« La contemplation et la concentration sont des processus mentaux. Comment un processus mental peut-il nous faire atteindre un état de non- pensée ?

 
La question est très intéressante: le Mental demande comment il peut aller au-delà de lui-même. Comment un processus mental peut-il mener à la dissolution du. Mental ? Cela semble contradictoire.
Essayons de comprendre. Lorsque le Mental est là, que se passe-t-il ? Un processus de pensée. Si vous restreignez peu à peu votre processus de pensée, si vous dissolvez peu à peu votre pensée, vous atteignez lentement l'état de non-Mental. Mental signifie pensée. La pensée n'existe par sans le Mental. Et le Mental peut vous aider à faire disparaître le processus de pensée. Cela dépend de vous. Le mental est ce que vous faites de votre conscience. Si vous laissez simplement votre conscience être, sans agir sur elle, vous êtes en méditation.
Il y a deux moyens de parvenir à la méditation. Vous pouvez diminuer l'activité de votre Mental graduellement, peu à peu, comme si vous enleviez un à un les meubles de votre chambre. Peu à peu, vous gagnez de l'espace. Et quand vous avez enlevé tous les meubles, toute la pièce devient espace.
En réalité, ce n'est pas le fait d'enlever les meubles qui crée l'espace. L'espace était là. Il était simplement occupé par les meubles. Une fois les meubles enlevés, l'espace est récupéré. Votre Mental est occupé, encombré, par les pensées. Si vous enlevez les pensées peu à peu, vous regagnerez l'espace occupé. Et quand vous aurez enlevé toutes les pensées de votre Mental, tout l'espace sera libéré. Cet espace, c'est la méditation.
Si on peut parvenir lentement à la méditation, on peut aussi y parvenir brutalement. Il n'est nul besoin de passer sa vie à enlever les meubles. En outre, cette méthode est assez dangereuse, parce que le Mental peut s'inquiéter de cet espace inoccupé et essayer de le remplir par de nouvelles pensées.
Le matin, au réveil, asseyez-vous et méditez pendant quelque temps. Ralentissez votre processus de pensée. Puis, vaquez à vos occupations quotidiennes les pensées vont alors se ruer dans l'espace libéré. Le lendemain, faites de même, et les jours suivants.
 Enlevez certaines pensées, puis laissez-les entrer à nouveau. Un jour, brusquement, vous serez capable d'enlever tous les meubles d'un seul coup. Ce sera votre décision. Ce n'est pas chose facile, parce que vous vous êtes habitué aux meubles. Vous vous sentirez mal à l'aise sans les meubles que vous avez l'habitude de voir; vous ne saurez que faire de tout cet espace, parce que vous n'en avez jamais tant eu.
Le Mental vous conditionne. Il vous habitue à avoir certaines pensées. Avez-vous jamais observé et si vous ne l'avez pas fait, faites le maintenant -que ce sont toujours les mêmes pensées que vous vous répétez tous les jours, comme un vieux disque. Vos pensées sont toujours les mêmes. Pourquoi ? Quel en est l'intérêt ? C'est, en fait, le produit d'une longue habitude. Vous avez ainsi l'impression de faire quelque chose.
L'habitude est un conditionnement. Beaucoup d'enfants ne peuvent pas dormir s'ils ne tiennent pas un jouet. Une fois qu'ils se sont endormis, on peut leur enlever ce jouet. Mais s'il n'est pas là, ils ne peuvent pas dormir. L'enfant est conditionné. Quand on lui donne le jouet, cela déclenche quelque chose dans son mental. Il est prêt à accepter le sommeil.
Il en est de même pour vous. Simplement, les jouets ne sont pas les mêmes. Vous avez du mal, par exemple, à vous endormir dans une pièce qui ne vous est pas familière. Ou bien, vous avez, l'habitude de mettre un pyjama ou une chemise de nuit. Si, par hasard, vous n'en avez pas, vous êtes désorienté. Si vous n'avez pas l'habitude de dormir nu, vous vous sentirez mal à l'aise. Pourquoi 7 ; Il n'y a aucune relation entre la nudité et le sommeil. Mais pour vous, il en existe une, due à une longue habitude. Les habitudes rassurent, apaisent. Et les modèles de pensée ne sont que des habitudes.
Vous avez investi dans vos pensées: voilà le problème. Vos meubles ne sont pas de vieux débris qu'il faut bazarder. Vous avez investi beaucoup de vous-même. Il est possible de jeter dehors tous les meubles immédiatement. Il existe des méthodes plus brutales dont nous parlerons. A l'instant même, vous pouvez vous libérez de tout votre mobilier mental. Mais alors, vous serez brusquement vide, inhabité, vous ne saurez que faire, parce que, pour la première fois, vous ne pourrez plus vous appuyer sur vos modèles habituels. Le choc pourrait même se révéler trop brutal et vous mener à la folie ou à la mort.
C'est pour cette raison qu'il ne faut pas utiliser les méthodes soudaines si l'on n'est pas prêt. Tout à coup toutes les amarres sont coupées, le passé disparaît aussitôt -et quand le passé disparaît, vous ne pouvez plus concevoir l'avenir, parce que l'avenir est toujours conçu en fonction du passé.
Il ne reste plus que le présent, et vous n'avez jamais été dans le présent. Vous étiez soit dans le passé, soit dans le futur. Alors, quand vous êtes dans le présent pour la première fois, vous avez l'impression de devenir fou, de dérailler. Il est dangereux d'utiliser les méthodes soudaines si l'on ne travaille pas dans une école, sous la direction d'un maître, ou dans un groupe, si vous n'avez pas consacré toute votre vie à la méditation.
Les méthodes graduelles ont donc leur intérêt. Elles demandent plus de temps, mais vous vous accoutumerez ainsi peu à peu à sentir l'espace, la beauté et la félicité qu'il apporte.
Il faut essayer de passer de la pensée par association à la contemplation, puis ensuite à la concentration, et de là, se plonger dans la méditation. Voilà la méthode graduelle. Votre marche sera lente mais sure. Vous vivrez toutes les étapes. Et ce n'est que lorsque vous aurez vécu totalement une étape que vous pourrez passer à la suivante. Ce n'est pas un bond: c'est une croissance graduelle. La réflexion par association, la contemplation, la concentration, la méditation, représentent les quatre étapes à franchir.