des perversions. Cet état n'est que virtuel, bien sûr. En s'extirpant ainsi comme le veulent les lois de l'évolution, la conscience prend du recul par rapport à cette matière, c'est là son premier pas: ne plus se confondre avec.

La première phase est la fonction imaginaire. En thérapie, nous constatons qu'il y a somatisation chaque fois que l'accès a l'imaginaire est bloqué. Le niveau Terre correspondrait à la somatisation. Il y a début de guérison chaque fois que les maux peuvent se "dire" en image, c'est-à-dire accéder au niveau lunaire.
La première étape de la conscience est le passage par cette boîte à images: c'est-à-dire la capacité qu'ont les pulsions, les désirs, et les sensations à se transmuter en "matière-image". C'est la fonction même de la Lune dans l'Arbre des Séphiroth. Les images sont là de tout temps: personnelles ou transpersonnelles. En cela, nous nous opposons aux conceptions qui veulent que l'homme soit le seul créateur de ses images. L'homme accède, par sa boîte à images, à son inconscient et à l'inconscient collectif. Sa richesse personnelle est à la mesure de son contact avec son être intérieur. C'est ainsi que la créativité et l'inspiration des grands artistes nous semble être une synchronicité, une rencontre entre l'imaginaire de l'artiste et l'imaginai. Nous avons parlé de l'imaginai dans la deuxième partie de ce livre, peut-être pourrions-nous le présenter comme l'imaginaire du symbolique: l'imaginal est au symbole ce que l'imaginaire est au fantasme.

La guérison sera la seconde phase. La plupart du temps, la conscience aborde cet espace puis revient à la conscience de veille, sans acquis.
La guérison survient lorsque s'accomplit la fonction de conception de la Lune. Elle est l'Utérus cosmique, celle qui engendre, qui fait passer l'énergie à la masse et vice-versa.
Quand la conscience réussit à féconder les trois corpsphysique, émotionnel, spirituel comme dans les états de ravissement de la transe et de l'extase, les conditions sont réunies pour qu'une guérison ait lieu, c'est-à-dire une action des forces de l'esprit sur la matière.
A petit esprit, petite guérison; à grand esprit... grande guérison !

Un pont entre le corps et la psyché

Le psychothérapeute peut associer le magnétisme à ses derniers outils. Cela se pratique souvent, sous une dénomination différente car un tabou semble peser sur l'emploi de ce mot. Il n'empêche que le magnétisme fait fondre la cuirasse émotionnelle; il permet d'atteindre, sans cris et sans douleurs, les replis de la psyché où se réfugient les dernières résistances.

De nombreux thérapeutes font du magnétisme naturellement, car ce peut être aussi une simple qualité de présence. Un rayonnement que ceux qui ont su "descendre dans leur corps" et dans leurs émotions sont capables de générer.

Beaucoup de gens travaillent actuellement sur la "thérapie des facias", technique que nous devons à Monsieur Dany Bois .
Pour tous renseignements sur cette pratique, contacter Eric Salmon, 11, rue Jacques Dulud, 92200 Neuilly-sur-Seine.

Le thérapeute est en phase avec son patient dans un toucher léger des facias (ou tissus conjonctifs) qui participent à la régénération cellulaire et à l'élimination des toxines; il éveille ainsi les mémoires traumatiques que le corps, telle une éponge, conserve en lui.

Le corps parle, mais à l'aide d'un langage secret et timide; il nous faut tendre l'oreille pour percevoir ses appels. Toute intervention à ce niveau est très émouvante pour le thérapeute: il est en contact avec les lieux les plus intimes et les plus beaux de l'âme de son patient.

Peuvent également trouver leur place à ce niveau toutes les techniques de travail sur les états de transe provoqués naturellement ou artificiellement.

Les modernes

Les psychothérapies modernes utilisent des techniques d'imageries mentales, de TTT, ou bien des techniques de transe ou de chamanisme. Ce qui se pratiquait dans les Temples d'Esculape où ces techniques constituaient elles-mêmes la cure .
Transe- Terpsichore- Thérapie: méthode de transe psychologique adaptée à la société laïque, technique que nous devons au Docteur Akstein, psychiatre brésilien.
Consulter son livre : Un voyage à travers la transe", Ed. Tchou.

Les hallucinogènes ou autres plantes utilisées de façon rituelle comme chez les Indiens peuvent dénouer des conflits Psychiques et aider à la compréhension et à la guérison.
Stanislav Grof, créateur du mouvement des thérapies transpersonnelles, a fait un formidable travail de thérapie avec le LSD. "Les royaumes de l'Inconscient Humain", Stanislav Grof, Ed. du Rocher. Pour tout renseignements sur les thérapies transpersonnelles, consulter l'AFT, Association Française du Transpersonnel «. Ces techniques ont l'avantage de débloquer les résistances entre le conscient et l'inconscient et d'ouvrir l'intuition en donnant le contact avec le monde de la créativité lunaire. Actuellement, toute utilisation de drogues est devenue interdite.

Je recommanderai la plus grande prudence à l'égard des techniques qui induisent la transe par l'extérieur, que ce soit par des substances hallucinogènes ou par un apport d'énergie (ouverture des chakras), parce que les mécanismes sont par fois trop rapides pour que la conscience puisse les intégrer parfaitement. On comprend alors que des résistances à la guérison se soient installées: c'est tout un édifice qui est touché et que l'on risque de voir s'écrouler si l'on procède à une intervention trop rapide. Le contact avec cette zone lunaire de la psyché peut provoquer des états de bonheur, mais ces états sont parfois "limites" et "artificiels" pour ceux qui sont à l'extérieur du processus.

Ces techniques élèvent la fréquence vibratoire. Mais après la disparition de la source stimulatrice, le niveau vibratoire retombe s'il n'y a pas eu changement de conscience: nous sommes de nouveau confrontés à de nombreux états dépressifs.

Pour toute intervention de ce genre elle peut être très riche et très utile pour les funambules de la conscience, il faut s'assurer de l'équilibre psychique de la personne, ou bien assurer un rétablissement progressif.

Je recommanderai plutôt des techniques comme le "rebirth" ou la TTT, transe induite par la rotation du corps. Utilisées à l'origine par les mystiques soufis, ces techniques ont été reprises par des thérapeutes hors contexte traditionnel. Ces techniques induisent la transe par une transformation psycho physiologique à la mesure de celui qui la pratique. On a la transe qu'on mérite !

Elles sont sans danger psychologique pour peu qu'elles soient bien accompagnées. L'expérience est réalisée "par soi- même pour soi-même" ; l'inconscient corporel sait et connaît les limites de la personne. La guérison se fait donc progressivement sur le plan psychique, bientôt suivie par la guérison physique.

Les anciens

Traditionnellement, les anciens utilisaient ces techniques de guérison associées à un Esprit religieux. On peut distinguer plusieurs modes d'approche, qui sont fondamentalement les mêmes mais qui utilisent trois grandes caractéristiques du niveau psychique :
.le principe "image" ;
.le principe "force" ;
.le principe "forme".
Les trois grands modes d'approche de la guérison sont: la sorcellerie, le chamanisme, et la magie.
Ce cloisonnement est un peu artificiel car ces trois modes sont étroitement liés.

La notion de "forme pensée"

Nous saisissons maintenant combien la pensée liée à l'émotion s'incarne dans le corps. L'exemple le plus simple est l'émotion qui s'exprime physiquement quand un amoureux pense à l'élue de son Coeur. Cependant elle n'imprime pas que le corps: la pensée liée à l'émotion envoie aussi ses "gaz" dans l'atmosphère; c'est ce que l'on évoque quelquefois en parlant de "l'atmosphère" d'un groupe, d'un lieu, d'une maison.

Pensées et sentiments nourrissent ce phénomène à notre insu. Et, par voie de conséquence, ils le rendent plus efficient.

Voici le témoignage d'un événement vécu par Monsieur Singleton, au Coeur de l'Afrique où les croyances en sorcellerie sont si fortes qu'elles peuvent amplifier le processus, même si celui-ci n'est pas intentionnellement provoqué: "A Nguruka, la fête donnée à l'occasion du mariage d'un couple âgé a été interrompue lorsque nous avons appris que le bébé d'un couple voisin était à l'agonie. Des frictions et un peu d'aspirine - c'était tout ce que je pouvais faire - ont fait merveille et une heure plus tard le bébé était "miraculeusement" guéri. Pendant que je m'occupais de l'enfant, une vieille femme un peu ivre se tenait dans l'embrasure de la porte et gémissait: "C'est peut-être ma faute, mais tout ce que je voulais, c'était regarder le bébé". Les personnes qui se trouvaient là lui répétaient de ne pas se tracasser puisque ce n'était pas un cas d'uchawi (envoûtement). Il n'empêche qu'avant la fin de la journée, la famille de l'enfant avait déménagé à l'autre bout de la ville et la pauvre femme, avait remarqué du sang dans ses selles, avait dû s'aliter:" La réflexion de la vieille femme est extraordinairement touchante, car elle montre combien elle était finalement consciente de ses sentiments d'envie; une évidence que le couple avait également perçue puisqu'il jugea plus prudent de s'éloigner !

En thérapie, nous savons qu'une seule personne malade peut alourdir toute la dynamique d'un groupe. Gérer une telle situation demande une grande habileté. J'ai eu l'occasion d'observer l'extrême compétence de certains thérapeutes en ce domaine. On considère que le symptôme "appartient" au groupe et il est soigné. Dans cette dynamique, par des techniques de musique et de transe.

"Balayeurs de l'astral"

Le thérapeute ou chaman moderne prend à sa charge le poids de l'angoisse de celui qu'il soigne et qu'il aide à se "convertir" par un travail de conscience. Parfois, cependant, certaines modes n'acceptent plus la rigueur qui est inhérente à tout travail de ce genre (le rituel ou l'ascèse remplissaient autrefois cette fonction d’encadrement).
Tout ce qui surgit dans ce type de travail doit être recadré, structuré et non pas venir nourrir l'idéologie du moment. C'est entre autres la fonction du cadre espace-temps de la psychanalyse. De nombreux groupes, malheureusement, ne travaillent qu'à faire surgir les émotions... et finissent par se perdre dans cet univers psychique! Il en résulte un grand déséquilibre, le seul profit se réduisant à une satisfaction immédiate des sens.

Le thérapeute est un balayeur du bas astral. À être toujours en contact, avec ce qui ne va pas, il en perd parfois son simple bon sens. A s'entourer d'êtres qui le prolongent dans ce fonctionnement névrotique, il s'enferme lui-même dans les processus qu'il cherche à guérir chez les autres. Là est le danger des lieux de vie ou de tout espace communautaire à vocation de guérison, qui sont insuffisamment ouverts sur l'extérieur : ce sont des viviers de névroses et de psychoses mégalomaniaques.
Le thérapeute doit être en mesure de sortir de son univers lunaire. Il doit avoir d'autres sources de régénération. Il est donc nécessaire voire vital pour ces guides qui ont un dur travail, d'évoluer aussi en dehors de la sphère émotionnelle, de ne pas devenir objet de leur propre fonctionnement, et de rester maître de leur oeuvre. Ils ne feraient sinon que déplacer les détritus et se condamneraient, tel Sisyphe et son rocher, à nettoyer éternellement des détritus qui de toute façon reviendront toujours au même endroit dès qu'ils auront le dos tourné.

"Le mental, le vital, le physique sont à proprement parler des instruments pour l'âme et l'esprit; quand ils rouvrent pour eux mêmes, leurs produits sont ignorants et imparfaits; s'ils peuvent être transformés en instruments conscients du psychique et de l'esprit, alors ils atteignent leur réalisation divine: telle est l'idée contenue dans ce que nous appelons, dans notre yoga, la transformation.", comme le précise Sri Aurobindo."La Femme", extraits des oeuvres de Sri Aurobindo Ashram, Pondichéry.

Dans un travail de groupe de type chamanique, le mal de la personne est considéré comme le symptôme du groupe à ce moment précis, tout comme en thérapie familiale l'enfant malade est le symptôme de la famille.

Ce type d'approche est très intéressant, car il permet de "recadrer" le symptôme. Les thérapies auraient intérêt à inclure plus fréquemment ce genre de prise en charge, car la souffrance d'un individu est souvent une manière d'endosser un malaise plus large, une maladie de groupe, de culture... et Dieu sait si la nôtre est devenu perverse !

Cette énergie émotionnelle imprime donc un espace psy- chique très large. Les spécialistes l'appellent Akasha, ou mémoire de l'humanité. On parle aussi de loi Karmique, ou loi de causalité. Quand on crache en l'air, on reçoit sur le nez ce qu'on mérite: "Aujourd'hui la moisson est mûre, et l'humanité récolte ce qu'elle a semé."
Nous dit Alice A. Bailey. "La Guérison ésotérique" ed lucis,1976.
"Tous les événements qui surviennent actuellement dans le monde et qui affectent si puissamment l'humanité :
- création de beauté et d'horreur; modes de vie, de civilisation et de culture, préjugés favorables et défavorables, aboutissements scientifiques, expressions artistiques, et modalités innombrables par lesquelles l'humanité de par la planète colore l'existence
- tous sont des aspects d'effets ayant eu quelque part, à un certain niveau, en un certain temps, une cause due à des êtres humains agissant soit individuellement soit en masse. "

Chacun de nous est une infime partie d'une même et grande entité; nous sommes donc tous interdépendants et responsables les uns des autres. Par chance, le nombre des êtres et des petits groupes qui essaient de faire un peu de ménage dans leur environnement grandit sans cesse; mais l'illusion serait de faire le ménage de la maison sans avoir fait sa propre toilette.

En écrivant ces mots, je me souviens d'un rêve que fit une de mes patientes lorsqu'on l'initia à une technique de guérison: "J'étais dans une salle de bains; une grande et sympathique salle de bains, un peu à l'ancienne; je voulais être seule pour faire ma toilette et enfin commencer utilement ma journée. Mais il y avait des amis et connaissances, ou des proches de la famille, qui semblaient trouver cet endroit confortable pour poursuivre leur conversation informelle. Je m'égosillais pour qu'ils quittent ce lieu, mais ils n'entendaient rien..."

Les techniques de guérison

Définissons à présent les différentes pratiques magiques, telles que la sorcellerie, la magie et le chamanisme.
Toutes les trois utilisent les forces de l'imaginaire, qu'elles matérialisent de différentes manières. Ces forces ont des lois : causalité, réciprocité, harmonie. C'est plus particulièrement dans la mécanique que nous distinguons les différences.

Très brièvement, nous dirons que la sorcellerie objective l'imaginaire et le transfère sur des objets. Le chaman l'associe aux grandes forces des éléments et travaille aussi avec les esprits de la nature. le corps. la danse, tout ce qui touche à l'émotion. La magie, quant à elle utilise l'invocation d'Esprits et le rituel. En réalité, cette séparation est plus virtuelle que réelle: en effet. Les trois techniques utilisent l'imaginaire. Le rituel et l'invocation d'Esprits.

La sorcellerie objective ce que le psychologue nomme inconscient. "Les rites et les symboles sont des concepts que les cultures occidentales contemporaines s'attachent à prendre au sens métaphorique. Or en EEC (état de conscience chamanique), ceux-ci deviennent en réalité sont ce que le chaman stipule qu'ils représentent" nous dit Jeanne Achterberg. En procédant de la sorte. il fait quelque chose de grave: le chaman se met sous les lois de cet univers. Il prend d'énormes risques en même temps qu'il se rend plus efficace sur le plan des résultats matériels.

Le mythe de Faust illustre à merveille cet "échange" entre la masse et l'énergie, lequel ne se fait jamais sans sacrifice : Faust doit donner son âme au diable, car il fait un marché dans le monde de la matière. Le diable représente l'involution de l'énergie et sa coagulation dans la matière. Toute pratique magique utilise le sacrifice: mal compris, le sacrifice est une mutilation pour gagner autre chose, d'où l'esprit superstitieux de certaines personnes qui ne conçoivent la vie que sous cet angle d'échanges énergétiques, car ils ont peur. Or "sacrifice" veut dire "rendre sacré".

Il est d'usage de dire que l'efficacité de la sorcellerie n'est effective que pour les personnes qui partagent les mêmes signifiants. Tout porte à croire cependant que son impact réel peut déborder l'univers où les signifiants sont partagés; en effet, les forces de l'inconscient sont, à certains niveaux, communes à la Terre entière, tandis qu'un signifiant n'est qu'un signe partagé par des hommes d'une même culture.

Il importe de bien comprendre que ces forces conçues dans l'univers imaginaire agissent dans le monde réel. Toute la fonction lunaire est là, dans son aspect d'utérus cosmique où elle fait advenir l'énergie qu'elle engrange des Séphiroth supérieurs.

Bien entendu, les critères de validité de telles pratiques semblent parfaitement aléatoires face à la réalité: dans l'univers matériel, dont nous partageons tous le sentiment de réalité, si je lance un caillou en l'air, je m'attends et j'ai raison à ce qu'il retombe par terre... quand ce n'est pas sur mon nez !

Dans l'univers imaginaire, si je suis à l'origine d'une action, cette action devrait aboutir (travail de la visualisation créatrice). Mais toutes les forces de mon inconscient et de l'inconscient de celui que j'aide peuvent intervenir à mon insu et la contrarier. Or, ce que la matière a établi dans la forme et la densité que nous connaissons peut difficilement être bougé. C'est la raison pour laquelle nous crions "au fou" quand un malade atteint d'un cancer refuse l'opération sous prétexte de guérison spirituelle.
Ces forces inconscientes apparaissent à l'homme qui les explore comme structurées à la façon d'un hologramme: plus nous y pénétrons, plus elles se font complexes.
Tout "commerce", toute objectivation de ces forces n'est pas sans danger car elles mettent le chercheur sous leur dépendance.

Le chamanisme utilise le corps, la force des éléments et des élémentaux, ainsi que l'imaginaire, l'émotionnel.
Bien entendu, le chaman fait appel aux principes du rituel et du transfert, mais il est vénusien; dans la mesure où il fond les grandes forces extérieures à son corps et à son esprit, il y a osmose.

La magie passe plus facilement par le rituel, la structure, la forme, le symbole. La magie s'adresse plus à la sphère intellectuelle.
Le magicien ne chevauche pas ou ne se laisse pas chevaucher par les esprits. Il est plutôt du genre mercurien. Il n'expérimente pas les états de conscience. Il reste à l'extérieur du processus et manipule ces forces par le rituel et les symboles.

La sorcellerie utilise de préférence la substance psychique, le chamanisme le principe de la force et la magie le principe de la forme.
Pour ce qui est du sorcier, l'élaboration de ses techniques est plus proche de ce que l'on nomme en psychanalyse "processus primaire". Il fait appel aux couches les plus archaïques de la psyché. Il agit sur le corps éthérique en utilisant une partie détachée du corps: ongle, cheveu, liquide corporel... parce que cette partie, encore très reliée au corps réel énergétiquement ou métaphoriquement sert de support et redouble l'efficacité de son action. Ainsi cette femme Mbungu qui coupe, malgré les protestations des témoins, les cheveux et les ongles de sa soeur lors de son enterrement... pour fabriquer des remèdes !

La sorcellerie fait également intervenir la pensée analogique : notre bonne vieille sorcellerie de la Renaissance utilisait les boutons d'or pour guérir le foie parce que la bile est jaune, la noix pour soigner les céphalées parce que sa forme rappelle celle du cerveau, ou le crapaud pour favoriser les contractions utérines parce que l'utérus aurait la forme d'un crapaud.
Nous aurions tort de nous moquer, car notre cerveau archaïque est très sensible aux lois analogiques (processus primaire)... comme le savent parfaitement les publicistes !

Le sorcier utilise l'élan des pulsions et le corps éthérique. Chamanisme et magie se situent sur un plan où la pensée est plus élaborée. Mais, encore une fois, les trois peuvent être mêlés.
Tout guérisseur doit d'abord aller chercher la personne au niveau où elle se trouve. Si le malade est dans une sphère qui correspond à la sorcellerie, c'est celle-ci qui sera efficace. Il n'est pas question de porter de jugement.

Kashindyé, le guérisseur tanzanien

L'Occident a brûlé ses sorciers. Tant pis pour lui, cela le prive d'une "science" ancienne de la guérison; Tant mieux pour lui, cela lui évite les angoisses et les paranoïas que provoque la croyance à ces phénomènes.

Notre propos n'est pas de nier qu'ils existent, au contraire. Il s'agit plutôt de les envisager comme des phénomènes produits par les mécanismes subtils de notre Conscience.

Les témoignages, les expériences et les souvenirs de sorcellerie liés à l'Afrique sont très nombreux. Un chercheur américain des années 1920 a raconté son initiation au sein de la très secrète Loge des Hommes Serpents (Afrique de l'Est). Son témoignage est passionnant.

Nos Pères Blancs, en contact avec les réalités africaines, ont compris l'importance du guérisseur féticheur, et se sont souvent liés d'amitié avec lui. J'ai donc interrogé l'un de mes amis, le Révérend Père Fouquer, aumônier de la deuxième OB, confident pendant trois ans du général Leclerc, et Père Blanc. L'histoire dont il fait le récit se situe dans les années 1950-60, près du Lac Victoria :

"Kashindyé était le plus grand des féticheurs de la tribu des Basukuma : une tribu du peuple Bantou d'un million cinq cent mille âmes réparties en arc de cercle autour de la côte Sud du Lac Victoria, et sur deux cent cinquante kilomètres en profondeur vers le sud la plus importante des cent quarante ethnies que comprend la Tanzanie.
."Kashindyé habitait Myéguesi, un centre important à soixante kilomètres au sud de Mwanza, capitale des Basukuma, et l'une des principales villes de Tanzanie. Il avait vu se bâtir autour de sa "Thébai"de" un vaste hôpital que dirigeait une doctoresse hollandaise. Entre le féticheur et la doctoresse, les rapports étaient cordiaux et, quelle que fût la réputation de J'hôpital de la mission, en dernier recours les mêmes clients allaient consulter le féticheur. Même les chrétiens et les catéchumènes n'auraient jamais osé ne pas croire en son pouvoir; car si la doctoresse soignait bien ses malades, elle ne pouvait rien sur le monde au-delà du monde, celui où se trouvent les causalités essentielles et l'origine des angoisses. Ça, c'était le domaine de Kashindyé.

"Si bien qu'à l'hôpital, ils avaient pris l'habitude de faire avaler les médicaments sur place. Le soir, chez soi, on prenait avec grands soins les médicaments du féticheur. Ils avaient la supériorité de contenir; en plus de leur véritable valeur pharmacologique ces médicaments ont été analysés par des scientifiques et se révèlent contenir souvent des hautes teneurs en minéraux, des ingrédients tels que de la fiente de python, des morceaux de queue de lézard, de la poudre d'écaille de pangolin, dont l'aura magique était pour beaucoup dans la différence que faisaient les Africains. La doctoresse allait d'ailleurs volontiers bavarder avec lui, ce dont il tirait une grande fierté. Je manifestais moi aussi le désir de le rencontrer.

"Kashindyé possédait un vaste territoire à l'intérieur d'un bois d'épineux, de baobabs, et de cactus aux formes tourmentées et oppressantes. L'entrée de sa résidence était constituée par une porte étroite entre deux piliers servant de glissière à de lourds panneaux de bois. Ouvrir le passage était un travail de force! La première cours intérieure était totalement nue, trente mètres séparant la première enceinte de la seconde, moins haute. Même style d'ouverture, mais décalée par rapport à la première, car cet espace était rempli d'esprits mauvais qui ne demandaient qu'à s'infiltrer. Aussi le sol était-il encombré de talismans: on apercevait des calebasses sacrées servant aux libations, de minuscules cases où résidaient les Esprits des ancêtres et des Esprits protecteurs. La deuxième porte n'était franchie qu'en compagnie du MaÎtre.
"Le jour de ma visite (il regarda d'ailleurs d'un très mauvais oeil mon appareil photo), il était drapé dans une vaste toge colorée. Il m'apparut comme un homme de haute stature, âgé de quarante cinq à cinquante ans. Sa tête était coiffée de tresses au bout desquelles pendaient des talismans : coquillages divers, écailles, peaux. Il portait sur la poitrine le collier orné d'un coquillage de l'Océan Indien, symbole de la dignité et du pouvoir des rois et des grands féticheurs depuis des siècles (on en a retrouvés dans des tombes royales en Rhodésie, datant de 1400 ans).

II avait des bracelets aux bras et aux jambes, et quand il se déplaçait cela tintinnabulait de partout.

Maintenant que nous avions franchi la deuxième porte, nous débouchions sur une cour plantée d'arbres, cette fois. C'était un vrai labyrinthe, avec des haches dans les troncs d'arbre, dont le tranchant, qui ressortait de 20 cm, obligeait l'itinérant à se déplacer avec prudence. Les ennemis de Kashindyé appartenaient au monde invisible, il en éprouvait sensiblement la présence, et de temps à autre je le voyais faire un petit crochet comme s'il allait buter sur l'un d'eux, égaré sur le sentier. Cela devenait hallucinant, même pour l'esprit sceptique que j'étais censé être.

Alors que nous passions une troisième palissade et arrivions dans une petite cour bien entretenue avec sa case, plus vaste que la case que l'on voit habituellement dans les villages, il me fit entrer. Elle était remplie de meubles, de peaux de lions et de léopards. Il yen avait sur ce qui devait être son trône, en face duquel il me fit asseoir.
Il me laissa faire des photos, répondit brièvement à mes questions, m'énuméra quelques reliques et me reconduisit poliment, majestueusement et sobrement, vers la sortie.

"Kashindyé était un guérisseur: il faisait de la magie blanche. Naguère, dans l'Est Africain, un praticien soupçonné de magie noire était mis à mort dans de terribles conditions : on pouvait le crucifier au sol, ses filles ne trouvaient plus de mari... Le terrible dans l'affaire tenait au fait que dans ces conditions de vie difficiles, où la superstition trouvait des voies faciles et où la peur exacerbait les sentiments de méfiance, de Jalousie, de désir de vengeance, le soupçon devenait facile et les victimes étaient parfois innocentes.

En revanche, le guérisseur:; héritier d'une tradition, initié aux plantes et autres remèdes, était un personnage craint et respecté. Certains d'entre eux, aujourd'hui encore, sont initiés aux venins, et j'ai vu d'inexplicables réussites chez les guérisseurs de la société des Hommes Serpents.
11 y a guérisseurs, féticheurs, devins et forgerons... "Le féticheur saura vous fabriquer le bracelet de peau, la ceinture, ou le collier qui vous protégera. J'ai connu comme cela un féticheur spécialisé dans la protection contre les lions. Un matin, on découvrit ses restes mangés par un lion. On fut étonné, mais on l'expliqua en disant que le lion ne savait pas à qui il s'attaquait.

"La sorcellerie englobe tout ce qui touche à l'homme: on ne cultive pas avant que le sorcier n'en donne la permission. Chaque acte important de la vie mariage, chasse, construction, cultures, sexualité est précédé de sacrifice (un taureau noir pour la pluie, en rapport avec la noirceur des nuages, par exemple), de bénédiction, d'oblations. Il y a aussi de nombreux tabous: on ne mange pas de l'animal dont la peau rappelle la lèpre, ou toute autre source de négativité...

"Comment devient-on sorcier ? "On devient un homme des relations avec "au-delà des apparences" par hérédité. Le sorcier choisit le disciple qu'il instruira de ses secrets dans sa famille. Il peut aussi enseigner un élève qui en manifeste le désir. L'instruction prendra des années, l'initiation est progressive: on lui enseignera la technique des rapports avec les solliciteurs, une connaissance exhaustive du monde des esprits de tel clan ou tel peuple, l'histoire et la généalogie des rois, des grands féticheurs, leurs lois, leurs conseils, leurs règles de vie, leur ascétisme.

"Outre cette formation dans l'ordre traditionnel du ministère est donnée aussi une initiation que l'on peut considérer d'ordre extatique, pour maîtriser le passage du monde des apparences au monde au-delà des apparences. Comme le mystique, le sorcier manifeste sa relation avec le monde des Esprits par un goût du silence, de la solitude, par la singularité de son comportement. Il est possédé par d'autres soucis que de montrer ce qu'il sait faire.

"Mais revenons à Kashindyé. Lors de ma visite, j'ai pu remarquer combien son ministère l'obligeait à se barder de protections. Un jour, il tomba malade et dut solliciter les soins de son amie la doctoresse. Elle l'hospitalisa, à son grand désespoir car il se retrouvait dans ce nouvel univers sans ses protections habituelles. La doctoresse concéda quelques armes spirituelles dans la chambre. Il fallut l'opérer! Une opération bénigne, mais il fallait déjà l'affronter; quand, pour les besoins de l'asepsie, il se retrouva nu sans la protection de ses Le voyant si fragile et si malheureux, son amie autorisa deux bracelets, probablement aseptisés, en sorte que Kashindyé se coucha sur la table d'opération et s'endormit bienheureux. Il se réveilla, guéri, et rentra chez lui.

"Malgré tout, longtemps après, le grand féticheur pour qui rien n'était vrai "qu'au-delà des apparences", mourut chrétien…

La morale de cette histoire ne nous appartient pas, mais il est intéressant de voir combien l'univers du sorcier, éduqué pour être le guerrier qui combat les formes pensées négatives, véritables forces dont il a pris conscience tout au long de son initiation, est difficile et angoissant s'il ne peut pas se protéger avec les talismans, véritables contrepoisons, qu'il a soigneusement conçus. Kashindyé n'avait pas peur de la mort : il craignait bien davantage le rapt des Esprits mauvais.

L'esprit de cet homme était formé de telle façon qu'il était obligé, par le monde des Esprits, de fonctionner comme quel- qu'un qui est atteint d'une névrose obsessionnelle.
Remarque importante: le véritable névrosé ne soigne pas, il se fait soigner...